Après un an d'absence, l'Observatoire des délais de paiement revient avec son lot de bonnes et mauvaises nouvelles. Si une relative stabilité générale est observée sur le second semestre 2015, certains secteurs comme la construction, pourtant vertueux, restent fortement dégradés. Détails.

Après le lancement par Emmanuel Macron d'un plan d'actions pour rétablir une situation normale aux délais de paiement, basé entre autres sur le renforcement des sanctions et amendes, voilà la nouvelle mouture de l'Observatoire dirigé désormais par Jeanne-Marie Prost.

 

Le rapport dresse un constat contrasté de la situation des délais de paiement sur les deux dernières années, indique un communiqué du ministère de l'Economie. Si la tendance de fond, depuis plusieurs années, évolue vers une baisse régulière des délais de paiement sur la période 2014/2015, celle des retards de paiement depuis mi-2014 a été défavorable avec une multiplication des petits retards. Certes, une relative stabilisation est à noter sur le second semestre 2015, mais la situation demeure dégradée dans certains secteurs dont celui de la construction, ajoute le service d'Emmanuel Macron.

 

Baisse plus rapide des délais fournisseurs que des délais clients

 

Ainsi, en 2014, le solde du crédit interentreprises dans ce secteur de la construction (16% des entreprises) se détériore de près d'une journée, à environ 28 jours de chiffre d'affaires. Si les entreprises font un effort notable pour régler leurs fournisseurs trois jours plus tôt qu'en 2013, à 55 jours d'achats en moyenne, dans le même temps, leurs clients ne paient leurs factures qu'un jour plus tôt, à 63 jours de chiffre d'affaires. « Cette baisse plus rapide des délais fournisseurs que des délais clients s'observe depuis 15 ans », note l'Observatoire. Ainsi, les entreprises du secteur règlent leurs fournisseurs 24 jours plus tôt qu'en 2000, alors qu'elles n'ont gagné que 7 jours de chiffre d'affaires dans les règlements de leurs clients.

 

Cette aggravation des besoins de trésorerie met à jour les difficultés, « récurrentes et aggravées par la crise » des entreprises dans le recouvrement de leurs créances, et notamment des plus petites d'entre elles « qui subissent un rapport de force défavorable face aux grands donneurs d'ordre », qu'ils soient privés ou publics. Et c'est justement sur ce point que la Capeb et la FFB ont témoigné, observant que l'augmentation des délais clients est la principale cause des tensions sur la trésorerie de leurs entreprises. Ainsi, la Capeb fait état de 59% des TPE du bâtiment qui ont un besoin de trésorerie supérieur à 10.000 €. Sans trésorerie solide, la reprise s'annonce difficile, plaident les deux organisations.

 

Les TPE du bâtiment victimes de la pression de leurs gros fournisseurs et clients

 

Sur le volet des retards de paiement, l'Observatoire constate un « relâchement » sur la période récente. En cause ? Les grandes entreprises, collectivités territoriales et l'Etat qui restent des mauvais payeurs. De fait, le secteur de l'approvisionnement de la construction est particulièrement touché, avec des retards d'une durée moyenne de 54 jours de chiffre d'affaires, se concentrant sur seulement 10% des clients, principalement des grandes entreprises de l'Etat, note la Confédération du commerce de gros (CGI). A l'inverse, note l'étude, la clientèle « artisans/PME/commerçants » est plutôt vertueuse puisque 95% paient les entreprises interrogées à moins de 60 jours.

 

Au niveau des très petites entreprises (TPE) du bâtiment, la Capeb rappelle la situation économique délicate du secteur, qui a enregistré une baisse de 2% en 2015. Dans ce contexte, la proportion des retards poursuit sa croissance, avec 80% des entreprises de l'artisanat du bâtiment victimes de retards de paiement. Des retards qui ont été multipliés par deux entre avril 2013 et octobre 2015, passant de 16 à 32 jours, souligne l'Observatoire.

 

Les TP souffrent également

 

Le secteur des Travaux publics n'est pas mieux loti, au contraire, les entreprises estimant que 45% de leurs clients ne respectent pas les délais plafonds. Une situation qui impacte de fait les marchés publics, précisent la FFB et la Capeb, qui mettent le doigt sur la persistance les délais cachés, soit ceux qui sont en amont de la mise en paiement des situations de travaux.

 

Reste que le BTP, comme l'avait déjà annoncé la dernière étude Altarès, mérite le titre de « bon élève » en matière de délais de paiement, avec sur les trois premiers trimestres de 2015, 46% des entreprises qui ont réglé leurs fournisseurs sans retard, contre 37% pour l'ensemble de l'économie. Là encore, c'est le fait que les TPE ont moins de leviers pour faire pression sur leurs fournisseurs et clients.

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