ÉCONOMIE. En 2023, quasiment 800 entreprises ont été contrôlées par la DGCCRF dans le cadre de la lutte contre les retards de paiement. Olivia Grégoire, la ministre des Entreprises, envisage de doubler le montant des amendes infligées aux mauvais payeurs.

Les pouvoirs publics ne cessent de le répéter : le respect des délais de paiement inter-entreprises est un gage de bon fonctionnement de l'économie, de la compétitivité des sociétés et d'une concurrence loyale entre acteurs économiques. Il y a pourtant encore du travail à faire pour améliorer la situation, et par extension pour préserver la viabilité des TPME, qui sont souvent les plus exposées à ce fléau.

 

 

Des acteurs du logement social épinglés

 

Dans son bilan 2023 publié ce 20 mars 2024, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) indique avoir contrôlé 766 entreprises l'année dernière. Ses services ont également initié 346 procédures de sanction administrative représentant plus de 58 millions d'euros, dont 33 millions d'euros d'amendes et 25 millions de pré-amendes. Un phénomène en hausse de 19% en comparaison à 2022 (291 procédures), et qui concerne notamment des acteurs de la construction et du cadre de vie.

 

"Parmi ces entreprises, quatre entreprises publiques ont fait l'objet d'une amende pour un montant cumulé de 1,1 million d'euros, tandis que deux autres ont fait l'objet d'une pré-amende pour un montant total de 57.000 €. Ces entreprises exercent majoritairement leur activité dans le secteur du logement social", indique la DGCCRF dans un communiqué.

 

Défaillance comptable

 

Ces résultats confirment aussi une tendance lourde, observée depuis plusieurs années. Parmi les principales causes de retards de paiement, Bercy épingle particulièrement "les défaillances en matière d'organisation comptable au sein des entreprises mises en cause", ainsi que l'ignorance du "principe de coresponsabilité prévu par la loi en matière de facturation, selon lequel si le vendeur est tenu de délivrer sa facture, l'acheteur est également tenu de la réclamer afin de pouvoir la régler avant échéance".

 

Certaines amendes infligées en 2023 ont d'ailleurs atteint un montant conséquent. C'est par exemple le cas de la société Veolia Eau, spécialisée dans le captage, le traitement et la distribution d'eau, qui a dû s'acquitter de 1,6 million d'euros. De son côté, l'entreprise Sogetrel, spécialisée dans la construction de réseaux électriques et de télécommunications, a reçu une amende de 1,16 million d'euros.

 

Dans le cadre de la loi Pacte (croissance et transformation des entreprises) de 2019, ces sanctions seront publiées sur un support d'annonces légales ainsi que sur le site Internet de la DGCCRF. Celle-ci se dit par ailleurs prête "à poursuivre son action résolue de lutte contre les retards de paiement entre entreprises, notamment de la part des plus grandes".

 

Un doublement du plafond des sanctions en vue ?

 

Le sujet est d'autant plus d'actualité qu'un projet de directive européenne envisage d'harmoniser les délais de paiement à 30 jours dans toute l'Union européenne. Le gouvernement et le patronat français y mettent toutefois leur veto.

 

"Il ne faut pas se tromper de combat. Ce sont les retards de paiement qui sont délétères pour les entreprises et non les délais en eux-mêmes. Le projet de règlement européen ne répond pas à cette problématique. Les PME seront au contraire pénalisées si on réduit le délai légal de 60 à 30 jours, et nous y sommes opposés", a expliqué Olivia Grégoire, la ministre des Entreprises, dans une interview aux Échos.

 

 

La locataire de Bercy, qui rappelle que le manque à gagner imputable aux retards de paiement s'élève à 15 milliards d'euros pour les TPME, indique vouloir "[rehausser] les sanctions, en doublant le plafond, qui est aujourd'hui de 2 millions d'euros". Le ministère a notamment dans son viseur les collectivités territoriales, régulièrement accusées d'être de mauvais payeurs en la matière.

 

Et à l'heure où les faillites d'entreprises retrouvent leur niveau d'avant-Covid, notamment dans le secteur de la construction, l'administration appelle les professionnels à se saisir des services dédiés, comme les conseillers départementaux aux entreprises en difficulté, les tribunaux de commerce ou la Médiation des entreprises.

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