CONJONCTURE. Ma prime rénov', confinements et déconfinements sanitaires, crise économique, Plan de relance, Réglementation environnementale 2020... L'année qui s'achève fut pour le moins riche d'actualités pour la filière bois, qui dresse en ce début décembre un point d'étape sur la conjoncture à laquelle sont confrontés ses professionnels.

Si l'année 2020 a été particulièrement riche d'actualités pour les professionnels du bois, l'année 2021 ne manquera pas d'enjeux et d'opportunités pour cette filière sur laquelle se sont braqués les projecteurs de la Réglementation environnementale 2020, dont les derniers arbitrages ont été présentés fin novembre par le Gouvernement. L'organisation Propellet, qui représente les entreprises du chauffage au granulé de bois, dresse dans un communiqué un point d'étape sur la conjoncture passée et future à laquelle sont confrontés ses adhérents, et le verdict oscille entre satisfaction et (légère) inquiétude. Sur le lancement de Ma prime rénov' tout d'abord, la filière s'est réjouie de la nouvelle mouture de l'aide, estimant que les dossiers déposés sont au rendez-vous et que 150.000 chaudières au fioul ont déjà été remplacées sur les 9 premiers mois de 2020, avec des ventes de chaudières aux granulés en hausse.

 

 

Les ventes de chaudières aux granulés ont bondi de plus de 40% sur les 6 premiers mois de l'année

 

À l'image de presque toute l'économie française, les premières difficultés ont toutefois commencé à apparaître au printemps, lors du premier confinement sanitaire, qui a vu la filière des pellets être mise à l'arrêt, exception faite des distributeurs de granulés qui ont pu poursuivre leur activité. Le déconfinement a ensuite été marqué, de mai jusqu'à octobre, par une forte augmentation des ventes de chaudières au bois, un phénomène porté par "une conjonction de facteurs très favorables" d'après Propellet, qui met en avant la volonté des ménages de mieux consommer une énergie naturelle et locale tout en améliorant leur habitat, le tout sur fond d'accès aux nouvelles aides publiques. Au final, les ventes de chaudières aux granulés ont bondi de plus de 40% sur les 6 premiers mois de l'année. La tendance se tasse cependant un peu sur le 3e trimestre, avec seulement +10% par rapport à la même période en 2019. Et la profession parle même de "retrait des ventes" pour les poêles aux granulés, un segment notamment plombé par le reconfinement de l'automne mais qui devrait quand même atteindre les 130.000 commercialisations sur l'année.

 

Moins d'inquiétude du côté des installateurs, qui ont même dû composer simultanément avec un retour en force de leur activité du fait des rattrapages de chantiers accumulés au printemps, des nouvelles demandes et des difficultés administratives. Parmi celles-ci, les professionnels déplorent la "galère" rencontrée sur le terrain s'agissant des dossiers d'aide de l'Anah (Agence nationale de l'habitat) et des renouvellements de la qualification RGE (Reconnu garant de l'environnement). "Même si tout n'est pas encore rentré dans l'ordre, l'Anah a pris des mesures pour raccourcir les délais de traitement des dossiers et Qualit'ENR a assoupli les règles de renouvellement de la qualification en prolongeant la validité des qualifications jusqu'au 31 décembre 2020", tempère-t-on ceci dit chez Propellet.

 

Déception sur Ma prime rénov'

 

Toujours dans l'ordre chronologique des (nombreux) évènements ayant émaillé ce millésime 2020, le Plan de relance a suscité d'abord de l'espoir chez les professionnels du secteur, avant de provoquer de la déception. En cause : le retrait des 9e et 10e déciles de revenus dans le barème de Ma prime rénov' pour l'achat d'un appareil de chauffage, un choix qui irait selon eux à l'encontre de l'atteinte d'une neutralité carbone d'ici 2050. La rentrée de septembre a par la suite assuré une forte activité aux entreprises du chauffage bois, qui alertent toutefois sur le fait que l'année n'est pas encore terminée et qu'elle pourrait bien réserver un nouveau petit lot de surprises.

