Immeubles bombardés, insécurité, pénurie d'eau ou coupures du courant: Bagdad est loin d'être l'endroit idéal pour lancer une agence immobilière et pourtant Malek Khafoury est certain de pouvoir y faire de bonnes affaires.

Cet Irakien hispanophone qui s'occupait de la vente ou location de villas luxueuses à Marbella, lieu de villégiature de la jet-set en Espagne, reconnaît cependant que l'anarchie et l'absence de services de base dans la capitale irakienne meurtrie par la guerre rend le travail "vingt fois plus dur".

Mais il affirme avoir déjà des clients parmi les diplomates et les organisations internationales désireux de s'installer ou d'ouvrir des commerces dans le nouvel Irak, et croit à un boom dans les affaires dès le lancement du processus de reconstruction.

La société de Malek Khafoury, appelée "Diplomats' Services Office", offre tous les services nécessaires pour tout expatrié riche souhaitant s'installer en Irak: gardes armés, générateurs, de l'eau, téléphones satellitaires et un service 24 heures sur 24 pour les urgences médicales.
"Nous offrons un service complet. Nous avons des générateurs, des gardes du corps, tout!" dit cet ancien émigré de 53 ans, qui détient un passeport norvégien et un autre espagnol.

M. Khafoury travaille à partir d'une résidence luxueuse dans le quartier résidentiel riche de Mansour, où les villas des familles de la bourgeoisie irakienne côtoient des maisons de commerçants import-export et des responsables de la sécurité qui ont fait fortune sous Saddam Hussein.

"Ces jours-ci, tout le monde a des armes", dit-il avec regret, en allusion à l'arsenal d'armes dont la population s'est emparée après la chute du régime. "Mais le quartier de Mansour est bien protégé. Nous avons environ 150 personnes avec des armes", affirme-t-il.

Pour le moment, M. Khafoury peut seulement louer des maisons. Avec l'effondrement du gouvernement et le pillage de la plupart des titres et archives, il est impossible d'enregistrer légalement une vente.

Il a une liste de propriétés à louer appartenant à ses proches et amis, et certaines à des gens qui ont fui l'anarchie dans la ville.
"Je ne pensais pas travailler dans l'immobilier. J'avais juste acheté quelques maisons pour la famille. Mais des amis à l'étranger m'ont demandé de les aider à trouver des maisons et bureaux, et après avoir fait cela une ou deux fois, j'ai réalisé qu'on pouvait faire des affaires", raconte-t-il.

M. Khafoury affirme avoir loué déjà une demi-douzaine de maisons et qu'une vingtaine de clients ont fait appel à ses services. Vingt personnes supplémentaires aident les 50 autres employés membres de sa grande famille.

Une maison meublée avec deux ou trois chambres est louée à 20.000 dollars l'an, et le prix demandé pour une villa luxueuse de dix chambres est de 200.000 dollars.
Cet agent immobilier souligne néanmoins que l'affermissement du dinar irakien face au dollar a fait que les prix en dollars augmentent. Il faut aujourd'hui en moyenne 1.000 dinars pour acheter un dollar, alors que le billet vert valait 3.500 dinars juste après l'arrêt des combats. Mais malgré tout Malek Khafoury affirme que sa réelle passion reste l'avenir politique de son pays.

Il dit avoir entrepris des préparatifs pour la création d'un nouveau mouvement appelé "l'Irak pour les Irakiens", indiquant avoir dépensé plus de 10.000 dollars pour l'achat de T-shirts, de casquettes et d'autres accessoires pour lancer le groupe politique. Mais pour le moment, il a suspendu son projet.
"Il existe aujourd'hui des dizaines de groupes et je ne veux pas m'abaisser à leur niveau. De plus, les gens ne veulent pas entendre parler de partis, mais veulent l'électricité, la sécurité et les salaires", ajoute-t-il.
Mais le moment venu, il envisage de confier son agence immobilière à sa famille. "Les affaires c'est juste pour faire de l'argent mais "l'Irak pour les Irakiens", c'est une affaire de coeur".

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