COPROPRIÉTÉS.A l'occasion des 10 ans de l'Autorité de la concurrence, le chef du Gouvernement Edouard Philippe a annoncé vouloir renforcer les sanctions à l'égard des syndics qui ne mettent pas en œuvre les règles de concurrence, que les professionnels du secteur estiment difficilement imposables. Réactions des principaux intéressés.

Dans un discours introductif à la célébration des 10 ans de l'Autorité de la concurrence, Edouard Philippe a tenté de trouver de nouvelles marges financières pour les ménages, à travers les "angles morts" du pouvoir d'achat. Une brèche dans laquelle se glisserait le secteur des syndics, ciblé ce mardi par le Premier ministre.

 

Ce dernier a ainsi fustigé le non-respect de certaines règles de concurrence, et la méconnaissance des copropriétaires quant à leurs droits. Il confirme notamment l'information du Parisien du 4 mars, faisant état d'un durcissement des sanctions à l'égard des syndics qui ne respectent pas les règles de mise en concurrence, rendues obligatoires par la loi Alur.

 

Edouard Philippe a ainsi rappelé la nécessité pour les assemblées générales de mettre leur syndic en concurrence tous les 2 ans. "Ce non-renouvellement est parfois un choix, et c'est très bien ainsi. Mais il peut-être aussi un non-choix parce que les copropriétaires ignorent leurs droits, et quand ils le savent, la comparaison des prestations est souvent si fastidieuse qu'elle devient décourageante", a-t-il déploré.

 

"Il faut prendre les copropriétaires comme des majeurs capables"

 

Un argument que réfutent les représentants de syndics de gestion que sont la Fnaim et l'Unis. "Ce que le Premier ministre oublie, c'est que l'on parle de 10 millions de logements, et d'une instabilité tous les 3 ans de celui qui incarne le pivot de la copropriété, au moment même où il nous est demandé de porter la rénovation énergétique des copropriétés", relève Jean-Marc Torrollion, président de la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim), interrogé par Batiactu. L'organisme conçoit néanmoins "d'améliorer la transparence et de simplifier la mise en concurrence".

 

Pour les professionnels, le non renouvellement systématique des syndics se traduirait donc moins par une méconnaissance des droits qu'une quête de continuité dans des copropriétés parfois amenées à suivre des travaux sur une période longue.

 

"Il faut prendre les copropriétaires comme des majeurs capables et non l'inverse, il n'y a aucun sens à cantonner le secteur à de la concurrence. On n'est pas sur de la maintenance automobile mais bien la gestion d'un patrimoine sur le temps long", confirme à Batiactu Géraud Delvolvé, délégué général de l'Union des syndicats de l'immobilier (Unis). La Fnaim de son côté propose d'étendre le délai de renouvellement à 5 ans, plus en phase avec les durées moyennes des travaux à l'échelle de la copropriété.

 

L'Unis et la Fnaim dénoncent "un procès en règle"
Au lendemain des annonces faites par le Premier ministre, les deux principaux organismes représentants les syndics immobiliers ont dénoncé dans un communiqué conjoint les nouvelles sanctions à venir. "Le comble est que cet arsenal a été voulu pour aller dans le sens des copropriétaires. C'est pourtant tout l'inverse qui va se produire.", prédisent-ils. Alors que des négociations sont en cours pour la réforme du droit de la copropriété, l'Unis et la Fnaim estiment que les avertissements ministériels "surviennent à contretemps" et relèvent "du mépris".

 

Imposer le contrat-type

 

Trois nouvelles mesures à l'encontre des syndics ont été déroulées par le Premier ministre qui souhaite d'abord "rendre effective la mise en concurrence à l'échange du contrat, en informant mieux les copropriétaires sur leurs possibilités et en facilitant la portabilité des contrats."

 

Concernant le contrat-type, rendu obligatoire par la loi Alur, Edouard Philippe a annoncé des "sanctions en cas de non-respect". Selon Le Parisien, ces amendes s'élèveraient à 3.000 euros pour les personnes physiques, et 15.000 euros pour les personnes morales. Dispositif né de la loi Alur, le contrat-type précise la rémunération forfaitaire des syndics sur des opérations de gestion de routine.

 

A l'issue d'une enquête menée en 2016, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avait constaté que "dans la majorité des cas, le contrat-type est bien mis en place par les professionnels mais n'est pas strictement respecté", relevant "41% de taux d'anomalies".

 

Contrat socle

 

Un chiffre mis en doute par Géraud Delvolvé, et qui traduit l'idée que "le Gouvernement reconnaît que ce contrat est inadapté, et mal ficelé, ce que nous avons toujours souligné". Il appelle à sanctionner en priorité "ceux qui conservent leur ancien contrat, et que l'Unis avait proposé de dénoncer à la DGCCRF". La Fnaim, elle, penche plutôt pour "un contrat socle" qui "offrirait des services identiques avec une tarification, tout en ouvrant la possibilité aux syndics de proposer des innovations dans les services comme une conciergerie ou du portage salarial", décrit Jean-Marc Torrolion.

 

Le Gouvernement souhaite également rendre "comparables" les prestations relatives à l'organisation des assemblées générales, et pourrait "maîtriser" d'autres procédures comme la production de l'état-daté, document d'information à destination de l'acquéreur quant aux futures charges qu'il aura à payer.

 

"Nous veillerons à rendre comparables certaines prestations comme les assemblées générales en imaginant un tableau synoptique de comparaisons tarifaires", concède le président de la Fnaim. Mais plutôt qu'un "encadrement" de l'état-daté, il préfère le cadre du Conseil national de la transaction et la gestion immobilière (CNTGI) afin de négocier des "accords avec les associations de consommateurs".

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