ENTREPRISES. Les ministres de l'Économie, Bruno Le Maire, et des Entreprises, Olivia Grégoire, se sont vus remettre aujourd'hui un rapport parlementaire suggérant 14 propositions pour simplifier la vie des entreprises. Bien qu'il ne s'agisse que d'un "point de départ", ce document devrait influencer le futur projet de loi dédié.

Le futur projet de loi simplification commence à prendre forme. Bercy enchaîne les étapes préalables à l'écriture du texte législatif : après avoir collecté plus de 5.000 propositions à l'issue de la consultation publique organisée à ce sujet, le ministère a reçu aujourd'hui un rapport parlementaire suggérant une quinzaine de propositions pour simplifier la vie des entreprises.

 

 

Un document "remarquable qui va alimenter le projet de loi simplification", a affirmé le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, lors d'une conférence de presse. Saluant au passage la méthode, "celle de la consultation et du dialogue", et l'ambition, celle de "simplifier au maximum la vie quotidienne des entrepreneurs avec une attention particulière aux TPE, qui ne peuvent pas absorber le coût des normes et des règles", de ce travail réalisé par quatre députés et une sénatrice.

 

"Débureaucratiser" l'Europe

 

Le principal locataire de Bercy a par ailleurs posé un "diagnostic sévère" sur le contexte économique européen, en proie selon lui à des problèmes à la fois conjoncturels et structurels. La croissance en panne et la productivité en berne sur le Vieux Continent contribueraient, selon lui, à créer moins d'emplois et donc moins "d'opportunités" économiques.

 

"L'une des raisons à cela est l'excès de la norme", a développé Bruno Le Maire. "L'Europe doit être le continent de la croissance, de l'innovation et de l'emploi. L'excès de la norme nourrit les colères. Il en va donc de l'avenir du continent européen." Et de poser une ligne de conduite : "débureaucratiser la croissance européenne".

 

Tailler dans le "business" de la norme

 

Le numéro deux du Gouvernement veut agir vite car il estime que "la situation confine parfois à l'absurde". Son souhait est de "transformer un maquis en jardin, dans lequel on se retrouve, on taille (comprendre, les normes, NDLR), on soigne (les relations entreprises-administration), on développe (l'activité des professionnels)". Le "business" de la norme, considéré comme responsable d'une inflation inutile et dangereuse de coûts, se retrouve ainsi dans le collimateur des pouvoirs publics.

 

Quatre parlementaires sur les cinq qui ont rédigé le rapport - seule manquait le député Modem Philippe Bolo - étaient également présents pour commenter leur travail. Les députés Renaissance Louis Margueritte et Alexis Izard, la sénatrice RDPI (majorité présidentielle) Nadège Havet et la députée Horizons Anne-Cécile Violland ont ainsi listé 14 mesures visant à simplifier "drastiquement" la vie des entrepreneurs (voir encadré).

 


Les 14 mesures proposées par le rapport parlementaire sur la simplification administrative des entreprises

 

- Mettre fin à des redondances et formalités inutiles identifiées qui relèvent de différents Codes (du travail, de commerce, de l'énergie, etc.), tant au niveau législatif que réglementaire
- Lever les derniers verrous pour une véritable application du principe de "dites-le nous une fois pour toutes"
- Permettre aux entreprises de moins de cinq ans et de moins de 50 salariés de définir avec les salariés l'application de certaines dispositions des accords de branche
- Alléger les obligations des trois principaux seuils 11-50-250 en les relevant d'un niveau
- Aligner les droits bancaire et assurantiel des professionnels et des particuliers
- Privilégier les régimes de déclaration aux régimes d'autorisation
- Généraliser le principe de dématérialisation des démarches à destination des entreprises tout en remettant le contact humain au coeur de l'administration
- Restreindre le champ d'action de la CNDP (Commission nationale du débat public) et de la CCC (Commission de concertation du commerce)
- Proposer une visite de conformité et un rescrit pour faciliter l'accompagnement des entreprises
- Réduire les délais de contentieux, et notamment prud'hommaux
- Favoriser la coordination et l'acceptation des contrôles, revoir en particulier l'organisation des contrôles dans le domaine des établissements recevant du public (ERP)
- Dépénaliser les niveaux de sanctions en cas de manquement, de bonne foi, à des obligations déclaratives des dirigeants
- Astreindre toutes les administrations publiques à une contribution forfaitaire en cas de dépassement du délai de paiement
- Faciliter drastiquement l'accès à la commande publique pour les TPE et PME

 


Stabilité et cohérence

 

 

Ne plus avoir à fournir plusieurs fois le même document à l'administration, rehausser les seuils, améliorer les délais de paiement... Des propositions censées baliser le chemin du futur projet de loi. L'exécutif, pour sa part insiste malgré tout sur plusieurs points : "Un entrepreneur n'est pas un fraudeur en puissance", a souligné Bruno Le Maire.

 

Lequel a aussi mis en garde sur la contrainte des finances publiques, que le Gouvernement veut à tout prix redresser pour éviter une perte d'attractivité financière de la France. "Il faut faire une révolution économique nationale et européenne. Le législateur doit se mettre à la place de l'entrepreneur", a-t-il insisté.

 

Tandis que Louis Margueritte rappelait que "ce rapport est un point de départ", son collègue Alexis Izard a reconnu que certains sujets étaient particulièrement attendus par les entreprises. "Il faut continuer à travailler sur le test PME", en référence à ce dispositif permettant d'évaluer les conséquences des nouvelles réglementations sur l'activité des entreprises.

 

"Supprimer n'est pas toujours simplifier", a-t-il également prévenu. "Les entreprises demandent surtout de la stabilité dans la norme, notre rôle est donc d'assurer de la cohérence. Il y a une méthode parlementaire à mettre en place en rationalisant la loi, peut-être en étudiant la possibilité de supprimer des lois au lieu d'en créer."

 

Le test PME bien parti

 

Un point de vue partagé par Olivia Grégoire, la ministre des Entreprises. "La complexité administrative est l'une des maladies des économies modernes. Les tout petits entrepreneurs sont la richesse de notre pays et étouffent aujourd'hui sous les normes et l'absurdité."

 

Sur le principe, les professionnels, eux, accueillent évidemment cette initiative avec satisfaction. Mais s'interrogent aussi sur ce qui en ressortira véritablement, l'État n'en étant pas à sa première promesse d'un "choc de simplification" qui, généralement, ne se concrétise pas vraiment.

 

Les normes actuelles et futures devraient en tout cas être passées à la loupe de l'administration, et le test PME est bien parti pour figurer dans le futur texte législatif. "J'appelle de mes vœux un énorme travail structurel pour mettre en œuvre un dispositif permettant de tester les lois, afin que leur impact concret sur les TPE soit chiffré et détaillé. C'est un enjeu d'équité économique, car tous les entrepreneurs ne sont pas égaux devant la norme", a confirmé Olivia Grégoire.

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