RÉACTIONS. Le projet de loi "Energie" devait être présenté ce 11 mars 2019 en Conseil des ministres. Mais le Gouvernement a décidé de retravailler le texte, qui ne satisfaisait pas les acteurs. Détails.

Le projet de loi "Energie", qui avait notamment pour objet de supprimer l'objectif de division par quatre des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 ("facteur 4") et de le remplacer par l'atteinte de la neutralité carbone à l'horizon 2050, devait être présenté ce lundi 11 mars 2019 en Conseil des ministres. Mais il n'en sera rien, car, d'après une information parue d'abord dans Le Parisien, Emmanuel Macron souhaite le renforcer. "La nouvelle version pourrait finalement être présentée en juin prochain, après un passage au Conseil d'État", explique à Batiactu Marina Offel de Villaucourt, porte-parole de GéoPLC, société spécialisée dans la rénovation énergétique par les certificats d'économie d'énergie (CEE).

 

Aller plus loin en matière de neutralité carbone

 

Pour rappel, les dispositions initiales avaient fait l'objet de critiques, la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) ayant même déçu par le Conseil économique, social et environnemental (Cese).

 

 

Dans la prochaine version du projet de loi, l'objectif de baisse de 17% de la consommation d'énergie finale à l'horizon 2030 devrait être réévalué à 20% - "ce qui correspond de toute façon à un engagement européen", précise Marina Offel de Villaucourt. Il est également question d'aller plus loin en matière de neutralité carbone d'ici à 2050.

 

"Il faut que toutes les filières soient contributrices de cet effort", B. Aulagne (Coénove)
Contacté par Batiactu, Bernard Aulagne, président de Coénove nous fournit son analyse sur ce report de la loi "Energie". "Si ce report traduit bien une volonté du Gouvernement de rehausser l'ambition du texte, en revenant notamment sur l'objectif initial de réduction de 20% des consommations d'énergie finale (17% dans l'actuel projet) et en allant vers la définition de la neutralité carbone, alors Coénove salue l'initiative. En effet, afficher une baisse de l'ambition non seulement peu compréhensible mais avant tout pas en phase avec la trajectoire souhaitée de neutralité en 2050 qui nécessite de maintenir, voire d'accentuer les efforts dès maintenant.

 

Il faut par contre bien que toutes les filières soient contributrices de cet effort, ce n'est pas parce qu'une énergie est peu ou pas carbonée qu'elle ne doit pas faire l'objet de réduction de consommation et donc d'effort d'efficacité énergétique : c'est ensemble que nous gagnerons la bataille du climat. Enfin, concernant l'objectif de réduction des fossiles à 40%, pourquoi ne pas moduler les contributions en fonction du contenu carbone de chaque énergie afin de cibler les efforts vers les actions les plus efficaces ?"

 

"Le gouvernement a maintenant l'obligation d'annoncer, au terme du grand débat, de grandes mesures pour accélérer [...] la rénovation énergétique des bâtiments"

 

D'après Jean-Baptiste Lebrun, directeur du Cler, réseau pour la transition énergétique, il est également question de réintroduire le "facteur 4" : "On reprécise ainsi un objectif chiffré en termes d'émissions de gaz à effet de serre", explique-t-il à Batiactu. Le député non inscrit Matthieu Orphelin, sur son blog, affirme pour sa part qu'il s'agira de passer d'un facteur 4 à un facteur 6. "Pour rendre crédible l'atteinte de ces objectifs, le gouvernement a maintenant l'obligation d'annoncer, au terme du grand débat, de grandes mesures pour accélérer le basculement vers les mobilités propres, la rénovation énergétique des bâtiments, ou encore la consommation durable", observe-t-il aussi.

 

Les acteurs pourront formuler leurs propositions

 

Ce pas en avant resterait donc, de l'avis des promoteurs de la transition énergétique, un "petit pas" si aucune annonce d'importance n'est faite dans les semaines à venir. "C'est une bonne chose de ne pas diminuer les exigences, mais encore faudra-t-il mettre les moyens en face ; sinon, le Gouvernement devra assumer le fait que ces objectifs ne sont que cosmétiques", avertit ainsi Jean-Baptiste Lebrun (Cler). "Ce débat-là sera-t-il rouvert, les politiques seront-ils à l'écoute des propositions des acteurs ?" Les défenseurs de la rénovation énergétique n'auront aucun mal à formuler des propositions, puisqu'ils ont déjà eu l'occasion de les présenter à plusieurs reprises depuis 2017, par exemple lors de la concertation sur le plan de rénovation énergétique des bâtiments.

 

Pour GeoPLC, également, le projet de loi tel qu'il existe reste flou sur les moyens. Et plane toujours la menace d'un rallongement de la quatrième période des certificats d'économie d'énergie, demandée récemment par les énergéticiens.

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