POLITIQUE. L'Élysée vient de procéder à un nouveau remaniement, qui rebat les cartes des personnalités en poste dans les domaines de la Transition écologique, du Logement, des Transports ou encore des PME et de l'Artisanat.

C'était une règle fixée avant la tenue des élections législatives : les ministres-candidats récalés devraient démissionner. Ce 4 juillet 2022, l'Élysée vient donc de dévoiler les contours du nouveau Gouvernement, après le départ, notamment, d'Amélie de Montchalin (ex-Transition écologique). Le pouvoir profite également de l'occasion pour, comme il l'avait annoncé il y a quelques semaines, nommer plusieurs ministres délégués dans des domaines comme le Logement, l'Artisanat ou les Transports.

 

Olivia Grégoire, une ministre pour les artisans

 

Olivia Grégoire, nommée ministre des PME et de l\'Artisanat
Olivia Grégoire, nommée ministre des PME et de l'Artisanat © Capture Twitter Gouvernement

 

Jusqu'à présent porte-parole du premier gouvernement d'Élisabeth Borne, Olivia Grégoire revient à Bercy à la suite du remaniement annoncé ce 4 juillet 2022. Elle avait en effet déjà occupé le poste de secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable entre 2020 et 2022, auprès de Bruno Le Maire, lui aussi déjà aux manettes du ministère de l'économie durant le premier quinquennat d'Emmanuel Macron. Elle sera à présent, toujours sous tutelle de Bruno Le Maire, reconduit à Bercy, ministre chargée des Petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme.

 

C'est donc en quelque sorte un retour aux sources pour cette diplômée de l'Institut d'études politiques de Paris et de l'École supérieure des sciences économiques et commerciales. À 44 ans, elle a eu l'occasion d'occuper différentes fonctions au sein du Gouvernement (chargée de mission, conseillère communication…) mais a aussi travaillé dans le privé, en assurant par exemple la communication du groupe DDB ou encore en fondant le cabinet de conseil Olicare.

 

Sur le plan politique, nonobstant son premier poste à Bercy, Olivia Grégoire a également été députée LREM de Paris entre 2017 et 2020, ainsi que porte-parole de son groupe parlementaire et vice-présidente de la commission des finances à l'Assemblée nationale. Réélue le 19 juin dernier avec 68,51% des voix dans la 12e circonscription de Paris (une partie des VIIe et XVe arrondissements), sa place au Gouvernement a donc été confortée.

 

Avec son retour au ministère de l'économie aux côtés de Bruno Le Maire, la presse souligne que cette macroniste historique retrouve un poste moins exposé politiquement que le porte-parolat de l'exécutif. En outre, Olivia Grégoire travaille depuis longtemps avec Bruno Le Maire dans la mesure où elle avait présidé la commission spéciale de l'Assemblée nationale chargée d'examiner la loi Pacte (loi relative à la croissance et la transformation des entreprises) en 2019, un texte porté par celui qui était déjà ministre de l'économie et considéré comme une réforme importante du précédent quinquennat.

 

Christophe Béchu : un fin connaisseur de l'aménagement du territoire au poste clé de la Transition écologique

 

Christophe Béchu (Transition écologique et Cohésion des territoires)
Christophe Béchu, nommé ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires © Twitter ChB

 

Entré au Gouvernement il y a quelques semaines, Christophe Béchu se voit déjà offrir une belle promotion. Celui qui était jusqu'alors ministre délégué aux Collectivités territoriales prend en effet les rênes la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires, en remplacement de sa ministre de tutelle Amélie de Montchalin, battue aux élections législatives. Le choix de Christophe Béchu pour ce poste clé dans le Gouvernement porte en lui plusieurs symboles. Il est un élu de terrain, passé par toutes les strates de collectivités : il a été président du département du Maine-et-Loire pendant dix ans, conseiller régional, et est depuis 2014 maire d'Angers - qu'il a fait basculer à droite - et président de la communauté urbaine, qu'il a su dynamiser, transformer et rendre attractive pour la hisser au rang des villes "où il fait bon vivre".

 

Un politique pure souche à la solide réputation auprès des acteurs du BTP

 

Cette carrière d'élu local lui a permis de se munir de solides compétences en termes d'aménagement du territoire, de développement économique local, d'urbanisme, de renouvellement urbain, de logement… Politique pure souche, Christophe Béchu a aussi été sénateur pendant six ans, et a aussi traversé les allées du Parlement européen. Il connait donc bien les arcanes du pouvoir, à différents niveaux.

