CRISE SANITAIRE. Contactées par Batiactu, les organisations professionnelles du BTP n'envisagent pas un arrêt complet de l'activité, même provisoire, durant cette nouvelle phase de confinement. Le secteur compte pour cela sur une mobilisation forte et immédiate de l'ensemble de la chaîne de la construction, pour éviter de connaître à nouveau certains blocages observés au printemps.

La nouvelle phase de confinement, annoncée par Emmanuel Macron ce 28 octobre 2020, entraînera-t-elle un arrêt quasi-total de l'activité économique ? Cette fois, le secteur du BTP ne veut pas s'y résoudre. "Le bâtiment est prêt à travailler", assurait à Batiactu Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment (FFB), ce même jour. "Mais ce que nous demandons, c'est que toute la filière réponde présente", de l'industriel, jusqu'aux maîtres d'ouvrage, en passant par les réseaux de distribution, la maîtrise d'œuvre, les coordonnateurs SPS...

 

Ne pas affoler les Français

 

Les professionnels de la construction espèrent aussi que les déplacements d'un chantier à l'autre seront autorisés, et que le Gouvernement saura faire preuve de pédagogie pour ne pas affoler les gens. "Les maîtres d'ouvrage particuliers sont en mesure d'arrêter ou décaler les chantiers, de refuser que des artisans viennent chez eux", rappelle Olivier Salleron. "Quid de l'application du plan de relance, notamment en matière de rénovation énergétique, si la demande n'est pas au rendez-vous ?" La FFB assure que les entreprises du secteur ont fait la preuve, ces derniers mois, qu'il était possible de travailler sans créer de cluster, en suivant scrupuleusement les préconisations du guide de l'OPPBTP, "bien compris et respecté". "Nous ne voulons pas d'un arrêt des chantiers comme nous avons connu en mars 2020 : les maîtres d'ouvrage publics, notamment, doivent être en mesure de maintenir les chantiers ouverts. Quant aux clients particuliers, il faut leur rappeler que nous avons tout ce qu'il faut pour travailler chez eux en toute sécurité, au besoin en réalisant des tests, par exemple salivaires quand cela sera possible." Le secteur a bon espoir que les pouvoirs publics maintiennent l'activité du BTP, du fait de sa place dans l'économie française.

 

 

Dès le 27 octobre, la fédération régionale des travaux publics (FRTP) d'Ile-de-France mettait toutefois en garde contre les conséquences potentielles d'une option stricte sur la santé de ses entreprises. "Cette initiative de la FRTP répond à la très forte inquiétude qui s'expriment dans les PME franciliennes", expliquait à Batiactu Corine Le Sciellour, directrice générale déléguée de la FNTP, qui n'espérait pas que seront annoncées des mesures qui mettraient en péril l'activité économique.

 


Le négoce a bon espoir de pouvoir continuer de travailler à 100%

 

Contactée ce 28 octobre par Batiactu, la Fédération du négoce bois et matériaux (FNBM) a bon espoir de pouvoir continuer son activité à 100%, y compris en cas de reconfinement. "Depuis lundi, nous sommes à pied d'œuvre sur le sujet, en échange avec le Gouvernement, pour que la dérogation pour nos métiers soit mise en place comme elle l'avait été en mars dernier", nous explique Laurent Martin Saint-Léon, délégué général. "Un décret est en cours de préparation par Bercy, et nous avons bon espoir que le négoce de matériaux soit inclus dans la liste des secteurs 'protégés'." La FNBM rappelle que si l'État veut assurer le succès du plan de relance en matière de rénovation énergétique, il a tout intérêt à maintenir l'activité du bâtiment. Et insiste sur le fait que les entreprises ne sont plus du tout dans la même configuration qu'en mars dernier. "Aujourd'hui, nous disposons des EPI, et c'est d'ailleurs ce que nous rappelons à nos adhérents : faire le point sur leurs stocks, et adapter les conditions sanitaires de travail de manière à pouvoir continuer à travailler à 100%, maintenir les points de vente ouverts, la qualité des conditions d'accueil..." Si ce sont les préfets qui sont en charge de vérifier que les salariés qui travaillent sont bien ceux qui y sont autorisés, la FNBM espère que ceux-ci - ou d'autres - disposeront de directives claires, sans ambiguïté.

 

"La chaîne doit absolument tenir"

 

"L'enjeu pour nous est que la situation ne se bloque pas davantage, que nos entreprises aient l'autorisation de travailler", poursuit-elle. Si la question des équipements de protection individuelle, des masques et des protocoles sanitaires, "reconnus pour leur efficacité" n'est plus un sujet de préoccupation, elle craint que d'autres points de blocage observés lors du premier confinement ne bloquent à nouveau.

 

 

"Nos entreprises n'avaient plus d'interlocuteurs chez leurs clients. Toute la chaîne d'approvisionnement était fermée. Si un coordonnateur SPS ou un contrôleur de travaux est confiné, le chantier sera arrêté. C'est cela qui nous inquiète, car une entreprise ne gère pas seule un chantier de façon autonome. C'est une chaîne qui, cette fois, doit absolument tenir".

 

Rôle primordial de la puissance publique dans le maintien de l'activité

 

Autre enjeu : ne pas décaler le plan de relance, et commencer à le concrétiser rapidement. Alors que les appels d'offres sont toujours en recul de 35%, comme l'indiquait il y a quelques jours le président de la FNTP, Bruno Cavagné, le choc de commande publique tant espéré est un sujet encore plus important à l'aube d'un potentiel deuxième confinement, complète Corine Le Sciellour.

 

"La consommation des ménages ne tirera pas l'activité pendant cette période, donc qui peut le faire à part la puissance publique ? Les collectivités locales doivent avoir conscience qu'elles peuvent être un acteur très fort et très direct du maintien d'une activité économique, grâce aux commandes qu'elle passera, et notamment aux entreprises de travaux publics."

 

Les entreprises de BTP sont donc prêtes à continuer le travail pendant la période incertaine qui s'annonce. Mais à la condition que l'ensemble des acteurs de la construction se mobilise.

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