Les constructeurs s'interrogent sur les moyens d'améliorer la sécurité des bâtiments sensibles après les attentats contre le World Trade Center et prévoient d'ores et déjà une diminution des projets de grandes tours dans le monde.

La réflexion s'est engagée parmi les experts, même si l'on sait qu'aucune solution miracle ne permettra de résister à des impacts équivalents à ceux du 11 septembre qui ont provoqué un déversement considérable de kérosène dans les tours jumelles de New York, indique-t-on dans différents bureaux d'études français.

L'unique solution pour réduire au maximum la vulnérabilité des bâtiments serait de les enfouir sous terre comme c'est le cas pour les centres de commandement des armées, explique Charles Balloche, chef du département sécurité, structure et feu au Centre technique et scientifique du bâtiment (CSTB).

Jusqu'à présent, un bâtiment n'avait pas pour vocation de résister à des agressions terroristes et ses capacités de protection étaient conçues par rapport à des phénomènes tels que tremblements de terre ou tempêtes, ajoute-t-il.

Mais avec l'expérience de New-York, la survenue "d'actes de malveillance" ne pourra plus être ignorée et devra être intégrée dans la conception des bâtiments sensibles (ministères, laboratoires de recherche, sièges d'administrations...) ou dans l'édification de gratte-ciels.

La demande pour ce type de bâtiment va fléchir, notamment en Asie, où ces immeubles répondent souvent à une illustration de réussite économique, indique-t-on au bureau d'étude du constructeur Eiffage.

"L'amélioration de la sécurité passive des bâtiments --celle qui concerne le choix des matériaux, l'architecture-- va vite se heurter à des limites techniques, à moins que les gens n'acceptent de vivre et de travailler dans un bunker", ajoute M. Balloche.

Sans aller jusque là, on peut prévoir un renforcement des murs, avec la pose d'une double protection anti-explosion et anti-souffle, la pose de vitres plus résistantes, la mise en place d'abris intermédiaires entre les étages, une meilleure isolation des cages d'escalier...

"Si la sécurité passive atteint vite des limites techniques, nous avons en revanche toute latitude pour améliorer la sécurité active qui concerne l'approche des immeubles, les signaux d'alarme lors du franchissement d'un espace aérien...", indique Pierre Marodon, chez Eiffage construction.

Comme pour les voitures qu'on ne peut plus assurer sans anti-vol homologué, certains bâtiments pourraient ne plus être assurables si de strictes normes de sécurité ne sont pas respectées.

Les Anglo-saxons ont déjà engagé une réflexion et un rapport est en cours d'élaboration par des équipes d'ingénieurs après l'effondrement des tours de New York, dont les poutrelles en acier n'ont pas résisté à la chaleur dégagée par le feu des hydrocarbures. La question du recours à l'acier et de sa moindre résistance au feu que le béton sera inévitablement posée, souligne M. Marodon.

L'acier prédomine dans les constructions aux Etats-Unis et dans certains pays asiatiques, car il permet des formes plus légères et plus aérées et se monte plus rapidement que le béton. Pour améliorer sa capacité de résistance, il est entouré de multiples isolants, mais il se délite plus rapidement que le béton face à un incendie de la même intensité, soulignent les ingénieurs d'Eiffage.

Désormais des bétons à ultra-haute performance sont d'ailleurs utilisés et permettent les mêmes réalisations que l'acier. Ces matériaux n'existaient pas lors de la construction du World Trade center dans les années 1970.

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