 

Depuis 2018, Christophe Béchu présidait l'Agence de financement des infrastructures de transports de France (Afit France), établissement public chargé de financer, au nom de l'État, les projets de mobilité : ferroviaires, routiers comme fluviaux. A ce titre, le nouveau ministre de la Transition écologique a donc suivi les débats autour de la loi d'orientation des mobilités adoptée fin 2019, a participé à sa mise en œuvre et faisait partie du conseil d'orientation des infrastructures. C'est donc une figure bien connue des acteurs des travaux publics - et d'Élisabeth Borne, la Première ministre -, qui bénéficie auprès d'eux d'une réputation solide et sérieuse.

 

A 48 ans, sa nomination comme ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires est aussi un signal important envoyé à Édouard Philippe. Car Christophe Béchu est un proche de l'ancien Premier ministre. Après avoir quitté Les Républicains en 2017, il rejoint le maire du Havre au sein du parti Horizons. Il en devient même le secrétaire général.

 

Une "écologie de l'action" pour "concilier les injonctions contradictoires"

 

S'efforcer "à incarner une écologie de l'action, du concret et du quotidien". C'est la direction que donne le nouveau ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires, Christophe Béchu, en entrant à l'Hôtel de Roquelaure, le 4 juillet 2022. Une direction qu'il fixe aussi pour les 5 ministres et secrétaires d'Etat qui l'accompagneront dans sa tâche.

 

Cette équipe qui investit le ministère a l'avantage, pour Christophe Béchu, d'être "profondément ancrée dans nos territoires". Parmi eux, 4 maires, dont lui, Olivier Klein ou encore Caroline Cayeux, qui ne sont "pas des théoriciens de l'écologie, mais vivent les injonctions contradictoires entre le fait de lutter contre l'étalement urbain et celui de loger de plus en plus de gens".

 

Le ministre, pour qui l'écologie n'est "pas de droite, ni de gauche", compte s'appuyer sur son expérience locale, où la feuille de route en faveur de la transition écologique "a été établie après un an de démocratie participative et faisant valider les priorités et les thèmes par 10.000 foyers". Ce qui lui fait promettre de mener "écologie d'action, résolue, ambitieuse, portée par les élus de terrain".

 

Les sujets sont nombreux. Et Christophe Béchu cite, pêle-mêle : le développement durable, la lutte contre les inégalités territoriales, les quartiers sensibles, les territoires ruraux, la décarbonation des transports et les investissements dans les infrastructures, l'aménagement urbain, le soutien à la production de logements mais aussi aux opérations de rénovation… Le tout, rappelle-t-il, "sous l'autorité de la Première ministre", dans un gouvernement où la planification écologique doit être "la politique des politiques".

 

Olivier Klein devient ministre délégué chargé du Logement

 

Olivier Klein
Olivier Klein, ministre délégué chargé de la Ville et du logement. © Capture d'écran

 

Olivier Klein fait également son entrée au gouvernement. L'actuel président de l'Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru) et maire (DVG) de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), a été nommé ministre délégué chargé du Logement et de la Ville. Il travaillera sous tutelle du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. A 55 ans, ce proche d'Emmanuel Macron a d'abord été un militant communiste, en adhérant au PCF en 1985, avant d'être un temps socialiste. Entre 1991 et 2009, cet homme issu du quartier du Chêne-Pointu travaille en qualité de professeur en physique, dans un lycée de Seine-et-Marne. Il occupe le poste de premier adjoint au maire de Clichy-sous-Bois dès 1995, puis de maire adjoint chargé de la politique de la ville et du renouvellement urbain à partir de 2001. Dix ans plus tard, il est élu maire de cette commune de 28.800 habitants, et obtient, lors de sa réélection en 2020, le soutien de LREM. En retour, il crée en février 2022 un comité de soutien à la candidature à la présidence du chef de l'État.

