ECONOMIE CIRCULAIRE. La secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, a installé le groupe de travail national dédié à la reprise des déchets du bâtiment, sous la houlette de Jacques Vernier, auteur d'un rapport contesté par les secteurs du recyclage et des produits de la construction.

Brune Poirson continue de déployer les mesures annoncées dans la feuille de route pour l'économie circulaire. La secrétaire d'Etat à la Transition écologique et solidaire a lancé, ce mardi 5 juin 2018, le groupe de travail chargé d'améliorer la lutte contre les déchets du bâtiment. Car, malgré l'obligation de reprise de déchets issus de chantiers par les distributeurs de matériaux depuis le 1er janvier 2017, inscrite dans la loi de Transition énergétique pour la croissance verte, cette démarche reste coûteuse pour les usagers, artisans et sous-traitants. Le ministère souhaite donc reprendre la main et rendre "efficace et gratuite la reprise des déchets du bâtiment".

 

 

La secrétaire d'Etat précise : "Une feuille de route de l'économie circulaire ambitieuse devait nécessairement s'atteler à la problématique de la gestion des déchets du bâtiment. C'est pour cela que nous lançons ce groupe de travail qui va permettre, pour la première fois, de réunir tous les acteurs du secteur, avec une obligation de résultat, pour mettre en place les solutions nécessaires à la protection de nos ressources et de l'environnement". Le groupe de travail associe donc metteurs sur le marché, distributeurs, professionnels des déchets, artisans en étant constitué de représentants de collectivités, de l'Ademe, de fédérations professionnelles et d'administrations, le tout présidé par Jacques Vernier. L'ambition affichée est de parvenir à une reprise gratuite à l'horizon du 1er janvier 2020 afin de mettre fin aux dépôts sauvages tout en désaturant le réseau de déchetteries des collectivités locales. Les travaux porteront notamment sur un maillage du territoire national afin d'évaluer les besoins de nombres de points de reprise en fonction des zones. Les membres du groupe s'inquiéteront également de l'accessibilité de ces points de collecte afin de les mettre en cohérence avec les contraintes des professionnels. A terme, le ministère espère améliorer le traitement des déchets par le tri, la valorisation, le réemploi ou le recyclage.

 

Une concertation qui était demandée par les producteurs et recycleurs

 

 

Ce groupe de travail parviendra-t-il à lever le trouble concernant la mise en place d'une filière responsabilité élargie du producteur (REP) consacrée aux déchets du bâtiment, comme recommandé dans un rapport remis par Jacques Vernier ? Une piste étudiée sérieusement par l'exécutif mais qui rencontre l'opposition des producteurs de matériaux tout comme celle des recycleurs professionnels. La Confédération des métiers de l'environnement qui regroupe les spécialistes du tri et de la valorisation de déchets, s'inquiète que cette REP ne vienne se substituer à des dispositifs déjà existants et ne privent ses entreprises d'une partie de leur activité. Les acteurs du bâtiment sont également opposés à cette mise en place, à l'image de l'AIMCC, de la FNBM et de la Capeb qui avaient signé un communiqué conjoint pour dénoncer la méthode employée par Jacques Vernier pour formuler ses propositions, précisément sans concertation. En avril dernier, Hervé de Maistre, le président de l'association des industries de produits de la construction, nous expliquait qu'il souhaitait la mise en place de mesures incitatives au tri des déchets plutôt qu'une éco-contribution sur les produits. Pour lui, le coût de mise en décharge, trop faible, n'inciterait pas à faire des efforts de valorisation en amont. Le représentant de l'AIMCC estimait également nécessaire de soutenir la R&D dans le domaine du recyclage des produits de la construction.

 

Dernièrement, c'est Jacques Chanut, le président de la Fédération française du Bâtiment, qui a signé un édito portant sur l'éventuelle éco-participation. Il écrit : "Si, dans les grandes lignes, la feuille de route pour l'économie circulaire semble aller dans le bon sens, la FFB s'oppose à un projet particulièrement inquiétant : la création d'une filière REP pour les déchets du bâtiment, assortie d'une nouvelle taxe sur nos produits de construction, en l'absence de toute consultation des acteurs concernés !". Pour lui, le dispositif existant pour l'électroménager ne pourra pas s'appliquer à la branche de la construction, puisqu'elle renchérirait son coût et déresponsabiliserait l'ensemble des acteurs. Le mécanisme d'une REP lui semble donc inadaptée. Le président rappelle lui aussi l'implication de ses membres pour former, innover et mettre en place des solutions adéquates. Jacques Chanut conclut : "Nous entendons bien le démontrer en contribuant activement à l'étude de faisabilité technico-économique prévue par les pouvoirs publics. Alors, oui à l'économie circulaire, mais pas à n'importe quel prix !".

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