 

La filière peut tout de même bénéficier d'une situation plus favorable qu'au printemps, avec la poursuite de ses activités pour presque tous ses métiers : producteurs et distributeurs de granulés de bois, installateurs de poêles et de chaudières, fabricants d'appareils, professionnels de maintenance et de service après-vente... "Seuls les commerces, comme les magasins de chauffage et les âtriers accueillant du public, sont restés fermés", relève l'organisation dans son bilan annuel. Si la distribution connaît un calme relatif, peut-être dû à l'arrivée tardive du froid et au fait qu'une partie des consommateurs a pu faire "le plein" durant le premier confinement, l'exercice 2020 n'est quoi qu'il en soit pas encore fini.

 

"Tirer son épingle du jeu et limiter la casse"

 

Du côté de la production, la filière assure que les stocks de granulés de bois sont "élevés", particulièrement en Allemagne et en Autriche. Le marché français, basé sur un "modèle d'auto-suffisance avec une part assez faible d'export", encaisse malgré tout le coup d'un ralentissement des achats opéré par l'Italie, qui habituellement consomme 3 millions de tonnes de pellets à elle seule. Avec une augmentation de sa production de 10% depuis juin, l'Hexagone resterait dans tous les cas en mesure de fournir les stocks nécessaires pour cet hiver.

 

Quant aux enjeux de 2021, ils sont, là aussi, pour le moins multiples : de l'avis-même des professionnels du secteur, "nombreuses sont les interrogations pour 2021, mais au vu de l'ampleur de la crise, la filière du chauffage au granulé de bois semble tirer son épingle du jeu et limiter la casse". Une référence évidente à la RE2020, dont la dernière feuille de route en date confère une place prépondérante à l'électricité et au matériau sylvestre. "Le bois a un rôle crucial-clef à jouer dans la transition écologique ; que ce soit dans le secteur domestique ou le collectif", confirme Propellet. Ce qui devrait offrir des perspectives "inédites" ainsi que des "nouveaux" défis à la filière, qui y voit autant d'opportunités.

 


Les chaudiéristes se disent prêts à répondre aux enjeux de la RE2020

 

 

Les récents arbitrages rendus sur la RE2020, avec un rejet du gaz et une consécration de l'électricité et du bois, satisfont évidemment les acteurs de la filière sylvestre. Le Syndicat français des chaudiéristes biomasse (SFCB), qui considère les décisions gouvernementales comme un "beau tremplin" pour le bois-énergie, assure que ses professionnels sont "en ordre de marche" pour répondre à ces nouveaux enjeux : "Cette annonce, soudaine, est une très belle surprise tant pour la construction bois que pour le bois-énergie. La filière a de nombreux atouts pour répondre à ce nouveau défi", insiste Éric Trendel, président de l'organisation. "Nous disposons d'une ressource locale et renouvelable, de solutions performantes qui préservent la qualité de l'air, de larges gammes de produits, et d'installateurs qualifiés sur tout le territoire pour assurer la pose et l'entretien des chaudières."

 

Mettant en exergue le caractère durable et circulaire du bois, ainsi que la qualité et la diversité des équipements de chauffage, le syndicat affirme que les capacités de production seront en mesure de suivre un éventuel décollage du marché du fait que "seulement 50% de l'accroissement" de la forêt française serait aujourd'hui exploité par l'industrie. "Le SFCB sera aux côtés des constructeurs de maisons individuelles, des maîtres d'œuvre et des bureaux d'études pour que l'installation des chaudières biomasse soit simplifiée", poursuit Éric Trendel. Et d'ajouter : "Si nous sommes aujourd'hui très heureux de pouvoir nous positionner plus largement dans le logement individuel, la filière a aussi les solutions pour répondre aux besoins des logements collectifs comme définis dans la RE2020".

 

On l'aura compris, si cette dernière fait des mécontents, elle fait aussi assurément des heureux.

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