TRANSITION ÉNERGÉTIQUE. Alors qu'une filière REP doit se mettre en place dans les mois qui viennent dans le secteur du bâtiment, la plateforme collaborative Démoclès, l'éco-organisme Ecosystem et l'Ademe lancent ce 12 mars 2020 un appel à projets intitulé "50 maîtres d'ouvrage exemplaires" afin de mieux valoriser les déchets de chantiers.

En attendant la mise en place, probablement longue et fastidieuse, de la Responsabilité élargie du producteur (REP) du secteur du bâtiment, les professionnels tentent de centraliser les connaissances, compétences et innovations pour mieux traiter les déchets de chantiers, qu'on estime à 46 millions de tonnes chaque année. Ainsi, ce 12 mars 2020, la plateforme collaborative Démoclès, l'éco-organisme Ecosystem ainsi que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) ont lancé un appel à projets intitulé "50 maîtres d'ouvrages exemplaires". Le but : dresser un état de l'art sur ce qui se pratique aujourd'hui dans la gestion des déchets, pour mieux accompagner les maîtres d'ouvrage dans la perspective de chantiers de plus en plus inscrits dans une démarche d'économie circulaire et de respect de l'environnement. L'idée est de faire le lien entre les différentes procédures et les nombreux documents administratifs que la maîtrise d'ouvrage doit assumer mais qu'elle perçoit souvent "comme une contrainte". Plus largement, l'ambition des acteurs privés comme publics est aussi, comme l'illustre la loi Economie circulaire, d'établir une traçabilité des déchets, pour s'assurer que le traitement de tout ce qui a été repéré au moment du diagnostic soit effectif au terme du processus.

 

 

"La traçabilité, c'est aussi mettre tous les acteurs et les garder dans cette boucle de responsabilité"

 

"Un outil de traçabilité est tout à fait possible, et suivant les différents schémas de REP qui vont s'organiser, cette plateforme commune de recyclabilité sera essentielle", a affirmé à cette occasion le directeur général d'Ecosystem, Christian Brabant. "Cette question est cruciale. C'est le maillon manquant de la chaîne aujourd'hui", ajoute Rym Mtibaa, coordinatrice de la plateforme Démoclès. "La traçabilité, c'est aussi mettre tous les acteurs et les garder dans cette boucle de responsabilité." Comment embarquer davantage de maîtres d'ouvrage dans cette démarche vertueuse, c'est donc ce à quoi va s'atteler cet appel à projets, auquel peuvent candidater des acteurs professionnels, publics comme privés, dans toute la France (voir encadré), l'objectif étant de mettre en lumière des chantiers exemplaires "duplicables". L'accompagnement des lauréats sera par la suite effectué par des bureaux d'études spécialisés, lesquels réaliseront un état des lieux de leurs pratiques puis leur proposeront un plan d'actions pour opérer les changements nécessaires, dont la mise en place sera suivie.

 

"Toute cette problématique de déchets prend une nouvelle dimension à la veille d'un boom de la rénovation dans le bâtiment", commente pour sa part Arnaud Leroy, président de l'Ademe. "L'enjeu majeur, c'est de ne pas confondre cet appel à projets avec la mise en place de la REP", prévient-t-il toutefois. "Il faut aussi l'adapter dans l'ensemble des strates territoriales. On se retrouve en fait au coeur de l'application de la loi Economie circulaire, et on sera attentif à ce que le niveau des 50 lauréats soit atteint." Dans le secteur, le lancement de cet appel à projets semble pourtant être perçu comme une nouvelle étape de la construction de la REP, mais les professionnels veulent éviter les amalgames : "Il y aura probablement plusieurs éco-organismes [en charge de la REP], probablement par matériaux ou par types de produits, mais cela nécessite d'autant plus l'existence d'une entité multi-acteurs de traçabilité", répond Christian Brabant. Pour Arnaud Leroy, "il faut d'abord faire un état des lieux de la filière et savoir comment traiter les différents types de matériaux utilisés dans les bâtiments des années 1970, ceux des années 1980, ceux des années 2000..." Et d'ajouter : "On ne sait pas pour l'instant l'arbitrage qui sera rendu sur la REP. On est quand même parti pour quelques mois, voire quelques années - et on ne veut pas que la REP écrase tout. Ce serait mentir que de dire que tout sera fixé à la fin de l'année car il s'agit d'une REP très conséquente."

 

Aider à la décision puis offrir l'assurance du respect de la contractualisation

 

Des intervenants qui ont donc insisté sur le fait que le rôle de Démoclès était ici de mettre à disposition des outils standards sur la base d'expériences diversifiées, sans pour autant se substituer aux acteurs de la filière. "Une société sera peut-être créée, mais on ne sait pas sous quel statut", confie Christian Brabant. Le projet devrait donc se concrétiser sous la forme d'une "application informatique" et de "modalités organisationnelles de la filière", le tout chapeauté par "une entité multi-acteurs tiers-garant de la traçabilité". Concrètement, le diagnostic et la traçabilité constitueront les deux volets, le premier en amont et le second en aval, de cette nouvelle organisation : "Le diagnostic est avant tout un outil d'aide à la décision pour le maître d'ouvrage", complète Arnaud Leroy. "La traçabilité permettra au maître d'ouvrage de d'assurer que 'ses' déchets partiront bien dans les filières avec lesquelles il aura contractualisé."

 


Quelles modalités et quel calendrier pour l'appel à projets "50 maîtres d'ouvrage exemplaires" ?

 

Peuvent candidater à cet appel à projets les maîtres d'ouvrage publics et privés "réalisant régulièrement des opérations de démolition/réhabilitation significatives", proposant des chantiers d'expérimentation "dont la phase de consultation des entreprises n'a pas commencé" et ce, sur l'ensemble du territoire national, collectivités ultra-marines comprises.

 

 

Lancé ce 12 mars 2020, l'appel à projets collectera les candidatures jusqu'au 30 avril, date limite de dépôt des dossiers. D'avril à mai, les candidatures seront ensuite examinées, avant l'annonce, fin mai, de la sélection des lauréats. L'accompagnement de ces derniers commencera début juin.

 

Une seconde vague d'appel à projets devrait être lancée en septembre 2020, avec un dépôt des dossiers jusqu'en octobre, puis en décembre, avec des candidatures acceptées jusqu'en février 2021. Les modalités de la seconde vague seront les mêmes que pour la première.

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