Après avoir décimé l'industrie solaire européenne, grâce à une filière subventionnée et une main d'œuvre bon marché, le photovoltaïque chinois pourrait être frappé à son tour. De très importantes surcapacités et une situation financière délicate pourraient entraîner des faillites dans l'Empire du milieu. Explications.

L'équation semble relativement simple : le marché photovoltaïque mondial est estimé à 27 GW/an et les capacités de production, localisées à 65 % en Chine, sont de 50 GW. Il se produit donc deux fois plus de panneaux solaires que le marché ne peut en absorber. Après s'être livrés à une guerre des prix impitoyable avec les entreprises occidentales, qui n'ont pour la plupart pas survécu, les industriels chinois pourraient à leur tour être frappés par le retour du bâton. Bénéficiant d'une main d'œuvre pléthorique et bon marché (elle ne représenterait que 10 % des coûts de production), les fabricants de composants et de capteurs chinois profitaient également de subventions déguisées sous la forme de financements à des taux préférentiels leur permettant de pratiquer du "dumping", de la vente à perte, un mécanisme pourtant rigoureusement interdit dans les règles du commerce international. Selon le regroupement d'acteurs européens du photovoltaïque EU ProSun, les entreprises chinoises vendraient leurs produits à 50 % en dessous de leur coût total.

 

Au mois de novembre 2012, EU ProSun soulignait : "Le plus important fabricant chinois de produits solaires, Suntech, a perdu plus de 1 Mrd $ en 2011, et malgré cela, a augmenté sa production en 2012. LDK, autre entreprise figurant parmi les leaders chinois, a perdu 254 M$ au cours du 2e trimestre 2012 et a été déclarée dans les médias comme étant désormais officiellement une entreprise solaire soutenue par l'Etat". Or, justement, selon le quotidien Les Echos, Pékin ne souhaiterait plus soutenir les industriels tous azimuts. Le gouvernement voudrait désormais encourager la consolidation du secteur, réduire les aides publiques et maintenir sous contrôle les nouveaux prêts. Suntech Power, le numéro un mondial, aurait des difficultés à rembourser 541 M$ d'obligations convertibles à des créanciers étrangers avec une dette s'élevant déjà à 2 Mrds $.

 

Ajustement des capacités de production
Le géant aurait donc décidé de mettre à l'arrêt - temporairement - 25 % de sa capacité de production. Trina Solar, autre industriel chinois et numéro 5 mondial, aurait, quant à lui, décidé de réduire sa masse salariale. Et LDK Solar, évoqué par EU ProSun, aurait été obligé de céder 20 % de son capital… Selon certaines estimations, mentionnées par Les Echos, les banques chinoises auraient accumulé environ 18 Mrds $ de prêts à taux préférentiels (dont 7 Mrds $ pour la seule China Development Bank) aux industries solaires. Or, les marchés occidentaux ont réagi depuis le mois de mai 2012 par l'instauration de barrières douanières, aux Etats-Unis et bientôt en Europe. Le marché intérieur chinois du photovoltaïque, 10 GW environ, ne pourra pas absorber toute la production nationale, d'où de probables faillites et fermetures.

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