REACTIONS. A la suite de la multiplication de cas d'arnaques aux Certificats d'économies d'énergie (CEE), certains acteurs en appellent à une évolution du dispositif, qui n'irait pas, dans l'état actuel des choses, dans l'intérêt des consommateurs.

Ces dernières années, les cas de fraudes employant les Certificats d'économies d'énergie (CEE) sont en fort développement. "Dans tous les systèmes où l'on met de l'argent à disposition, il est malheureusement normal que des acteurs apparaissent pour contourner les règles, on l'a vu par exemple avec le photovoltaïque", réagit auprès de Batiactu un porte-parole d'Effy, société spécialisée dans l'accompagnement aux travaux d'économies d'énergie. "Nous avions alerté en 2014, quand le dispositif des CEE est passé au mode déclaratif. Nous disions qu'il fallait que les pouvoirs publics mettent en face des moyens de contrôles suffisants. Force est de constater que cela n'a pas été le cas. Pour autant, rappelons que le sujet de la fraude reste un peu marginal, de l'ordre de quelques pourcents."

 

Le Pôle national des CEE (PNCEE), censé contrôler les dossiers, précise pour sa part à Batiactu , le 28 novembre 2017, avoir "bien conscience que quelques acteurs peu scrupuleux fraudent", mais assure agir "en conséquence et en collaboration avec d'autres services (financiers et judiciaires) pour contrôler les dossiers". "En cas de fraude avérée, le PNCEE transmet des signalements au Parquet", ajoute une porte-parole du ministère de la Transition écologique et solidaire. Reste que les acteurs sont aux aguets : sur le site du Pacte énergie solidarité, offre d'Effy pour une rénovation des combles à un euro, un avertissement coiffe la page d'accueil : "Des sociétés frauduleuses usurpent l'identité du Pacte énergie solidarité, des départements et des régions françaises pour vous proposer des travaux de rénovations énergétiques à partir de 1€. Refusez tout démarchage téléphonique et soyez vigilant sur Internet !"

 

Des changements réglementaires à prévoir dans les exigences de qualifications

 

En septembre 2017, le groupe Effy demandait aux pouvoirs publics, dans un communiqué de presse, la "généralisation d'un contrôle régulier obligatoire pour toutes les entreprises qui proposent des offres d'isolation pour un euro grâce aux CEE". "Il faudrait également resserrer la maille du label Reconnu garant de l'environnement (RGE)", nous explique Effy. "Pour notre part, nous avons instauré une procédure de suivi pour éviter que des abus aient lieu. La société Dekra intervient a posteriori, de manière aléatoire, pour vérfiier que les travaux ont été bien faits." Le groupe nous informe également que des changements réglementaires sont en cours de discussions pour monter en exigence au niveau de certains contrôles de qualification.

 

"Les CEE sont un système très complexe, donc qui prête le flanc aux fraudes", affirme pour sa part Joël Vormus, directeur du Cler, réseau pour la transition énergétique, auprès de Batiactu. "Ce système a le mérite d'avoir fait émerger une nouvelle manière de financer des travaux de rénovation. Mais, au vu des moyens de surveillance de marché mis en place, il est dangereux de laisser ce système fonctionner tel quel à moyen et long terme. Car les CEE s'appuient sur une flore d'acteurs qui n'est pas extrêmement saine. La question qu'il faudrait se poser, aujourd'hui, est : est-ce vraiment le bon système ?"

 

"25% des CEE précarité concernent des Led"

 

D'après le Cler, l'un des soucis est que les CEE ne sont pas forcément pensés pour répondre aux problématiques des particuliers. "Quand vous rénovez vos combles pour un euro seulement, vous n'êtes pas forcément très regardant sur la qualité des travaux. Et s'ils sont mal faits, cela peut entraîner un sinitre. Par ailleurs, je rappelle que 25% des CEE pour précarité énergétique concernent des Led. Est-ce vraiment la priorité ?" Comme solution de court terme, le Cler envisage le recours à la dématérialisation des dossiers, ce qui permettrait, par l'emploi d'un algorithme, de repérer les anomalies. "A plus long terme, nous proposons la création d'une agence de financement spécialisée", explique Joël Vormus. "Nous devons inventer un procédé qui sera moins suceptible d'être détourné." D'autant que, comme le rappelle, le Cler, ce sont les ménages modestes qui pâtissent le plus des arnaques.

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