Dans l'affaire des chantiers du TGV Nord qui éclabousse des cadres de la SNCF et des dirigeants d'entreprises de travaux publics , le parquet de Créteil n'a épargné personne et a requis - pour les corrupteurs comme pour les corrompus - des peines de prison pouvant aller jusqu'à 36 mois, dont 30 avec sursis.

"Ça se passe comme ça depuis des dizaines d'années !", "Je voyais tout le monde recevoir des voitures à droite à gauche, je suis tombé dans le piège", "Madame la présidente, vous connaissez mal les chantiers" se permet même de déclarer un témoin cité par le quotidien Libération.
Dans l'affaire de corruption sur des grands chantiers du TGV Nord de 1987 à 1996 qui éclabousse la SNCF et plusieurs entreprises du BTP, rares sont les prévenus qui nient les faits, la plupart préférant plaider " l'ambiance de chantier ". Mais le parquet de Créteil (Val-de-Marne) n'a pas été sensible à ce type d'argument. Lundi, il a requis à l'encontre d'onze anciens cadres SNCF et d'un agent RATP détaché à la SNCF, des peines de prison avec sursis allant d'un à deux ans, pour corruption et recel d'abus de biens sociaux.

Le substitut du procureur Bernard Thouzellier a été encore plus sévère concernant les entreprises accusées d'avoir corrompu ces cheminots.
Deux dirigeants sont dans la ligne de mire du substitut du procureur : Jean-Claude Lorang, directeur général de l'Urbaine de travaux, et Jacques Mimran, directeur de Deschiron. Pour les deux responsables, il a requis la même peine de 36 mois de prison dont 30 avec sursis, une amende de 375.000 euros et l'interdiction d'exercice professionnel durant deux ans.

Le magistrat a évalué lundi à 92 millions de francs (environ 14 millions d'euros) les surfacturations des agents au détriment de la SNCF, alors que, vendredi, l'avocat de la SNCF, Michel Bertin, avait seulement demandé réparation pour quelque 10 millions de francs de commissions occultes touchées par ces agents, suivant l'ordonnance de renvoi.

Selon l'AFP, le parquet a également requis 24 mois dont 20 mois avec sursis et 60.000 euros d'amende pour Thierry Dimet, directeur de la société Razel, le qualifiant de "personnalité arrogante et confuse".

En revanche, le parquet a estimé que Bernard Wilhelm, au coeur de l'affaire en tant que patron des bureaux d'études SEC et S3B, n'était "un instrument", un sous-traitant versant des commissions, notamment à M. Lorang, sur des marchés obtenus, dont il surévaluait les métrés.

Pour Jacques Bossé et Francis Leraillé, deux des adjoints de Bernard Wilhelm (aujourd'hui décédé), il a tout de même demandé douze mois avec sursis et 7.500 euros d'amende, et six mois avec sursis respectivement. Même pour sa veuve, Marlyse Roos, il a requis six mois avec sursis.

Par ailleurs, le procureur s'est interrogé sur ce procès qui représente "une loupe sur une parcelle d'un terrain beaucoup plus vaste" et a dénoncé "cette dérive morale, cette confusion des rôles".

Les plaidoiries de la défense, au nombre d'une vingtaine, ont débuté lundi après-midi et devraient se poursuivre jusqu'à mercredi soir. La 9e chambre correctionnelle doit rendre son jugement en juillet.

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