Avec l'arrivée du nouveau gouvernement, le Conseil de l'ordre des architectes réitère sa demande d'annulation du décret concernant le seuil de dérogation au recours obligatoire à l'architecte. Quelles sont leurs autres attentes en matière de logement et de développement durable ? Les réponses de Lionel Carli, président du CNOA.

Batiactu : Le nouveau gouvernement a pris ses fonctions depuis trois mois maintenant et les architectes sont toujours sous la tutelle du seul ministère de la Culture, quelle est votre réaction ?
Lionel Carli :
On est rompu à cet exercice puisque c'était le cas dans le gouvernement précédent. Mais il faut l'avouer : on est déçu car on avait pu nous laisser entendre qu'il y aurait une réflexion sur la mise en place d'une nouvelle organisation correspondant à nos champs d'intervention, à la place des architectes et surtout à l'importance du cadre de vie de nos concitoyens et à la qualité des paysages. On pensait qu'à travers la notion d'égalité des territoires évoquée lors de la campagne électorale, il y aurait un regroupement d'un certains nombres de compétences et de prérogatives, voire un ministère du cadre de vie, du cadre bâti. Mais voilà c'est fait. Maintenant ce qui m'importe, c'est de savoir : Est-ce qu'on aura une véritable direction de l'architecture dotée de véritables moyens ? Est-ce que la dimension architecturale bénéficiera d'une véritable attention ? Notre but final est de peser dans les débats.

 

Batiactu : Vous avez rencontré votre ministre de tutelle, Aurélie Filippetti, comment s'est passé votre premier rendez-vous ?
Lionel Carli :
Je prends acte que madame la ministre m'a assuré que la dimension architecturale allait faire partie de ses attentions. Elle revendique son rôle de ministre des architectes. Elle souhaite nous ouvrir et nous faciliter une position interministérielle, en nous permettant de participer à des tables rondes et des réunions auprès des autres ministères (NDLR : logement, développement durable).

 

Batiactu : Concernant le décret tant décrié à propos du seuil d'intervention de l'architecte. Où en êtes-vous ?
Lionel Carli :
Concrètement, j'attends un décret d'annulation. Cela serait pour l'ensemble de la profession un premier geste fort de la part de notre ministre. Lors de notre rencontre, Aurélie Filippetti nous a confirmé son inquiétude en précisant que la qualité du paysage et le bien-être des Français passaient par une architecture de qualité. Elle a considéré que les architectes avaient en ce sens un rôle social. Du coup, elle a écrit au Premier ministre sur le sujet. Maintenant, c'est à elle de porter l'étendard auprès des autres ministères. De mon côté, j'aborderai la question avec Cécile Duflot, la ministre du Logement. On peut rappeler que pendant la campagne, son parti, Europe Ecologie Les verts, a régulièrement fait remarquer qu'il n'y avait pas assez d'architectes présents sur le territoire. Le parti a même revendiqué l'investissement dans la qualité architecturale comme un vecteur d'avenir, et sa candidate Eva Joly a prôné un abaissement du seuil de 170m². Il me semble que la qualité des paysages français, du bien-vivre, des performances des constructions, n'est pas l'apanage des seuls constructeurs individuels qui construisent pour d'autres et qui profitent d'une dérogation de la Loi de 1977. Les architectes apportent une valeur ajoutée. Nous sommes là et on veut et doit apporter notre savoir-faire.

 

Batiactu : A propos du logement, quel sera votre message principal à Cécile Duflot ?
Lionel Carli :
Je dois rencontrer Madame Cecile Duflot prochainement. C'est le début d'un long combat car le logement est l'une de nos principales préoccupations. Il faut remettre au goût du jour l'excellence, la qualité et l'innovation architecturale. La ministre doit puiser et abuser des architectes et de leur expertise pour répondre à l'urgence à construire des logements (500 000 logements par an dont 150 000 logements sociaux). En réponse à la déclaration de politique générale du Premier Ministre, j'ai soutenu, au nom de la profession, son engagement en faveur du logement, en précisant que construire mieux permet de construire plus et là où il faut. La profession est prête à apporter son expertise.

 

Batiactu : Et sur le développement durable, où vous positionnez-vous ?
Lionel Carli :
On aimerait être présent lors de la grande conférence de l'environnement mi-septembre afin de participer au bilan du Grenelle. Selon les informations dont je dispose, le bâtiment risque d'être peu abordé au profit des problèmes d'énergie. Nous comptons insister sur le fait qu'il ne faut pas se limiter aux questions d'économie d'énergie et d'isolation thermique. Le développement durable, c'est également l'humain autour du dispositif.

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