 

Olivier Klein connaît le président de la République depuis quelques années. C'est même lui qui lui propose la présidence de l'Anru en 2017. L'édile de Clichy-sous-Bois connaît bien les problématiques de copropriétés dégradées, dans cette ville où plus de 40% de sa population vit sous le seuil de pauvreté, selon l'Observatoire des inégalités. Lors de la projection du long-métrage "Les Promesses" en janvier 2022, il avait déclaré que le sujet des copropriétés dégradées était "méconnu du grand public, tout comme celui des difficultés que connaissent les élus pour faire changer les choses." La ville qu'il a représentée durant douze ans a bénéficié du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), selon le ministère de la Cohésion des territoires. Ce dispositif vise à réduire les écarts de développement entre les quartiers défavorisés et leurs unités urbaines, et à améliorer le cadre de vie des habitants. Le nouveau ministre du Logement a également été vice-président du Conseil national des villes entre 2015 et 2018. Une fonction qui a pour objectif de conseiller le gouvernement sur l'élaboration d'une politique nationale de développement social urbain.

 

Clément Beaune, un profil européen aux Transports

 

Clément Beaune (ministre des Transports)
Clément Beaune ministre délégué en charge des Transports. © Twitter CB

 

Depuis juillet 2020, Clément Beaune était chargé des questions européennes au sein des précédents gouvernement Castex et Borne. A la faveur du remaniement du 4 juillet 2022, il endosse désormais un tout nouveau costume : celui de ministre délégué aux Transports, auprès du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.

 

Un choix qui peut paraître, au premier abord, un peu surprenant. En effet, l'énarque de 41 ans a a priori un profil très européen. Après avoir commencé sa carrière à la direction du budget et comme conseiller budgétaire du Premier ministre Jean-Marc Ayrault, il passe par la représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne avant d'intégrer le cabinet de celui qui est alors ministre de l'Économie, Emmanuel Macron. Il est alors déjà en charge des affaires européennes au côté du futur président de la République.

 

Un proche d'Emmanuel Macron

 

Une aventure qu'il poursuit lorsqu'Emmanuel Macron arrive à l'Élysée. Il devient son conseiller spécial sur les questions européennes, et se distingue notamment par la rédaction des trames des discours du chef de l'État sur l'Europe. Dans ce parcours, le seul lien avec les transports est son passage entre 2016 et 2017 comme directeur général adjoint d'ADP management. Mais cette filiale est spécialisée dans la gestion et les prises de participation du groupe. Poste donc très financier.

 

Un intérêt pour la transition écologique "qui aidera"

 

Malgré tout, sa nomination semble être un bon signal pour les professionnels des transports, et notamment dans les travaux publics. Ses compétences en matière budgétaire et sa capacité de compréhension de sujets complexes, comme peuvent l'être les affaires européennes, sont reconnues.
Bruno Cavagné, président de la FNTP, a déjà eu l'occasion d'échanger avec le nouveau ministre délégué aux Transports dans ses précédents fonctions. Et il croit savoir que Clément Beaune s'intéresse à la transition écologique. "Ce qui nous aidera", confie-t-il à Batiactu

 

Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales

 

Caroline Cayeux (Villes de France)
Caroline Cayeux (Villes de France), lors des Assises nationales du logement et de la mixité urbaine, le 2 juin 2022, à Paris. © Grégory Brandel

 

Caroline Cayeux, nommée ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales à la place de Christophe Béchu, dispose des connaissances et de l'expérience pour s'attaquer aux nombreux sujets dont elle aura la charge, comme l'application du zéro artificialisation nette, les plans Action cœur de ville et Petites villes de demain. Maire de Beauvais depuis 2001, présidente de la communauté d'agglomération du Beauvaisis, elle est également présidente de l'agence de cohésion des territoires (ANCT) et de l'association d'élus Villes de France. Elle a pu, lors des dernières Assises nationales du logement et de la mixité urbaine, le 2 juin 2022 à Paris, faire état des difficultés auxquelles étaient confrontés les élus actuellement, tiraillés entre les demandes de leurs administrés et les exigences réglementaires croissantes. La maire en a appelé à des mesures de "simplification", ainsi qu'à une décentralisation de la politique d'aménagement du territoire. "Il y a une notion d'équilibre à garder, on ne peut pas imposer d'un bureau parisien le fait qu'une zone sera tendue ou non", a-t-elle par exemple avancé. Caroline Cayeux avait également salué l'existence de nombreux dispositifs permettant de soutenir les collectivités, dans la rénovation des logements anciens, du patrimoine, et des cœurs de ville. Autant de sujets sur lesquels elle sera en mesure d'imprimer sa marque en tant que ministre.

 

Le poste de Caroline Cayeux dépendra du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer et de celui de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.

actionclactionfp