EMPLOI. La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a annoncé le 24 juin en soirée la manière avec laquelle, à l'occasion de la relance, un nouveau combat allait être mené pour limiter le recours au travail détaché.

A l'issue d'une réunion sur la sauvegarde de l'emploi qui s'est tenue ce mercredi 24 juin 2020 avec les partenaires sociaux, à l'Élysée, la ministre du Travail Muriel Pénicaud a détaillé le contenu des échanges, revenant notamment sur l'un des grands thèmes abordés par les acteurs : le travail détaché. L'an dernier, plus de 500.000 salariés de ce type ont été actifs en France. Et les pouvoirs publics ne souhaiteraient pas que l'effort de relance constitue une nouvelle invitation aux entreprises d'avoir recours, au-delà du raisonnable, à cette solution. "Nous sommes l'un des pays européens qui accueillent le plus de travailleurs détachés", a d'abord constaté Muriel Pénicaud. "Nous allons continuer de le faire, mais il nous faut réguler, nous assurer que les règles soit toujours bien respectées." L'État veut par exemple s'assurer que les entreprises ont recours à cette forme d'emplois en dernier recours, lorsqu'ils n'ont trouvé ni main-d'œuvre locale ni jeunes à former.

"C'est aussi un combat européen"
, a ajouté la ministre. "Après notre premier succès sur la directive travail détaché, fondé sur le principe 'à travail égal, salaire égal', nous menons un nouveau combat sur le principe 'à travail égal, coût égal'." Pour le Gouvernement, les cotisations sociales à payer pour un travailleur détaché devraient être les mêmes que pour un salarié local - alors qu'aujourd'hui, elles sont fixées au niveau du pays d'origine. Les pouvoirs publics entendent également "intensifier la lutte contre les fraudes au travail détaché". Un dispositif plus radical serait à l'étude : conditionner le recours à l'activité partielle au fait de ne pas employer de salariés détachés.

 

 

"Une sorte de préférence nationale en matière d'emploi"

 

Ce même 24 juin, Les Échos avait précisé qu'Emmanuel Macron avait dans l'idée de donner un tour de vis supplémentaire aux conditions de recours aux salariés détachés. Un souhait qui serait justifié, certes par des motifs économiques, mais qui serait également motivé par des considérations politiques, dans un contexte où l'activité repart mais où le chômage enregistre une progression alarmante.

 

 

En quoi consisterait exactement ce durcissement ? D'après le quotidien économique, le président de la République voudrait "freiner l'accueil de travailleurs détachés dans les entreprises qui engagent des plans de sauvegarde de l'emploi, des plans de départs volontaires ou qui recourent au chômage partiel" ; ce dernier dispositif ayant déjà évolué au 1er juin dernier et devant encore faire l'objet d'annonces d'ici ce soir.

 

Si, sur le plan juridique, il semblerait quasiment impossible d'interdire purement et simplement le recours au travail détaché, le Gouvernement pourrait néanmoins envisager à la place un renforcement des contrôles et une incitation à "une sorte de préférence nationale en matière d'emploi". Cependant, une telle décision prise au niveau de la France nécessiterait des ajustements au niveau communautaire, notamment une coordination administrative et juridique entre les Etats-membres qui pourrait s'avérer fastidieuse.

 

Dossier complexe

 

 

Ce n'est pas la première fois qu'Emmanuel Macron s'empare de ce sujet depuis qu'il est arrivé à l'Elysée : en octobre 2017, le chef de l'Etat avait déjà obtenu auprès des institutions européennes que les salariés détachés soient rémunérés au même niveau que leurs homologues français et que la durée de leurs missions ne dépasse pas un an.

 

Mais avec les annonces actuellement dans les tuyaux, ce sont les acteurs économiques de son propre pays qu'il va devoir convaincre. En coulisses, les réactions semblent déjà mitigées, une partie du patronat craignant que cette "préférence nationale" ne règle pas l'ensemble des problèmes du marché de l'emploi tricolore, une autre estimant que les problèmes de concurrence déloyale ne seront pas résolus tant que la question du paiement des charges sociales n'aura pas trouvé de réponse adéquate. Affaire à suivre.

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