RÉNOVATION. En plein cœur de Paris, une société foncière a fait l'acquisition de L1ve, l'ancien siège du constructeur automobile français. Le projet souhaite mettre en valeur le patrimoine de ce site du XXe siècle, en le mettant aux normes d'aujourd'hui.

La ville de Paris voit peu à peu ses anciens sites industriels se transformer… L'un des exemples les plus significatifs se trouve au sein du XVIème arrondissement. C'est là qu'un projet de rénovation prévoit de modifier L1ve, l'ancien siège de Peugeot, en siège social pour la société Boston Consulting Group. Construit en 1964, le bâtiment a été initialement conçu pour le constructeur automobile sur un axe historique de la capitale, au 75 avenue de la Grande armée, entre le Louvre, les Champs-Élysées et La Défense. En 2015, la société foncière Gecina a acquis le site et a fait appel en 2017 à l'agence internationale Baumschlager Eberle pour s'occuper de la restructuration du bâtiment.

 

En 2015, avant l'arrivée de Meka Brunel, "Gecina voulait démolir pour reconstruire, une option écartée par la ville de Paris qui souhaitait conserver cet ouvrage unique du patrimoine du XXème siècle, tout en luttant contre les déchets issus de la construction et l'urgence climatique", narre l'architecte Anne Speicher, de l'agence sélectionnée pour ce projet. Présente lors de la journée Enerj-meeting organisée par Batiactu ce mardi 7 septembre, au palais Brongniart à Paris, l'intervenante raconte comment la municipalité, Gecina et l'agence d'architecture se sont entendus pour transformer ce bâtiment en puits de carbone, plutôt qu'en nouvelle source de CO2.

 

Apporter plus de lumière au site

 

"La question portait sur comment garder l'existant tout en créant une nouvelle identité", reprend-elle. Le bâtiment, qui s'étend sur 33.500 m2 de surface et comprend cinq sous-sols, est composé d'une façade en granit et damiers porteurs. "Nous avons voulu apporter une nouvelle dynamique à cette façade, en mettant des caissons vitrés extrudés pour créer un nouveau relief. Les caissons apportent plus de lumière naturelle, rendant la façade moins austère", explique l'architecte.

 

Le showroom de Peugeot, au rez-de-chaussée, se mue en grande galerie et voit son sol rénové. "Le plafond atteint huit mètres dans cette pièce, ce sont des volumes qu'on ne voit plus dans les bâtiments d'aujourd'hui. C'est pour cela qu'il ne fallait pas démolir le bâtiment", estime Anne Speicher. L'agence a réfléchi à concevoir l'établissement comme un espace recevant du public, capable de répondre aux enjeux de mobilité. 300 places de vélo sont disponibles au rez-de-chaussée et accessibles par une énorme rampe. "1.500 personnes travaillent dans cet immeuble, nous pensons que chaque utilisateur doit avoir sa place de vélo pour s'engager dans une ville apaisée et agréable à vivre."

 

Épouser l'ancien en composant avec les installations modernes

 

Une salle de fitness, des salles de réunion et un auditorium se trouvent au sous-sol. "Pour améliorer la qualité d'usage du bâtiment, la qualité de l'air et le rafraîchissement naturel de la parcelle pour l'ensemble du quartier, nous avons composé un paysage en dégageant les toitures terrasses et les installations techniques présentes."

 

 

Le projet doit également permettre au site de s'aligner aux immeubles mitoyens du côté de l'avenue Foch, avec une nouvelle façade en brique blanche moulée main. Le matériau "fait le lien entre l'ancien site industriel et la rue résidentielle", analyse l'intervenante. Celle-ci considère que le bâtiment est un bel exemple de ce que représente l'architecture, c'est-à-dire "une pensée collective", entre le public et le privé. "Comment [la filière peut-elle] augmenter la qualité d'usage tout en réduisant l'impact carbone ?", demande alors l'architecte, devant un auditoire amassé dans l'une des salles du Palais Brongniart. "Pour ce bâtiment, cela passe par le fait de conserver la totalité des volumes."

 

Au total, 92% des déchets ont été recyclés et 81 tonnes ont été réemployées. Un moyen d'éviter de produire 394 tonnes de CO2. Le marbre a notamment servi au revêtement des sanitaires. 186 volées d'escaliers, transformées par Eiffage à base de déchets de l'industrie de sidérurgie, ont été nécessaires pour concevoir les nouvelles issues de secours. "A travers ce projet de restructuration, nous voulions non seulement préserver le patrimoine parisien du XXème siècle mais aussi faire rayonner le bâtiment en assurant sa longévité et en l'équipant pour le futur. Le site représente un changement radical dans la performance énergétique des bâtiments", conclut Anne Speicher. La livraison de L1ve est prévue pour le second trimestre 2022.

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