JUSTICE. Un ancien membre des services de renseignement norvégien, également responsable de la sécurité de l'usine Lafarge de Jalabiyah (Syrie) entre septembre 2011 et octobre 2013, a été interpellé et mis en examen à Paris au début du mois de mai. Il aurait participé à l'opération de financement occulte de groupes terroristes sur place.

Une personne de plus a été mise en examen à Paris dans le cadre de l'enquête sur les versements à des groupes armés en Syrie. Il s'agit de Jacob Waerness, qui fut responsable de la sécurité de l'usine de Jalabiyah entre septembre 2011 et octobre 2013 et qui s'avère également être un ancien membre des services de renseignement norvégien. L'homme a été interpellé à l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle au moment d'une escale entre deux vols, précise l'AFP. Il avait été convoqué plusieurs fois par les douanes judiciaires, en charge de l'enquête, mais n'avait jamais répondu à leurs demandes.

 

 

La direction était au courant, le Quai d'Orsay aussi…

 

Remis en liberté sous contrôle judiciaire, il est mis en examen pour "financement d'une entreprise terroriste", tout comme sept autres cadres dirigeants du cimentier Lafarge. Dans un livre et plusieurs interviews, il aurait reconnu que Lafarge avait négocié, via un intermédiaire syrien, la continuation de l'activité de l'usine, malgré la guerre, en versant plus de 12 M€ à l'Etat islamique et au Front al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda. Selon les déclarations de l'ex-agent norvégien, la direction parisienne était bien au courant de ces pratiques, alertée notamment par Jean-Claude Veillard, alors directeur de la Sûreté de tout le groupe, lui aussi mis en examen.

 

 

Outre l'entreprise elle-même, le ministère des Affaires étrangères aurait également été tenu informé de cette situation anormale, comme l'a avoué l'ex-ambassadeur de France en Syrie qui s'était entretenu avec des responsables de Lafarge à l'été 2012. En octobre 2014, la France aurait même demandé aux Etats-Unis d'épargner les installations industrielles de Jalabiyah, pourtant abandonnées par les ouvriers et laissées aux mains des combattants de Daesh. Ceci afin de préserver les investissements de plus de 500 M€ réalisés en 2010 par Lafarge afin d'en faire un outil de pointe au Moyen-Orient

 

Il y a un an, le groupe Lafarge reconnaissait du bout des lèvres que sa filiale syrienne avait "remis des fonds à des tierces parties afin de trouver des arrangements avec un certain nombre de groupes armés" qui tentaient alors de contrôler "les zones autour de l'usine", située à moins de 100 km de Raqqa, la capitale proclamée de l'Etat islamique. Les versements effectués avaient alors pour but "de maintenir l'activité et d'assurer le passage sûr des employés et des approvisionnements vers et depuis l'usine". Des agissements depuis qualifiés "d'erreurs de jugement significatives" et "inacceptables". L'affaire a également mené à la démission d'Eric Olsen, patron de LafargeHolcim, au cours de l'été 2017.

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