ASSISES DU LOGEMENT. Le texte de loi Elan, voté en première lecture par les deux assemblées, doit passer en commission mixte paritaire le 19 septembre prochain. L'ensemble des membres de cette dernière sont désormais connus. Avant cette nouvelle échéance, Batiactu revient sur l'état du texte à sa sortie du Sénat.

Le projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, ou Elan, a été adopté dans la soirée du 25 juillet par le Sénat, après que son examen a été rallongé. Ratifié en première lecture grâce aux voix des sénateurs LR, UC (Union centriste) et Les Indépendants, le texte a en revanche mobilisé contre lui les parlementaires PS et CRCE (Communiste républicain citoyen et écologiste, à majorité communiste), tandis que les élus LREM se sont abstenus de façon "bienveillante". La commission mixte paritaire commencera son examen le 19 septembre prochain, ses membres ont été convoqués en ce sens. Pour retrouver l'ensemble des députés et sénateurs désignés, suivez ce lien.

 

 


Les Assises du Logement : un nouveau rendez-vous pour faire avancer le logement au XXIe siècle
15 novembre 2018, Conseil économique social et environnemental, Palais d'Iéna, Paris

Retrouvez à cette occasion un décryptage de la loi ELAN, dont le processus de vote aura normalement abouti, dès cette première édition.

Pour en savoir plus sur le programme et s'inscrire : www.assisesdulogement.com

 

Les élus locaux en position de force

 

Que s'est-il donc décidé au Palais du Luxembourg ? Les sénateurs ont largement amendé le texte : les dispositions conduisant à une recentralisation des dispositifs des politiques locales de l'habitat au profit du préfet ont notamment été supprimées en commission. De nouvelles possibilités de constructibilité, très encadrées, dans les zones agricoles et littorales, ont été ajoutées, parmi lesquelles le comblement des "dents creuses", c'est-à-dire des parcelles vides situées entre deux constructions. De plus, les parlementaires de la Chambre haute ont intégré plusieurs dispositions de la proposition de loi sur la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, adoptée par le Sénat au mois de juin, et dont Batiactu avait détaillé le contenu. Par ailleurs, la construction de logements sociaux par les communes, prévue par la loi SRU, a été assouplie.

 

 

Des dispositions plus souples

 

Lors de la séance publique, les sénateurs ont également dirigé le produit des ventes de logements sociaux vers des opérations réalisées sur le territoire de la commune. De même, les communes et intercommunalités soumises à la loi SRU peuvent dorénavant mutualiser leurs obligations en matière de taux de logements sociaux à l'échelle intercommunale, par le biais d'un contrat intercommunal de mixité sociale. Les amendements au texte d'origine ne s'arrêtent pas là : la Haute assemblée a aussi acté l'installation d'éoliennes sur des territoires de taille réduite, comme certaines îles bretonnes. Les parlementaires du Luxembourg ont également infligé un camouflet au gouvernement en rejetant l'amendement déposé par ce dernier, portant sur la création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires, un projet d'institution publique dont l'objectif serait de lutter contre les fractures territoriales. A ce propos, Dominique Estrosi-Sassone, rapporteur (LR) du texte, a précisé que la mise en place de cette agence était intéressante sur le principe, mais qu'il était cependant nécessaire de travailler encore sur "deux points essentiels", à savoir sa gouvernance et ses modalités.

 

"Une énième loi de déréglementation"

 

A la suite de l'adoption d'Elan par la Chambre haute, les parlementaires ont réagi : "Nous avons replacé les élus locaux au centre de la politique du logement", s'est félicitée Sophie Primas, présidente (LR) de la commission des affaires économiques. "Nous avons pris des dispositions pour desserrer les contraintes et construire mieux, y compris dans le logement social." Du côté de l'opposition, on fustige en revanche "une énième loi de déréglementation (qui) aggravera le mal logement", selon Cécile Cukierman (CRCE). "Trop de lignes ont été franchies sur ce projet de loi", renchérit Xavier Iacovelli (PS). "Etre transgressif ne signifie pas que l'on doive revenir sur des acquis sociaux de nos concitoyens."

 

La réunion de la commission mixte paritaire doit permettre de mettre d'accord députés et sénateurs sur un texte commun. "Nous avons tout l'été pour arriver à une CMP conclusive qui permettra d'envisager un débat budgétaire pour le moins clair", affirmait Sophie Primas à l'issue des débats au Sénat. Qu'en sera-t-il ? La réponse sera donc donnée dès le 19 septembre.

 

 

 

Plusieurs organisations réagissent à l'adoption du texte par les sénateurs

 

Dans la foulée de la ratification du projet de loi par le Sénat, l'Union des syndicats de l'immobilier (Unis) a réagi par voie de communiqué. Christophe Tanay, son président, a notamment qualifié le texte de "fourretout indigeste qui s'occupe plus des détails que des objectifs", regrettant qu'Elan ne redéfinisse pas "un cadre réglementaire efficace qui permette [à la profession] d'offrir à [ses] clients un cadre de vie confortable et à prix abordable". Rappelant au passage que l'application de la loi Alur avait été longue et fastidieuse, en raison de plusieurs remaniements, l'Unis déclare qu'elle suivra "pas à pas les évolutions du projet de loi Elan et du projet de loi de Finances" de manière à ce que les orientations choisies par le gouvernement et le parlement "[n'aillent] pas vers plus d'inégalités et d'exclusions".

 

De son côté, la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) note quelques "grandes satisfactions", à savoir le rétablissement de la compétence en copropriété du CNTGI (Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières) et la réintégration de sa fonction déontologique avec la mise en place d'une commission de contrôle. De même, la restauration des frais de retard de loyer à la charge du locataire ainsi que la clarification des éléments de l'action de groupe soumis au droit de la consommation ont été saluées. En revanche, l'organisation parle de "surprises" concernant l'adoption de deux amendements relatifs à la possibilité d'assignation du syndicat de copropriété en cas de non-respect de dispositions légales ou réglementaires, ainsi que sa sanction automatique sur les honoraires. Le vote du transfert des colonnes montantes électriques dans le domaine public constitue également une "surprise" aux yeux de l'organisation, mais dans le bon sens du terme cette fois-ci.

 

A l'inverse, la Fnaim regrette l'instauration du bail numérique, consistant à automatiser l'envoi des données aux observatoires. La fédération déplore en outre que "le gouvernement [n'ait] pas renoncé à l'encadrement [des loyers] et en [ait] transféré la responsabilité aux élus locaux en zones tendues et pour n'encadrer que certains espaces". Enfin, la proposition de la Fnaim que les professionnels de l'immobilier puissent être, sur option, dispensés du permis de louer, a été rejetée.

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