ANALYSE. L'Urssaf, qui vient de compiler ses données pour l'exercice 2021, indique que 4,1 millions de comptes de travailleurs indépendants étaient ouverts à la fin de l'année dernière. La crise sanitaire n'a aucunement freiné la croissance des entrepreneurs, indépendants du régime classique comme auto-entrepreneurs, dont 1 sur 10 travaille dans la construction.

En dépit des crises et des incertitudes, les Français sont toujours plus nombreux à se lancer dans l'aventure entrepreneuriale. L'Urssaf (Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale), qui vient de compiler ses données sur le sujet pour l'exercice 2021, indique que 4,1 millions de comptes de travailleurs indépendants étaient ouverts l'année dernière. La pandémie n'a aucunement freiné la croissance des entrepreneurs : après avoir enregistré +8,1% en 2020, celle-ci a encore grimpé de 8,6% en 2021.

 

 

Pour rappel, les travailleurs indépendants (TI) regroupent deux catégories distinctes : les indépendants du régime classique et les auto-entrepreneurs (AE).

 

Les AE tirent l'essentiel de cette progression, avec +17,6% en 2020 puis +15,3% en 2021, tandis que le statut de TI classique n'a que très timidement augmenté de 1,6%. Désormais, les AE représentent 54,2% du total des indépendants. La proportion des AE ayant déclaré un chiffre d'affaires positif - "économiquement actifs" dans le jargon de l'Urssaf - s'élève à 70,9% en 2021, soit 1,5 point supplémentaire par rapport à 2020, mais en retrait du niveau de 2019 (72,4%).

 

La hausse des TI concerne la quasi-totalité des secteurs d'activité. Le bâtiment et les travaux publics sont largement représentés parmi les TI, avec 449.600 comptes ouverts, soit quasiment 11% des inscrits. La construction s'octroie une part de 11,6% dans le total des indépendants classiques et de 10,4% chez les auto-entrepreneurs. Dans le détail, les indépendants du gros-oeuvre pèsent 3,5% des inscrits (144.700 professionnels, +6,2% en 2021), ceux des travaux d'installation 3% (124.100, +7,1%) et ceux des travaux de finition 4,4% (180.700, +4,8%).

 

Plus d'indépendants classiques dans le gros-oeuvre, les auto-entrepreneurs majoritaires dans les travaux de finition

 

Dans son rapport, l'Urssaf note une hausse des TI classiques dans les travaux de finition en 2021, "alors qu'ils étaient orientés à la baisse l'année précédente". Les AE demeurent malgré cela majoritaires sur ce segment d'activité : ils représentent 57,1% des indépendants et 80% d'entre eux ont déclaré un chiffre d'affaires l'année dernière.

 

"En revanche, les TI des secteurs de travaux d'installation et de travaux de gros-oeuvre sont encore majoritairement des TI classiques (respectivement 51,7% et 52,9%) mais leur part continue de diminuer", peut-on encore lire. Fait notable : la part d'auto-entrepreneurs "polyactifs", autrement dit qui assument plusieurs emplois en même temps, est de 8% dans les travaux de finition.

 

Sur les 706.000 indépendants employant des salariés tous secteurs confondus (17,2% du total national), 6,2% d'entre eux exercent dans le gros-oeuvre (contre 2,8% de ceux qui n'ont pas de salarié), 5,3% dans les travaux de finition (contre 3,4%) et 4,2% dans les travaux d'installation (contre 2,9%). D'une manière générale, l'administration relève que 36,4% des TI classiques emploient des salariés, contre seulement 0,9% des AE. Dans le BTP, quasiment la moitié des TI sont des employeurs.

 

Les auto-entrepreneurs portés par la reprise d'activité

 

Sur le plan des rémunérations, des disparités plus ou moins flagrantes apparaissent. Tous secteurs confondus, les TI classiques affichent un revenu moyen de 35.373 € pour les femmes, une somme 20% plus faible que celle des hommes (44.695 €). Les hommes avaient cependant vu leurs revenus davantage baisser que les femmes en 2020, année de la crise sanitaire (-3,6% contre -2,2%).

 

Une différence qui s'explique pour partie "par un effet de structure sectorielle : les femmes investissent davantage les secteurs de la santé et du soin à la personne, tandis que les hommes sont très présents dans le commerce, les taxis ou encore le BTP, secteurs plus fortement touchés par les restrictions durant la pandémie". Pour rappel, la part de femmes travaillant dans le secteur de la construction est d'environ 12%.

 

 

L'Urssaf précise les revenus moyens des indépendants classiques et des auto-entrepreneurs économiquement actifs arrêtés à 2020 pour les premiers, à 2021 pour les seconds. Des chiffres qui témoignent d'une baisse des revenus pour les indépendants classiques, mais qui correspondent aussi à une chute d'activité pendant la période des confinements et restrictions sanitaires. A contrario, l'activité a été bien plus porteuse - et rémunératrice - pour les auto-entrepreneurs en 2021, grâce aux nombreux chantiers de rénovation entrepris par les particuliers dans leurs logements après la crise.

 

Progression importante des revenus dans l'Ouest et en Outre-mer

 

Les indépendants classiques travaillant dans le gros-oeuvre ont donc gagné en moyenne 30.279 € en 2020, en baisse de 3,5% sur un an. Ceux réalisant des travaux d'installation ont touché 30.975 € (-3,4%), quand ceux effectuant des travaux de finition n'ont engrangé que 27.856 € (-5,2%).

 

Du côté des AE, ceux du gros-oeuvre ont enregistré un revenu moyen de 9.638 € en 2021, ce qui représente un bond de 10,6% en un an. Ceux évoluant dans les travaux d'installation et les travaux de finition ont respectivement touché 10.433 € et 9.922 €, en forte hausse là encore de 11% et de 13,9%. Le BTP est d'ailleurs l'un des rares secteurs d'activité où les rémunérations des AE n'ont pas reculé.

 

Les différences sont en outre géographiques : le niveau moyen de revenus des AE est supérieur au niveau moyen national (6.254 €) en Île-de-France, Bretagne, Pays de la Loire, Nouvelle-Aquitaine, Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur. "En effet, dans ces régions, quelques secteurs à revenu plus élevé sont plus fortement représentés tels que le conseil pour les affaires ou le BTP en Île-de-France", explique l'Urssaf.

 

Le revenu moyen le plus important (7.595 €) est localisé à La Réunion. "Dans cette région, la quasi-totalité des secteurs ont un revenu moyen supérieur à la moyenne nationale. C'est le cas notamment du BTP et de l'enseignement, secteur davantage représenté (plus de 8% des AE économiquement actifs contre 5,5% dans la France entière)", complète le rapport. C'est en Auvergne et en Limousin que les montants moyens sont en revanche les plus faibles, sous les 5.700 €.

 

L'année dernière s'est néanmoins traduite par une hausse des revenus moyens des AE dans l'ensemble des régions, avec en moyenne +13,4% au niveau national. Les progressions les plus importantes se situent dans l'Ouest et surtout dans les collectivités ultramarines, où elles dépassent les 20%. Le nord de l'Hexagone est par contre moins dynamique : les augmentations de revenus y sont inférieures à la moyenne nationale, comme en Champagne-Ardenne (+9,9%).

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