Le projet de loi réformant la formation professionnelle et la démocratie sociale négocié par les partenaires sociaux a été adopté ce mercredi 22 janvier en Conseil des ministres. En parallèle, l'inspection du travail est renforcé. Décryptage de Michel Sapin, ministre du Travail.

Trente pages d'exposés des motifs, 69 articles dont certains destinés à en "finir" avec l'opacité du financement des organisations patronales et syndicales…

 

 

Le projet de loi issu du dialogue social dédié à la réforme de la formation professionnelle en France, présenté par le ministre du Travail Michel Sapin, a été adopté ce mercredi 22 janvier en conseil des ministres.

 

Ce texte traduit, en effet, l'accord conclu par les partenaires sociaux le 14 décembre 2013, signé par la CFDT, Force ouvrière, la CFTC, la CFE CGC côté syndical, le Medef et l'Union professionnelle artisanale côté patronal. De leur côté, la CGT et CGPME ont refusé de signer. La première, qui voit une partie de ses propositions reprises par le texte, a toutefois refusé de le parapher, estimant qu'il "réduit les obligations financières des grandes entreprises". La seconde, la CGPME, dénonce une mutualisation insuffisante des fonds en faveur des PME.

 

"Ce texte que je qualifie de fondateur, refondateur de la formation professionnelle représente le quatrième accord professionnel conclu depuis 18 mois, s'est félicité Michel Sapin, au ministère du Travail, en prélude du conseil des ministres. Ce ne sera surtout pas un document fourre-tout (…) Il y a urgence d'agir vite car l'objectif fixé par le chef de l'Etat est clair : 500.000 jeunes tournés vers l'apprentissage."

 

Michel Sapin
Michel Sapin © S.C. Batiactu
Examiné dès le 5 février prochain à l'Assemblée nationale
Le Gouvernement veut faire de la formation continue une arme anti-chômage, a-t-il rappelé, mais attend aussi de cette loi, qu'il souhaite faire voter en procédure d'urgence avant fin février, un financement plus transparent des organisations syndicales et patronales. Le gouvernement souhaite s'assurer ainsi que ce texte emblématique soit voté avant les municipales. Le projet de loi sera donc examiné par l'Assemblée nationale le 5 février, puis débattu au Sénat à partir du 18, pour une adoption définitive à la fin du mois.

 

Le texte met en œuvre notamment un compte personnel de formation (CPF) dont tous les actifs disposeront à partir du 1er janvier 2015 et pour toute la durée de leur carrière professionnelle, nous a confirmé Michel Sapin. Le CPF "permettra ainsi à tous de connaître leurs droits et de les conserver" quels que soient les soubresauts de leur parcours professionnel, a-t-il dit. Et d'ajouter à ce sujet : "Les droits du chômeur seront exactement les mêmes que ceux du salarié, il n'y a plus de différence."

 

Cette réforme a conduit aussi à ouvrir le dossier du financement des organisations syndicales et patronales. Celles-ci empochaient jusqu'à présent, dans l'opacité, une partie des fonds alloués à la formation.

 

"Beaucoup trop de boîtes noires"
"Il y avait beaucoup trop de boîtes noires, je veux que la démocratie sociale soit une boîte transparente car il en va de sa légitimité", a expliqué en profondeur Michel Sapin.

 

Par conséquent, ce projet crée un fonds, abondé à la fois par les entreprises - dans une fourchette de 0,014 à 0,02% de leur masse salariale -, par l'Etat et des organismes paritaires. Les bénéficiaires devront rendre compte de son utilisation, a lancé le ministre.

 

"Il sera en partie alimenté par une contribution des employeurs, qui sera fixée par accord entre organisations syndicales et patronales et compris entre 0,014% et 0,02% de la masse salariale", précise le texte.

 

Un fonds pouvant atteindre 120 à 150 millions d'euros
Au total, ce fonds sera ainsi doté d'au moins 80 millions d'euros auxquels pourraient s'ajouter les contributions d'autres organismes paritaires comme l'assurance chômage, pour atteindre 120 à 150 millions d'euros, nous signale en marge de la conférence de Michel Sapin, un conseiller technique du ministère du Travail.

 

 

Et d'ajouter : "L'Etat continuera pour sa part, également via ce fonds, à financer la formation économique et sociale des cadres syndicaux - une contribution d'environ 23 millions aujourd'hui et qui pourrait être un peu supérieure."

 

Le projet s'attaque d'ailleurs à un autre serpent de mer : la représentativité patronale, dans le but de rendre "légitimes" tous les acteurs de la démocratie sociale. Désormais, pour représenter les entreprises, les organisations patronales seront soumises à une mesure d'audience, prenant en compte leur nombre d'adhérents (un seuil minimum de 8% par branche).

 

L'inspection du travail renforcée
Par ailleurs, l'inspection du travail va voir ses moyens de contrôle renforcés. "Les inspecteurs pourront aussi interrompre des travaux en cas de danger dans tous les acteurs, alors que le seul le BTP était jusqu'à présent concerné", signale le ministère du Travail.

 

Reste la suppression des élections des juges prud'homaux, que le Gouvernement défend en mettant en avant la faible participation des salariés à ce scrutin. Le ministre a souhaité présenté un texte de loi "dissocié" de celui de la "Formation professionnelle, emploi et démocratie sociale" pour habiliter le Gouvernement à légiférer sur ce sujet par ordonnances. Il sera soumis au parlement au printemps.

 

L'UPA favorable au texte dédié à la réforme de la formation ainsi qu'au second consacré aux prud'hommes en discutera en profondeur ce jeudi 23 janvier au cours de son conseil national. De son côté, la CGT vient applaudir à ce report qu'elle considère comme une "première victoire". Les sénateurs communistes demandent un retrait pur et simple du texte.

 

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