ELECTRICITE. L'autoconsommation a le vent en poupe en France. Selon le cabinet de conseil Sia Partners et le syndicat professionnel Enerplan, les installations domestiques permettent de faire des économies substantielles sur la facture énergétique et présentent un retour sur investissement supérieur à 100 % sur l'ensemble de leur durée de vie. Explications.

Le nombre de raccordements pour des installations domestiques de faible puissance (moins de 10 kWc) est en baisse constante depuis 2011. Mais avec la loi de Transition énergétique pour la croissance verte de 2015, l'autoconsommation des particuliers devrait inverser la tendance. De telles installations, qui permettent aux ménages de consommer l'électricité qu'ils produisent avec leurs propres panneaux solaires et de réinjecter le surplus non consommé dans le réseau de distribution, représentent actuellement 40 % des demandes de raccordement, soit 14.000 dossiers en 2017 !

 

 

Sia Partners et Enerplan se sont penchés sur la question et publient la dernière étude EnergyLab qui décrypte l'impact de l'autoconsommation domestique sur le développement de la filière photovoltaïque française. Mais le document présente surtout des projections de rentabilité pour un foyer faisant, dès à présent, le choix de se doter d'un tel dispositif énergétique. Et les résultats sont éclairants : selon les auteurs de l'étude, l'autoconsommation domestique permet de réduire la facture d'électricité de plus de 19 % en moyenne. Des économies qui ramènent le temps de retour sur investissement de l'installation à seulement 13 ans, après quoi la centrale photovoltaïque ne produit plus que des bénéfices, sachant que les panneaux solaires présentent une durée de vie estimée à 20 ans, au minimum.

 

Taille de l'installation, localisation du site, technologie choisie…

 

Divers facteurs devraient influer sur ces chiffres. D'un côté, le coût de production de l'électricité solaire est en baisse constante. Comme le rappellent les auteurs, "l'investissement initial varie selon la technologie choisie et la taille de l'installation". En moyenne, la moitié des dépenses sont liées à l'achat de matériel. Pour l'heure, le marché est dominé par les technologies du silicium (mono et poly-cristallin) en raison de leur prix au plus bas et de leur bonne efficacité. Les cellules de deuxième génération, dites à couche mince, présentent pour leur part un prix au watt encore moins élevé, "mais leur efficacité n'est pas satisfaisante". Quant aux cellules de 3e génération (à concentration, organique ou à pigment photosensible) elles devraient atteindre des coûts extrêmement bas, grâce aux matériaux utilisés, plus abondants, et aux procédés de fabrication plus simples. Pour l'heure, la limite de ces technologies demeure la performance intrinsèque. L'étude anticipe toutefois que les coûts pour un système photovoltaïque devraient encore baisser d'ici à 2030 de -25 à -30 %.

 

D'un autre côté, le prix de l'électricité devrait continuer à augmenter sur le marché. Sa progression, sur les dix dernières années a été de +3,3 % par an pour atteindre les 15,5 centimes d'euro le kilowattheure. D'après les estimations des spécialistes, cette hausse se poursuivra sur un rythme moyen compris entre +2,5 et +5 % par an, ce qui pourrait amener à doubler le prix du kWh dès 2030. L'étude rappelle d'ailleurs que le tiers de cette augmentation sera lié… à l'évolution de la Contribution au Service Public de l'Electricité (CSPE) dont 35 % sont dus au soutien de la filière photovoltaïque. Quoi qu'il en soit, la parité réseau - ce moment où le coût de production de l'énergie solaire est égal (ou inférieur) au prix de l'électricité sur le marché, devrait être atteinte prochainement. Les deux courbes, celle qui monte (prix d'achat) et celle qui décroît (coût de production), devraient se croiser dès 2020 pour certaines régions du sud de la France, où l'ensoleillement est plus constant.

 

Les services de pilotage, la martingale de la filière

 

 

Avec l'arrêté tarifaire du 10 mai 2017, le tarif d'achat pour les centrales de petites dimensions oscille entre 15,71 et 18,48 c€/kWh (+3 c€/kWh en cas d'intégration au bâti) selon la taille de l'installation (moins de 9 kWc et moins de 3 kWc). L'autoconsommation bénéficie d'une prime d'investissement de 290 à 390 €/kWc durant 5 ans et d'un surplus de tarif d'achat de +10 c€/kWh. Comme le notent Sia Partners et Enerplan : "L'autoconsommation avec injection du surplus amène des économies pour le consommacteur mais entraîne des difficultés pour équilibrer le réseau et induit des coûts pour le distributeur national". L'autre mécanisme d'autoconsommation dite "totale" sans injection sur le réseau, sollicite moins le réseau d'électricité (seulement pour des soutirages d'appoint) mais il entraîne à l'inverse une perte du surplus produit. A moins que le particulier ne se dote également d'un système de stockage par batteries, encore onéreux.

 

L'étude souligne que, malgré l'attention portée aux plus grandes centrales photovoltaïques, les acteurs de la filière pourraient trouver dans l'autoconsommation domestique un relai de croissance important. Plus les entreprises et sociétés sont situées en aval de la chaîne de valeur (au plus près du consommateur), plus l'impact sera grand. Pour Sia Partners et Enerplan, c'est le maillon des services liés au suivi, au pilotage et à l'optimisation de la consommation qui connaîtra la plus forte croissance avec pour but ultime d'améliorer le taux d'autoconsommation. "Auparavant, seul l'entretien de l'installation suffisait", font-ils valoir. Des activités qui pourraient générer plus des deux tiers du chiffre d'affaires de tout le secteur (soit plus d'un milliard d'euros). Les auteurs annoncent : "Afin de répondre à une nouvelle demande, l'ensemble de la filière photovoltaïque française doit étendre son offre de prestations. Ce positionnement concerne un grand nombre d'énergéticiens, de gestionnaires de réseau mais également d'entreprises spécialisées pouvant adapter leur domaine d'expertise". Ils estiment qu'à l'horizon de 2023, entre 30 et 60 % des capacités cumulées du solaire pourraient concerner des raccordements en autoconsommation. D'ici là, le parc français devra passer d'un peu plus de 6 GW à 19 GW de puissance.

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