FOCUS. Les Vingt-Sept viennent d'adopter une série de règlements en lien avec la politique climatique du Vieux Continent, ce qui permet à l'ambitieuse réforme communautaire du marché carbone d'être définitivement validée. Sa prochaine entrée en vigueur aura des conséquences importantes pour l'industrie comme pour le bâtiment.

Une nouvelle et dernière étape de franchie : ce 25 avril, l'Union européenne vient d'adopter une série de règlements en lien avec la politique climatique du Vieux Continent. Avec dans le viseur l'objectif de neutralité carbone d'ici 2050, les États-membres donnent ainsi le dernier feu vert à l'un des grands axes du plan climat européen, à savoir l'ambitieuse réforme du marché carbone.

 

 

Dans la foulée d'un vote déjà positif des eurodéputés la semaine dernière, les Vingt-Sept valident définitivement la directive révisée sur le système d'échange de quotas d'émissions (Seqe) qui comprend elle-même plusieurs mesures. L'entrée en vigueur prochaine de cette dernière aura des conséquences importantes pour plusieurs secteurs d'activité, dont l'industrie et le bâtiment.

 

Un second marché du carbone consacré au chauffage des bâtiments

 

Concrètement, la "taxe carbone" s'appliquera bientôt aux logements ainsi qu'aux frontières du marché commun, dans l'optique de faire davantage correspondre les importations européennes aux exigences du développement durable. Pour rappel, la première étape consiste à faire chuter les émissions de gaz à effet de serre du Vieux Continent de 55% d'ici 2030, par rapport à leur niveau de 1990.

 

En vertu du principe "pollueur-payeur", l'AFP souligne que les producteurs d'électricité et les industries énergivores - dont font notamment partie les fabricants de ciment - doivent à l'heure actuelle s'acquitter de "permis de polluer" sur le marché européen des quotas d'émissions (ETS), considéré comme le plus novateur au monde. Créé en 2005, celui-ci s'applique aujourd'hui à 40% des émissions polluantes de l'Europe.

 

La réforme prévoit donc de presser le rythme de réduction des quotas proposés, de sorte à forcer les industriels concernés à diminuer d'autant leurs émissions. Tandis que le marché ETS va être progressivement étendu aux secteurs maritime et des vols aériens intra-communautaires, un second marché du carbone, baptisé ETS2, va voir le jour. Il sera entièrement consacré au chauffage des bâtiments et aux carburants routiers.

 

Ce qui suscite déjà des oppositions, car il est pour l'instant prévu que les ménages versent un prix du carbone sur le chauffage de leurs logements à compter de 2027. Le texte ratifié devrait, au moins jusqu'en 2030, le plafonner à 45 euros la tonne.

 

Un Fonds social pour les ménages et micro-entreprises

 

L'Europe veut cependant contrebalancer cette mesure en instituant un Fonds social pour le climat en 2026 : doté d'un budget de presque 87 milliards d'euros, ce dispositif aura pour objectif de soutenir les ménages vulnérables ainsi que les micro-entreprises dans cette transition énergétique. Le dernier volet concerne la mise en place d'un "mécanisme d'ajustement carbone aux frontières".

 

Cet outil, qui ne constituera pas une taxe à proprement parler, appliquera les critères du marché européen du carbone aux importations des États-membres dans les secteurs considérés comme les plus polluants : acier, aluminium, ciment ou encore électricité seront les premiers impactés. Les entreprises important ces ressources devront donc acheter des "certificats d'émissions" au prix du CO2 fixé dans l'UE.

 

La "taxe carbone" aux frontières devrait prendre de l'ampleur entre 2026 et 2034, ce qui permettra à l'Europe de supprimer en parallèle, et là aussi au fur et à mesure, les quotas d'émissions gratuits alloués aux industriels du Vieux Continent.

 

 

Accélération du rythme

 

"Dorénavant, les États-membres devront consacrer l'intégralité de leurs revenus d'échange de quotas d'émissions à des projets liés au climat et à l'énergie, et traiter les aspects sociaux de la transition, en complément des dépenses climatiques prévues dans le budget de l'UE", a réagi par communiqué la représentation en France de la Commission européenne. Plus largement, l'UE ne cesse de revoir ses ambitions à la hausse en matière de transitions écologique et énergétique.

 

Lorsque le Conseil de l'Union européenne était sous présidence française en juin 2022, il avait déjà adopté des "orientations générales" sur deux propositions en rapport avec le fameux paquet de mesures législatives "Ajustement à l'objectif 55" ("Fit for 55"). Cela impliquait concrètement de doter les directives communautaires sur les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique d'objectifs encore plus ambitieux que ceux fixés à l'origine.

 

Début mars 2023, les négociateurs des États-membres et du Parlement européen ont ensuite passé un accord sur l'efficacité énergétique qui prévoit de diminuer d'au moins 12% la consommation d'énergie finale de l'UE en 2030. Une décision qui aura de nombreux impacts, comme sur les rénovations de bâtiments ou les réseaux urbains de chauffage et de refroidissement.

 

Puis, le 30 mars, les représentants du Conseil et du Parlement se sont entendus pour faire passer la part des ENR dans la consommation énergétique du Vieux Continent à 42,5% d'ici 2030, assortie d'un "objectif indicatif supplémentaire" de 2,5%, qui permettrait donc d'atteindre 45%. Bien qu'il soit encore considéré comme provisoire, et devra donc à ce titre être adopté formellement par les institutions communautaires, cet accord engage tous les États-membres à contribuer à l'atteinte de cet objectif collectif.

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