INTERVIEW. Alors que l'Acoss vient d'annoncer que le secteur du BTP était de nouveau le plus touché par le travail illégal, François Roux, délégué général de Prism' emploi explique à Batiactu pourquoi l'encadrement du détachement est devenu une priorité dans le secteur du bâtiment

Le secteur du BTP, est de nouveau le plus touché par le travail illégal comme viennent de le rappeler les chiffres de l'Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (Acoss), dévoilés ce jeudi par Les Echos. Ils révèlent que près de la moitié (51%) des redressements dûs au travail au noir aurait été détectée dans la construction. De son côté, François Roux, délégué général de Prism' emploi, organisation patronale chargée de l'intérim, explique à Batiactu, les raisons d'encadrer le détachement dans le secteur de la construction et de dresser un bilan d'étape des moyens mis en places.

 

 

Batiactu : Après les lois Savary, Macron et plus récemment El Khomri qui renforcent le dispositif contre le détachement illégal, êtes-vous en mesure chez Prism'emploi de dresser un bilan dans le secteur intérimaire du BTP ?
François Roux :
C'est très difficile à mesurer et vérifier dans le BTP ! Dans le dernier rapport de la Direction générale du travail publié le 30 mai 2016, une augmentation de 10 % des détachements a été observée en 2014 par rapport à 2013. Malgré son retard à l'allumage et des difficultés observées à l'Imprimerie nationale, nous attendons que la carte d'identification BTP entrée en vigueur le 22 mars 2017 soit déployée progressivement dans toutes les régions d'ici cet été mais aussi que le décret d'application de la loi Travail, renforcent les obligations des maîtres d'ouvrages et donneurs d'ordre, paraisse.

 

Sans aucun doute, ces moyens supplémentaires encadreront le détachement en France et participeront à la reprise du bâtiment. Nous soulignons tout de même que l'applicatif informatique de la carte BTP n'est pas encore adapté à la spécificité des agences d'emploi. Quant à l'échange de données informatisées (EDI), nous n'avons pas encore de visibilité sur la date de mise en œuvre.

 

Autre point positif : la ministre du Travail nous a informés ces jours-ci que d'ores-et-déjà 30 chantiers ont été arrêtés au premier trimestre 2017. C'est une bonne nouvelle pour les entreprises qui ne respectent pas la loi.

 

Batiactu : Le Parlement Européen est sur le point de s'attaquer à la modification de la directive détachement, quelle peut-être la conséquence de cette réforme sur le droit français ?
François Roux :
Nous sommes très vigilants à ce que vont décider le Parlement européen et le Conseil qui souhaitent s'accorder sur un texte commun. Il est probable que ces modifications auront des conséquences des modifications sur le droit français. Nous ne voulons pas qu'ils proposent des initiatives qui tenteraient d'exclure les Entreprises de travail temporaire (ETT) du champ d'application de la directive. Rappelons les conséquences : les ETT étrangères pourraient alors déléguer leurs salariés dans les conditions de travail et d'emploi de leur pays d'origine. Pour l'heure actuelle, rien ne dessine une majorité chez les Etats membres pour que le texte soit adopté compte tenu du bloc des pays de l'Est.

 

Batiactu : quelles sont les recommandations que vous avez relayées auprès des candidats à la Présidentielle ?
François Roux :
Nous leur avons répété ces mois-ci qu'il fallait cibler les contrôles précisément sur les chantiers avec des offres anormalement basses et organiser des contrôles tous les week-ends. S'agissant du droit de sécurité sociale, nous préconisons une modification des règles relatives à l'affiliation au régime de Sécurité sociale du pays d'origine. Et nous sommes en parfaite adéquation avec Jacques Chanut de la FFB et Patrick Liébus à la Capeb. En cette année d'élection présidentielle, la question du détachement est particulièrement politique.

 

L'emploi intérimaire dans le domaine du bâtiment a progressé de 11,9 % en mars 2017

 

Batiactu : Enfin, vous publiez ce jeudi matin les chiffres mensuels de l'intérim, où en est-on dans le BTP?
François Roux :
En mars 2017, sur un mois glissant, l'emploi intérimaire dans le domaine du bâtiment a progressé de 11,9 % par rapport à la même période de 2016. Nous constatons qu'il y a notamment de plus en plus d'ouvriers qualifiés.

 

 

Après avoir été porté en 2015 par les qualifications de premier niveau, le développement de l'intérim s'appuie depuis le début 2016 sur des métiers plus qualifiés. Cette tendance se confirme au premier trimestre 2017 où les deux catégories professionnelles qui se développent le plus sont les cadres et professions intermédiaires (11,9%) et les ouvriers qualifiés (11,2%).

 

De la même manière, sur ce début d'année 2017, le BTP qui a renoué avec la croissance en 2016 (+8,1%) enregistre une accélération avec 10,1%.

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