CONJONCTURE. L'enquête mensuelle de l'Insee pour le mois de mai 2020 montre que les entrepreneurs du bâtiment ont encaissé de rudes coups sur ces trois derniers mois, mais leur opinion sur l'activité future semble moins négative.

Indéniablement, la crise du coronavirus a bouleversé l'activité de nombreux secteurs économiques français, à commencer par celui de la construction, qui serait même le plus à la peine au niveau européen si l'on en croit les premières estimations d'Eurostat. Quoi qu'il en soit, si l'activité des chefs d'entreprises du bâtiment a bel et bien encaissé de rudes coups sur ces trois derniers mois, l'avenir semble se dégager un peu plus pour eux. C'est ce qui ressort de l'enquête de conjoncture de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) consacrée au mois de mai 2020 : les entrepreneurs ont porté durant cette période un jugement bien plus négatif qu'en avril sur leur activité passée, le solde d'opinion dégringolant (-79% en mai après -22% en avril) et se situant maintenant à son plus bas niveau historique depuis que cette série statistique existe, c'est-à-dire depuis 1975. En parallèle, les chefs d'entreprises ont été moins pessimistes en mai qu'en avril sur leur activité prévue, avec un solde se redressant nettement après avoir connu une très lourde chute le mois précédent (-47% en mai après -86% en avril), bien qu'il demeure largement au-dessous de sa moyenne de long terme depuis 1975 (-5%).

 

 

Des entrepreneurs qui ont aussi été plus nombreux en mai qu'en avril à indiquer avoir réduit leurs effectifs durant les trois derniers mois, avec un solde qui tombe à son plus bas niveau depuis octobre 2016 (-17% en mai après 0% en avril). Les perspectives d'emploi pour le prochain trimestre apparaissent toujours aussi dégradées, avec un solde d'opinion sur les effectifs prévus se situant là encore à son plus faible niveau depuis 2016 (-18% en mai après -17% en avril), et bien en-deça de sa moyenne de long terme (-3%).

 

Des incertitudes sur les carnets de commandes et sur l'état de la trésorerie

 

 

Les opinions des chefs d'entreprises du bâtiment sur l'état actuel de leurs carnets de commandes ne sont guère plus positives : en mai, ces derniers ont été encore plus nombreux qu'en avril à estimer que leur niveau de commandes était inférieur à la normale, avec un solde qui baisse encore et atteint son plus bas niveau depuis mars 2017 (-31% en mai après -26% en avril), sachant qu'il est également bien au-dessous de sa moyenne de longue période (-22%). Les entrepreneurs considèrent toutefois que, compte-tenu de leurs effectifs actuels, leurs carnets de commandes leur assurent 7,4 mois de travail, un niveau plus élevé en mai qu'en avril et nettement plus important que la moyenne de longue période (5,7 mois). Au niveau des prix, la situation semble s'améliorer légèrement, avec un solde d'opinion passant de -17% en avril à -11% en mai, ce qui est même plus élevé que la moyenne de long terme, fixée à -13%.

 

Dans son étude, l'Insee ne fournit cependant pas d'informations actualisées sur les situations de trésorerie et les délais de paiements, les seules données disponibles pour l'heure étant celles du mois d'avril : -36% pour l'état de la trésorerie (la moyenne de longue période étant de -10%), et 44% pour les délais de paiements (30% pour la moyenne de long terme). Des chiffres correspondant avec les retours du terrain, puisque de nombreux professionnels restent inquiets pour la stabilité de leur trésorerie et craignent de ne pas avoir le temps de faire rentrer suffisamment de cash avant que des échéances de paiements, comme le remboursement des prêts garantis par l'Etat, n'interviennent. En revanche, les entreprises du secteur s'accordent à dire que la plupart des acteurs ont joué le jeu en faisant preuve d'une certaine "solidarité" et n'ont pas occasionné de retards de paiements massifs.

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