FINANCES PUBLIQUES. France urbaine et la Banque postale ont présenté les résultats de la 5e édition du portrait financier des territoires urbains. La bonne maîtrise des budgets en 2019 leur a notamment permis de bien résister à la crise sanitaire. Mais des incertitudes se font sentir quant à leur capacité à accompagner la relance dans la durée.

Le calendrier a quelque peu été bousculé par la crise sanitaire. C'est donc le 10 septembre 2020, environ trois mois après la date habituelle, que France urbaine et la Banque postale ont présenté les résultats de la 5e édition du portrait financier des territoires urbains, au nombre de 80. Le bilan pour l'année 2019 est d'ailleurs plutôt bon, comme l'a soulevé Luc-Alain Vervisch, directeur des études de la Banque postale.

 

En effet, et ce n'est pas si surprenant compte tenu qu'il s'agissait de la dernière année pleine des mandats municipaux et intercommunaux, "le montant des dépenses totales, en euros/habitant, a augmenté sur un an", en moyenne de 4,5% indique-t-il. Et elles sont d'autant plus importante que l'intégration des territoires et leur champ de compétences sont grands. Même si les communes continuent de porter la majorité des dépenses, quel que soit la structure intercommunale dans laquelle elles sont intégrées.

 

Forte croissance des dépenses d'équipement

 

La maîtrise des dépenses de fonctionnement s'est poursuivie. Elle a ainsi été limitée à 1,2%, objectif qu'avait d'ailleurs donné l'Etat à travers feus les contrats de Cahors, et rentre dans ce cadre pour la 2e année consécutive.

 

Jean-Luc Moudenc, président de France urbaine et candidat à sa succession - les instances doivent être renouvelées le 24 septembre, NDLR -, ne cache pas sa satisfaction : "nous avons tenu l'objectif de modération, mais c'est une vertu que nous cultivons, contrat ou non. Nous avons terminé les mandats précédents en bonne santé financière, alors même que la majorité de nos territoires urbains ont besoin d'investissement et de services publics supplémentaires, du fait de leur forte croissance".

 

A propos d'investissement, les dépenses d'équipement, de leur côté, ont fortement progressé : +15% sur un an. Ce qui n'est, là encore, pas si étonnant en fin de mandat. Cette fois, en revanche, "le poids des institutions communautaires est plus important que celui de leurs communes membres", tout simplement car certaines de leurs compétences, comme les mobilités, l'eau ou l'assainissement, sont "lourdes et coûteuses, et nécessitent donc des investissements conséquents", rappelle le directeur des études.

 

Quelques inquiétudes sur l'autofinancement

 

Quoiqu'il en soit, au regard de la situation de leurs finances, les territoires urbains devraient être prêts pour cette relance. Car comme le montre la Banque postale, ils semblent "un peu mieux protégés en 2020 par rapport à l'impact de la crise sanitaire". Tous sont dans des situations financières assez confortables, avec une capacité de désendettement souvent en-dessous de six ans. Leur capacité d'emprunt est donc quelque peu rassurante compte-tenu des investissements à opérer dans le contexte d'après-crise.

 

"Cependant, un risque pèse sur leur autofinancement", prévient Luc-Alain Vervisch. La faute à des recettes particulièrement affectées en 2020 à cause de la crise et à des incertitudes concernant l'évolution de la fiscalité notamment, des recettes liées au versement mobilité, à la tarification des services publics… Aussi, "nous n'avons pas d'inquiétude sur la capacité des territoires urbains à participer fortement au plan de relance sur une période courte. Mais il ne faut pas que la capacité d'autofinancement soit trop impactée par la crise, sinon, ce sont les mandats que l'on mettra en péril", alerte-t-il.

 

Un "regard positif" sur le plan de relance

 

Dans tous les cas, "le plan de relance, à France urbaine, nous inspire un regard positif", selon les termes de Jean-Luc Moudenc. D'une part car l'accent est mis sur la transition énergétique, "un combat que nous menons déjà comme le montrent les projets et investissements que nous avons développés au cours de la précédente mandature, sans attendre que certaines villes prennent une autre couleur politique".

 

Les priorités d'investissement des collectivités et les politiques engagées concernant notamment la mobilité ou le logement devraient, par ailleurs, pouvoir être accélérées, espère-t-il. Car malgré les évolutions liées à la crise, "je crois en la pertinence des transports en commun dans nos villes", et même si la croissance démographique devait ralentir, "nous aurons toujours besoin de produire des logements sociaux, des biens en accession à la propriété… Sinon, nous encouragerons la hausse des prix, ce qui n'est pas souhaitable".

 

Et d'autre part car le plan devrait être territorialisé, une position pour laquelle avait plaidé France urbaine, comme d'autres associations d'élus. Ce qui permettra de "garantir la volonté d'accélérer et d'aller vite", estime Jean-Luc Moudenc.

 

Un bémol et un rendez-vous

 

Jean-Luc Moudenc note tout de même un bémol dans l'annonce du plan de relance. Les quelque 5Mds€ de soutien aux collectivités locales ne sont pas nouveaux, puisqu'ils ont déjà été intégrés dans la troisième loi de finances rectificatives pour 2020. Du "recyclage", en somme, ajoute-t-il.

 

Par ailleurs, cette enveloppe concerne "principalement le monde rural, les communes touristiques, mais les grandes villes centres n'en bénéficient que peu. Nous espérons donc que ce soit corrigé et complété". Aussi, France urbaine proposera que, à l'exemple de ce qui a été décidé pour les DMTO (droits de mutation à titre onéreux), des avances remboursables soient généralisées pour limiter l'effet de la perte des recettes subies par les territoires. "Si nous ne l'obtenons pas, notre capacité d'autofinancement plongera fortement l'année prochaine, ce qui ne sera pas dans la philosophie de la relance elle-même."

 

Des questions autour de la compensation des recettes du versement mobilité perdues, autour des impôts de production, et même sur les projets qui pourront être financés notamment grâce à l'augmentation de l'enveloppe de la DSIL (dotation de soutien à l'investissement local), perdurent également. Les élus locaux devraient obtenir de premières réponses rapidement, puisque la conférence nationale des territoires doit être relancée. Et le rendez-vous est fixé le 22 septembre.

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