ENTRETIEN. Roland Castro nous livre son sentiment sur la mission de réflexion sur l'avenir du Grand Paris, confiée par le président de la République. L'architecte-urbaniste donne des premières pistes et exprime sa confiance en le chef de l'Etat à entendre ses propositions.

Batiactu : Emmanuel Macron vous a confié une mission sur le Grand Paris, pouvez-vous nous en dire plus ?
Roland Castro : C'est une demande du président pour mettre en scène ce que pourrait être le Grand Paris sur le plan de la solidarité, de l'attractivité, de la mutation agricole, de la lutte contre le changement climatique… Avec pour ambition d'en finir avec la question "des quartiers" et de transformer complètement le territoire de "Paris en Grand". Il ne s'agira pas de donner une vision urbanistique technique mais d'alimenter la réflexion.

 

Batiactu : Cette mission, la mènerez-vous seul ?
Roland Castro : La démarche sera accompagnée de concertations avec les élus, les institutions et les composantes du fameux millefeuille. Mais c'est très urgent. Je suis donc déjà au boulot depuis un mois, la lettre de mission a mis un peu de temps à arriver. J'ai déjà fait des réunions avec des architectes avec qui j'avais déjà travaillé sous la présidence de Sarkozy, en 2008, déjà sur la question du Grand Paris, notamment de Portzamparc et d'autres. J'ai également rencontré des maires. Puis il y aura une partie publique, à un moment, pour y associer le grand public. Ce qui va être différent cette fois par rapport aux missions précédentes sur le Grand Paris, c'est que les choses sont dans le bon ordre, avec une pensée scénarisée de la ville, plus racontée et romanesque, non technique. Nous allons penser aux institutions et systèmes nécessaires pour aller dans le bon sens. Un projet de loi sera proposé sur les conditions à remplir.

 

Batiactu : Quelles seraient vos premières réflexions ?
Roland Castro : En résumé, c'est la vision d'un modèle de métropole mondiale, qui combine attractivité et solidarité, tout en éliminant les mauvaises idées des décennies passées : zones industrielles, zones commerciales… J'ai le sentiment de repartir du dernier plan d'aménagement de la région parisienne de Prost et Morizet dans les années 1930, sous le Front Populaire. Cela ne sera pas technocratique. Entre temps il y a eu de grands changements, la décolonisation, le métissage… Il faut lutter contre le communautarisme par les circulations et les ouvertures.

 

Batiactu : Vous avez déjà des idées symboliques, comme le ministère déplacé en banlieue que vous proposiez à Emmanuel Macron en 2016 ?
Roland Castro : Il faut gommer le périphérique et cesser d'en faire une barrière. Et que l'autoroute A86 qui est un périphérique à l'échelle de l'Île-de-France devienne une avenue urbaine. Arrêter l'étalement urbain sera également une priorité. Et oui, nous allons reparler du ministère en banlieue avec Emmanuel Macron. J'ai par exemple proposé que le quai d'Orsay soit déménagé vers Roissy-Charles de Gaulle pour symboliser son ouverture sur le monde. Les membres de l'administration vont me haïr mais le locataire actuel du ministère des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, connait le travail que j'ai fait à Lorient et il sait que je ne dis pas que des bêtises. J'avais déjà proposé, du temps de Mitterrand, que la Grande Bibliothèque soit implantée là où se trouve aujourd'hui le Stade de France par exemple. Ou un autre grand projet à la confluence de la Seine et de la Marne. Ce qu'il faut c'est multiplier l'offre culturelle en dehors du "petit Paris", opposer du multipolaire au centre historique.

actionclactionfp