REPORTAGE. A Bagneux, ce 16 mars, de nombreux compagnons s'affairaient encore sur les emprises de la ligne 15 sud du Grand Paris Express, ou sur celles du prolongement de la ligne 4 du métro, en attendant un possible arrêt de l'activité.

Dans les rues de Bagneux, ils sont nombreux à aller et venir encore, ce 16 mars, malgré les recommandations déjà émises par le gouvernement. Plusieurs clients entrent dans une banque, se retrouvant en même temps dans le hall. Plus loin, deux femmes discutent, entourées de leurs jeunes enfants. D'autres passants patientent à l'arrêt de bus. Pour aller où ? Pour des déplacements nécessaires ? Qui sait ?

 

Malgré tout, le rythme de la ville a ralenti. Sans s'être arrêté pour autant. C'est encore plus vrai sur les nombreux chantiers, en cours dans cette commune à trois kilomètres à peine des portes de Paris. L'équipe d'un sous-traitant d'Enedis vient tout juste d'arriver, et "nous ne savons pas quoi faire…" Son chantier doit commencer ce jour et durer 4 ou 5 semaines. Sa feuille de route : dévoiement de réseaux dans la rue de Verdun, entre l'avenue Pasteur et l'école Joliot-Curie, et alimentation de la future station de métro Bagneux-Lucie Aubrac, sur la ligne 4, à quelques mètres de là. Mais la crise sanitaire pourrait très bientôt reporter les travaux.

 

"La mairie a annulé la pose du balisage sur la voirie. Nous avons commencé à préparer le chantier, pour savoir où nous irons au moment voulu, mais j'ai décommandé l'arrivée d'une mini-pelle sur site demain", explique l'un des responsables des travaux, clairement dans l'expectative. Le plus difficile, c'est d'exposer ses salariés au risque. Pas tellement sur le chantier, "car ils sont peu nombreux, 5 environ". Mais la plupart viennent en transports en commun.

 

Se préparer, pour ne pas être pris au dépourvu

 

Il attend des consignes de sa direction, qui elle-même attend de savoir ce que le gouvernement décidera. Son client, Enedis, ne se prononce pas, et ne vient plus sur les chantiers. "Nous ne pouvons pas partir de nous-mêmes, mais nous nous attendons à fermer. Nos fournisseurs commencent à baisser le rideau pour une durée indéterminée, notre tour est pour bientôt."

 

 

Sur d'autres chantiers en revanche, il a pris les devants, allant jusqu'à mobiliser plus de monde par endroit, afin de remblayer et de sécuriser les lieux lorsque les travaux étaient plus avancés. Il se prépare, pour ne pas être pris au dépourvu. Le président de la République doit s'exprimer à 20h, et le bruit court : il pourrait annoncer dès demain un confinement total, avec couvre-feu assuré par l'armée.

 

Pour l'instant, RAS

 

Sur la ligne 15 Sud du Grand Paris Express, la grue tourne, les pelles continuent de s'activer, les camions d'entrer et sortir. "Pour l'instant, rien n'a changé, nous explique un compagnon. On nous a juste demandé de garder nos distances, comme là [nous prenons garde en effet de maintenir au moins 1m entre nous], de nous laver les mains fréquemment et de faire attention. Mais nous n'avons pas de masques et pour le moment, personne n'est malade." Est-il inquiet d'un arrêt du chantier : "on verra bien !", se contente-t-il en s'éloignant.

 

Un autre s'approche. Il a entendu dire que les autorités, il évoque la préfecture, avaient demandé à faire un point sur la situation avec les responsables des chantiers. "Il y a de fortes chances pour qu'on arrête toutes les constructions sur le Grand Paris, croit-il savoir. Ce serait logique, sur le chantier de Bagneux, nous ne sommes pas loin de 100. Et on a interdit les rassemblements de 100 personnes." Mais pour le moment, les journées continuent à se passer normalement.

 

Le prolongement de la 4 déjà à l'arrêt ?

 

Sur le chantier du prolongement de la ligne 4 en revanche, les choses semblent s'accélérer. Certains compagnons nous confient terminer plus tôt ce jour, à 15h. Et ensuite : "c'est fermé pendant au moins trois semaines apparemment. Peut-être plus, on ne sait pas, ça dépendra de ce qui est annoncé ce soir". Sur place, les représentants de la RATP autorisés à s'exprimer étaient "absents", et l'information ne nous a donc pas été confirmée. Par ailleurs sollicité par voie électronique, le groupe n'a pas encore répondu à nos questions.

 

De son côté, la Société du Grand Paris n'a pas fait état de demande particulière émise de la part de la préfecture, et n'évoque pas d'arrêt pour le moment. Mais elle travaille à son organisation et à celle des entreprises de travaux. Le plan en cours de réflexion sera sans doute affiné après l'intervention du président de la République. Tout semble donc se jouer ce soir.

 

Les travaux de Notre-Dame stoppés

 

Le chantier de consolidation de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris, lancé après l'incendie d'avril 2019, a été mis en sommeil en raison de l'épidémie du nouveau coronavirus, a indiqué le 16 mars l'Établissement public, interrogé par l'AFP. Les installations de décontamination existantes ne permettent pas de garantir de manière suffisante la mise en œuvre des règles de sécurité sanitaires pour ceux travaillant sur ce chantier, a-t-on expliqué de même source. Il s'agit notamment des distances minimales de sécurité.

 

Aucune date n'a été annoncée pour la reprise des travaux, compte tenu des incertitudes sur l'évolution de la pandémie. Un système d'astreinte est cependant mis en place. Le chantier de consolidation devait s'achever à la fin du premier semestre, selon les plans initiaux. Et sa phase la plus délicate, le démontage de l'échafaudage qui enserrait la cathédrale avant l'incendie, devait commencer prochainement. Cette entreprise complexe devrait durer plusieurs mois. Les conditions météorologiques difficiles n'ont pas facilité la tâche des compagnons qui préparaient ce démontage ces dernières semaines. C'est notamment quand cet énorme échafaudage sera totalement retiré que la cathédrale pourra être déclarée hors danger.

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