CONSTRUCTION. La dynamique lancée par la RE2020 pourrait permettre au bois d'atteindre entre 20 et 30% de part de marché à l'horizon 2030, espère Luc Charmasson, président du comité stratégique de filière bois, auprès de Batiactu.

Après le coup de tonnerre des annonces de novembre 2020 sur la réglementation environnementale 2020 (RE2020), la filière de la construction bois se veut conciliante et rassurante. C'est l'un des enjeux de son plan ambition bois 2030, publié ces derniers jours, contenant 10 engagements des acteurs du secteur (voir encadré ci-dessous), dont ceux de favoriser la mixité des matériaux, développer l'offre en bois français ou encore réduire les coûts. Alors que le Gouvernement estimait que la RE2020 allait faire en sorte que le système constructif bois devienne "la norme" en maison individuelle dès 2030, Luc Charmasson, président du comité stratégique de filière bois, assure pour sa part viser une part de marché de 20 à 30% du bâtiment à cette date. "Nous sommes aujourd'hui à 6%, ce qui n'est pas normal : nous souhaitons simplement récupérer la part de marché qui nous revient, dans un esprit de mixité des matériaux avec le béton et l'acier ; par exemple, les fondations des immeubles resteront en béton, les garages enterrés resteront en béton..."

 

Une "petite révolution"

 

Bien sûr, il ne s'agit pas pour le bois de nier qu'une "petite révolution" se dessine. Et les premiers engagements pris dans le plan "ambition bois" visent tout d'abord à reconnaître les faiblesses de la filière, les points sur lesquels un renforcement est nécessaire. "Le bois construction vient à 63% de la foret française, ce qui est insuffisant", reconnaît par exemple Luc Charmasson. De nombreux bois composites comme le lamellé collé, le CLT ou le contrecollé sont importés de pays européens. Il en résultat un besoin massif d'investissements dans le bois d'ingénierie. Mais sans focalisation excessive sur le CLT, produit destiné aux immeubles de grande hauteur, souvent présenté comme un 'remplaçant' du béton en gros œuvre. "Le CLT représente 3 à 4% du marché, nous atteindrons peut-être les 7-8%", explique Luc Charmasson.

 

 

Également présente dans "ambition bois", la formation constitue un autre chantier prioritaire, ne serait-ce que pour instruire une partie des maçons 'classiques' aux métiers de la construction bois, dans lesquels la phase conception est nettement plus importante. "Pour une heure de travail sur chantier, vous en avez dix en bureau d'études. Tout doit être parfait pour le moment de la mise en œuvre. C'est une autre façon de travailler, et certains pavillonneurs qui ne disposent plus de bureaux d'études n'ont plus les compétences nécessaires", observe Luc Charmasson. Cette dimension de préfabrication industrielle, de construction d'éléments sur mesure, va apporter d'autant plus de valeur ajoutée au secteur, et d'intérêt pour les métiers du bâtiment, alors que "les manières de construire ne bougent plus depuis des dizaines d'années", assure Luc Charmasson, et que les jeunes rechignent à devenir compagnons.

 

"Est-ce que cela sert le secteur de la construction de se déclarer contre le bois ?..."

Luc Charmasson regrette enfin la polémique déclenchée par l'encouragement à la construction bois que constitue la RE2020. "Alors que le secteur du BTP est taxé d'immobilisme, ne renvoie pas toujours une bonne image, est-ce que cela sert le secteur de la construction de se déclarer contre le bois ?... Nous représentons seulement 6% du marché, et je pense que ceux qui pèsent 80% devraient être à l'écoute."

 

Les constructeurs bois bientôt représentés au conseil supérieur de la construction (CSCEE) ?

 

"Nous avons saisi le président du CSCEE, Christophe Caresche, ainsi que la ministre du Logement à deux reprises, de manière à ce que nous soyons représentés au sein du conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE)", explique Luc Charmasson à Batiactu. Le président du CSF bois considèrerait comme logique qu'un représentant de l'union des industriels de la construction bois et biosourcés (UICB) y siège. "Nous avons notre place auprès de la FFB et de la Capeb." Aurait-il voté favorablement le projet d'avis sur la RE2020 passé devant le CSCEE le 26 janvier dernier ? Non, car le texte propose de réserver l'application de l'analyse du cycle de vie dynamique au label qui sortira dans la foulée de la RE2020. "C'est une méthode que l'on peut améliorer, certes, mais à notre sens elle représente la vraie avancée de la RE2020 par rapport à la RT2012", explique-t-il.

 

Les 10 engagements du "plan ambition bois"

 

Voici les dix engagements fixés par France bois foret, Fibois France et France bois industries entreprises :

 

1 - Former : "Nous nous engageons à accompagner, dans l'acte de construire, les opérateurs de la famille des bâtisseurs en lien avec les organismes de formation. Nous nous engageons également dans un effort de formation continue de nos professionnels, de l'amont à l'aval."

 

2 - Développer l'emploi : "Nous nous engageons, en augmentant nos capacités de production, à développer l'emploi et à produire de la valeur ajoutée."

 

3 - Mobiliser les volumes : "Nous nous engageons à favoriser les investissements liés au développement des usines de première et de deuxième transformation vers des produits mixtes, combinant le bois à d'autres matériaux, afin de répondre aux exigences du marché en termes de volume."

 

4 - Investir en recherche et développement : "Nous nous engageons vers un effort constant en matière de recherche et développement, allant de l'ingénierie à la conception de produits et systèmes constructifs novateurs, afin de favoriser l'essor des marchés de la construction bois et biosourcée."

 

5 - Développer l'offre en bois français : "Nous nous engageons à favoriser la construction de logements bas-carbone avec une priorité donnée au bois français."

 

6 - Soutenir l'économie des territoires : "Nous nous engageons à développer des acteurs industriels de référence et des capacités de transformation au cœur des territoires français."

 

7 - Favoriser la mixité des matériaux: "Nous nous engageons à relever le défi de l'accroissement de la mixité des matériaux auprès des entreprises de la construction, forts de tous les acquis des programmes démonstrateurs menés depuis plusieurs années."

 

8 - Planter et replanter : "Nous nous engageons à maintenir un effort constant afin de garantir le renouvellement de la forêt française."

 

9 - Réduire les coûts : "Nous nous engageons à maintenir un effort constant afin de massifier l'utilisation du bois et investir dans des outils de production pour diminuer les coûts."

 

10 - Recycler le bois en fin de vie : "Nous nous engageons à investir dans les usines biomasse et à optimiser l'utilisation des produits bois en fin de vie."

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