CONTROVERSE. Le collectif d'architectes pour Candilis a adressé une lettre ouverte au ministère de la Culture concernant la démolition de résidences du Mirail, un quartier populaire de Toulouse. Il s'agit pour lui d'un enjeu d'intérêt public que d'empêcher leur destruction.

Dans le quartier du Mirail, sept immeubles de logements collectifs sont menacés de destruction. Depuis plusieurs mois, cette zone d'habitation du chef-lieu de la région Occitanie connaît une vague de protestation pour la sauvegarde de ses résidences. Au total, 1.421 logements sociaux conçus dans les années 1960 par l'équipe d'architectes Georges Candilis, Alexis Josic et Shadrach Woods vont être détruits. Le collectif d'architectes pour Candilis les juge pourtant de "grande qualité" et a adressé une lettre au ministère de la Culture en novembre 2022 pour les sauvegarder.

 

Le collectif demande un moratoire sur les démolitions menées par la Ville de Toulouse dans le cadre du programme de renouvellement urbain de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru). Une proposition soutenue par de nombreux architectes, souligne le collectif, "dont Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal, Prix Pritzker 2021, Frédéric Borel, Grand prix national de l'architecture 2010, Richard Klein, président national de l'association Docomomo France, ainsi que celui de l'Ordre des Architectes d'Occitanie et de son président Christian Combes, de Christine Leconte, présidente du Conseil national de l'Ordre des architectes, et de Drina et Takis Candilis, fille et fils de Georges Candilis".

 

"Un gâchis sur les plans architectural, patrimonial, écologique, économique et humain"

 

Un collectif d'habitants s'est associé à ce groupement d'architectes pour signifier leur inquiétude de voir les habitations disparaître et a lancé en janvier 2022 une pétition pour sauver les immeubles. "Le projet actuel de démolitions détruit toute l'histoire d'une vie sociale très forte ainsi que des liens de solidarité et d'entraide tissés tout au long de dizaines d'années", rapporte le collectif pour Candilis. En effet, le projet représente pour lui "un gâchis sur les plans architectural, patrimonial, écologique, économique et humain".

 

"Le coût prévisionnel des démolitions s'élève à plus de 87 millions d'euros. Or, cela coûte beaucoup plus cher à la collectivité de détruire et reconstruire que de réhabiliter, à plus forte raison aujourd'hui avec l'inflation sur les coûts de matériaux. Nous pouvons citer l'exemple remarquable de la réhabilitation des immeubles GHI au Grand parc à Bordeaux, récompensée du Prix de l'Union européenne Mies van der Rohe. Les architectes avaient comparé les coûts de la réhabilitation à ceux de la démolition-reconstruction avec un rapport de 3 à 3,6 fois plus faible", continue le collectif. L'empreinte carbone d'une telle opération, évaluée "deux à cinq fois plus élevée que celle d'une réhabilitation", est également décriée.

 

 

Le collectif avance que les appartements répondent aux critères du rapport Girometti-Leclercq 2022, commandité par le ministère du Logement. "Ils offrent des espaces généreux, traversants, lumineux, sans vis-à-vis, insonorisés, et se prêtent facilement à une rénovation énergétique." Aujourd'hui, le dossier est entre les mains de la Direction régionale des affaires culturelles, affirme le collectif, et des relogements de locataires de plusieurs immeubles ont déjà commencé.

 

"La démolition de l'immeuble Gluck peut être imminente puisqu'il fait l'objet d'un permis de démolir accordé", ajoute le collectif. Ce dernier imagine, dans la lettre destinée à la ministre, le lancement d'un concours d'architecture et d'urbanisme pour la requalification urbaine et architecturale du quartier du Mirail. Il permettrait à la fois "d'évaluer les avantages de la rénovation" et de réunir un "jury impartial".

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