CONJONCTURE. Impact du reconfinement sur les entreprises de la région, évaluation de la baisse de l'activité sur 2020, état des carnets de commandes, inquiétudes et attentes pour les prochains mois, perspectives pour le début de l'année 2021… Les FFB Grand Paris et Ile-de-France ont interrogé les entreprises du bâtiment, afin de mieux appréhender leur situation.

La population française a été reconfinée fin octobre 2020, mais ce deuxième confinement de l'année est bien différent du premier. Les entreprises du bâtiment le ressentent, puisque contrairement au mois de mars, l'activité peut se poursuivre. Ce reconfinement a malgré tout des impacts, que la FFB Grand Paris et la FFB Région IDF 78-91-95 ont voulu mesurer. Pour cela, une enquête auprès des adhérents a été réalisée entre le 13 et le 20 novembre 2020.

 

Grande différence avec le premier confinement donc : la poursuite de l'activité dans une large proportion. En effet, alors qu'en mars 2020 plus de 90% des chantiers avaient été suspendus en Ile-de-France, ils ne sont cette fois qu'environ 14% à être à l'arrêt. Pour autant, 60% des entreprises franciliennes estiment que leur activité est perturbée par ce second confinement, dont 22% de façon très importante.

 

Des difficultés différentes

 

La principale difficulté rencontrée cette fois concerne la réticence des particuliers à effectuer des travaux chez eux (environ 39%). Viennent ensuite, pour 18% des répondants, les difficultés d'approvisionnement, ou encore dans 16% des cas les problèmes de gestion du personnel liés aux collaborateurs positifs à la covid-19 ou cas contact.

 

Plusieurs points se passent en revanche nettement mieux. Les équipements de protection tels que les masques ou le gel hydroalcoolique sont désormais disponibles facilement, ce qui ne constitue plus un frein à l'activité. De la même façon, les difficultés avec les maîtres d'œuvre, qui avaient été importantes lors du premier confinement, sont cette fois moindres.

 

Une estimation à peu près fiable de la baisse de l'activité pour 2020

 

Cette année si particulière, qui avait pourtant bien commencé pour le secteur, se soldera inévitablement par une baisse globale de l'activité sur un an. En Ile-de-France, "le chiffre d'affaires du bâtiment devrait diminuer de 15,3% en moyenne", indique Philippe Servalli, Président de la commission régionale économique et prospective de l'Union des Fédérations du Bâtiment d'IDF.

 

"L'atterrissage se précise, poursuit-il, et cette évaluation peut être considéré comme à peu près fiable sur la région. Le maintien de l'activité durant ce deuxième confinement permet de limiter la casse." Un chiffre en adéquation avec les prévisions de la FFB au niveau national, qui mise sur une chute de 15% également.

 

Trésorerie mises à mal

 

Malgré cet atterrissage, les prochains mois, et notamment le premier semestre 2021, s'annonce compliqué pour le bâtiment francilien. A tel point que 30% des entreprises interrogées, dont beaucoup d'artisans selon les représentants de la FFB, doutent de la pérennité de leur entreprise.

 

Ou encore 40% font face à des difficultés de trésorerie. Une proportion bien plus élevée (67%) si l'on ne tient compte que des entreprises intervenant principalement dans le domaine de la construction neuve. Or, comme le souligne Philippe Servalli, "la trésorerie est le thermomètre d'une entreprise. Sans cela, même avec un carnet de commandes à deux ans, elle peut disparaître en très peu de temps".

 

Le secteur du bâtiment en Ile-de-France

 

130.000 entreprises

 

85% de TPE/PME

 

350.000 collaborateurs

 

Environ 40 Mds€ de chiffre d'affaires par an

 

Dont 19,3 Mds€ d'entretien/rénovation

 

20,5 Mds€ de construction neuve

 

2 mois de carnets de commandes pour les entreprises de moins de 10 salariés ; 4 mois pour celles de plus de 10 salariés. Pour rappel, en début d'année, les TPE/PME pouvaient compter 6 mois de carnets de commandes, sur plus d'un an pour les groupes plus grands.

 

Une commande publique à la peine

 

A propos de la commande publique justement, les inquiétudes émises par toute la profession depuis plusieurs mois désormais sont toujours bien présentes dans les entreprises franciliennes. Les appels d'offres sont toujours beaucoup moins nombreux que l'an dernier. Entre janvier et septembre 2020, la commande concernant les travaux de bâtiment a en effet baissé de 27%.

 

La longue période électorale, la mise en place tardive des exécutifs locaux, la crise sanitaire et les dépenses imprévues qu'elle a générées, et la prudence d'élus qui n'ont "pas de visibilité sur ce qu'ils vont toucher en termes de dotations en 2021" sont autant de raisons qui expliquent, pour Philippe Servalli, que les investissements sont mis en pause. Problème, "cet arrêt peut être mortel pour nous", prévient-il, regrettant que le bâtiment soit une variable d'ajustement.

 

Et ne lui dites pas que la situation est paradoxale au regard du nombre de grands projets menés en Ile-de-France : "c'est l'arbre qui cache la forêt. Les grands projets n'irriguent pas nos TPE/PME. Nos clients sont les collectivités locales, ce sont elles qui nous font vivre".

 

L'espoir que la rénovation décolle

 

Côté construction neuve, ce n'est pas mieux puisqu'en Ile-de-France, on observe un recul de 23,4% du nombre d'autorisations de construction de logements octroyées sur 12 mois, et de 23,9% pour le non-résidentiel. Alors même que sur le Grand Paris, il existe un besoin très important de logements qu'un objectif annuel de 70.000 nouveaux logements par an est fixé par la loi, rappelle la FFB, qui craint que la crise sanitaire n'accentue celle du logement dans la région.

 

Avec le plan de relance, l'espoir réside dans l'impulsion que souhaite donner le Gouvernement dans la rénovation énergétique. En ce sens, "l'extension de MaPrimeRénov a l'ensemble des ménages, des copropriétaires et des bailleurs va permettre aux entreprises qui sont sur ce segment d'amortir l'impact de la crise sur 2021", estime Philippe Servalli. Dans quelle mesure précisément permettra-t-elle de donner du souffle à une reprise ? Impossible de le dire pour le moment, car il est difficile de mesurer l'effet de levier que susciteront les aides gouvernementales : 7Mds€ d'ici à 2022, dont sans doute environ 30% pour l'Ile-de-France. Sur un segment de l'entretien et de la rénovation qui représente près de 20Mds€ de chiffre d'affaires par an.

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