JUSTICE. Le tribunal correctionnel a jugé qu'un homme propriétaire de chambres insalubres louées n'était pas coupable. L'immeuble avait été fermé en 2018, suite à l'effondrement d'un bâtiment rue d'Aubagne.

La justice a décidé de le relaxer. Le propriétaire d'un hôtel meublé très dégradé de Marseille, qui avait été fermé pour insalubrité par la Ville, a finalement été reconnu non coupable. Le tribunal correctionnel a rendu sa décision ce lundi 18 octobre, estimant que la vulnérabilité des vieux travailleurs immigrés qui résidaient dans cet hôtel n'était "pas suffisamment démontrée". Quelques semaines plus tôt, le 4 octobre, le procureur avait requis trente mois de prison avec sursis et une amende de 75.000 euros contre le propriétaire, âgé de 87 ans. Pendant 46 ans, il a exploité cet immeuble de 28 chambres du quartier du Panier.

 

L'homme a été jugé pour le délit de soumission de personnes vulnérables à des conditions de logement incompatibles avec la dignité humaine. Parmi les travailleurs, sept Tunisiens s'étaient constitués partie civile mais ont été déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts. Certains logeaient depuis 35 ans dans l'immeuble. La municipalité de la cité phocéenne avait décidé, le 30 novembre 2018, de fermer l'hôtel par arrêté, suite à l'effondrement d'un immeuble rue d'Aubagne, qui avait causé la mort de huit personnes.

 

Des chambres non chauffées

 

 

Plusieurs problèmes avaient été pointés dans cet immeuble insalubre, lors de différentes opérations d'éradication. Certaines chambres étaient non chauffées et la tuyauterie et les robinetteries n'avaient jamais été refaites depuis l'ouverture en 1972. Une seule douche collective avait été refaite en 2018. Les travailleurs devaient payer cinq euros par utilisation. "Incontestablement, l'immeuble était dans un état de vétusté avancée dès 2011", a déclaré le tribunal, par le biais de sa présidente Laure Humeau. "Les conditions de logement des plaignants sont bien qualifiables d'incompatibles avec la dignité humaine", a-t-elle ajouté. "Il y a tout lieu de penser que [le propriétaire] profitait directement de la rentabilité de l'immeuble sans jamais avoir investi dans l'entretien courant", a ajouté la présidente. 189.000 euros de loyer avaient été encaissés en quatre ans par le propriétaire, qui n'avait jamais justifié d'aucune facture prouvant un entretien de l'immeuble.

 

Le tribunal a considéré la "fragilité économique" des locataires, les problèmes de santé évoqués par certains et l'impossibilité pour des hommes seuls ayant leur famille à l'étranger de prétendre à un logement social. Il a pourtant estimé qu'"il n'y a pas d'élément concret en procédure" à même de démontrer cette vulnérabilité. Le parquet, dont la lutte contre l'habitat indigne est l'une des priorités, a fait appel de cette première relaxe, après une série de jugements ayant condamné des marchands de sommeil depuis l'automne 2020.

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