EDF revoit à la hausse les coûts et le calendrier du projet des réacteurs EPR en Grande-Bretagne, après avoir entériné la décision d'investir plus de 20 milliards d'euros en septembre 2016. Le taux de rentabilité diminue à vue d'œil, ce qui inquiète le ministère de l'Economie et des Finances qui demande au p-dg d'EDF de mieux maîtriser les coûts.

Et si le directeur financier Thomas Piquemal et l'administrateur Gérard Magnin, démissionnaires en 2016, avaient eu raison ? L'aventure "Hinkley Point C" d'EDF semble mal engagée pour l'électricien français qui vient de revoir sa copie avec des délais et des coûts en hausse. Alors que l'investissement était initialement estimé à 20,6 Mrds €, il se monterait désormais à 22,3 Mrds €, soit une hausse de 1,7 Mrd € conséquence "d'une meilleure appréhension du design, adapté aux demandes des régulateurs, du volume et du séquencement des travaux sur site et de la mise en place progressive des contrats fournisseurs" assure le groupe français.

 

Et ce n'est pas tout. Selon ses propres mots, "le risque de report de la livraison est estimé à 15 mois pour la tranche 1 et à 9 mois pour la tranche 2". Des retards qui induiraient également des coûts supplémentaires, de l'ordre de 800 M€, faisant potentiellement grimper la facture globale à plus de 23 Mrds €. Des hypothèses qui diminuent le taux de rentabilité prévisionnel pour EDF et le ramènent de 9 % à 8,2 % environ. Pour l'heure, le jalon du premier béton de sûreté nucléaire du bâtiment de la première tranche est prévu à la mi-2019, à condition toutefois que le design définitif, "dont le calendrier est tendu", avertit déjà le groupe, soit bien arrêté à la fin de 2018…

 

Le ministère de l'Economie exige de la rigueur

 

Autant d'indices de dérives et de surcoûts - avant même que le chantier n'entre en phase de réalisation - qui inquiètent le gouvernement, échaudé par les avatars de l'EPR Flamanville 3. Bruno Le Maire, ministre de l'Economie et des Finances a donc demandé à Jean-Bernard Levy, président-directeur général d'EDF d'entreprendre "un plan d'action rigoureux pour la maîtrise du projet Hinkley Point C avant fin juillet". Il suggère également que les causes précises de cette réévaluation, les facteurs de risques et le contenu de la revue du projet soient partagés et analysés au sein du conseil d'administration de l'entreprise qui devra assurer "un suivi détaillé (…) à un rythme régulier". Le communiqué du ministère assure que "l'Etat veillera à ce que ce plan d'action permette de conforter le calendrier du projet tel qu'il a été convenu avec les autorités britanniques" et "de réduire autant que possible l'impact financier de cette réévaluation".

 

 

De son côté, EDF reste impassible : l'électricien déclare que son management reste mobilisé sur l'objectif initial de livraison de la première tranche en 2025, tout en maintenant ses objectifs financiers pour les deux années qui viennent. Rappelons qu'en France, la facture de l'EPR a été multipliée par 3,5 entre les estimations initiales et le montant actuel, tandis qu'en Finlande, celle du réacteur Olkiluoto 3 a été multipliée par 2,3. Le risque Hinkley Point C est donc réel pour le groupe français.

 

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