FISCALITÉ. En pleine contestation sur la flambée des prix des carburants, le président de la République s'est exprimé sur l'antenne d'Europe 1. Il annonce vouloir faire un geste pour les foyers les plus modestes que ce soit pour faciliter leurs transports ou alléger leur facture de chauffage. En revanche, pas de marche arrière sur les taxes Diesel.

Le chef de l'Etat, invité de la matinale d'Europe 1, a été interrogé sur le sujet le plus brûlant d'actualité pour les Français : la hausse continue du prix des carburants et son impact sur le pouvoir d'achat. Emmanuel Macron a déclaré : "Je souhaite qu'on bouge un peu" sur cette question, en se disant attaché "à la situation de deux catégories de personnes". Tout d'abord les gens très modestes : "Pour se chauffer, quand ils ne peuvent pas changer de chaudière, qu'ils n'ont pas d'autres options, il faut qu'on regarde comment améliorer le chèque énergie. Parce qu'on ne peut laisser les gens alors que l'hiver commence dans une situation qui ne permet pas de se chauffer dignement". Il est d'ores et déjà prévu que ce dispositif, qui remplace les tarifs sociaux de l'électricité et du gaz, soit porté de 150 à 200 € par an en 2019. Le chèque est versé à 3,7 millions de ménages en situation de précarité.

 

 

"Il faut aider nos concitoyens les plus modestes qui n'ont pas le choix", Emmanuel Macron

 

Autre piste catégorie de personnes, les travailleurs motorisés. Le président de la République souhaite aider ceux "qui prennent la voiture pour travailler". L'initiative des Hauts-de-France qui donne un coup de pouce de 20 € mensuels aux salariés qui doivent faire plus de 30 km de trajets par jour a été qualifiée de "bonne philosophie". A ce titre, elle sera accompagnée par le gouvernement et défiscalisée. Puis Emmanuel Macron a poursuivi : "Je souhaite qu'on généralise tout cela. Il faut qu'on soit dans un mode d'indemnités kilométriques. Il faut travailler avec les collectivités locales, les employeurs, intelligemment, pour aider ces gens-là".

 

"Il est hors de question que les entreprises prennent à charge le coût du gasoil pour leurs salariés"
L'embryon d'idée évoquée par le président de la République sur une forme "d'indemnités kilométriques" fait déjà bondir Patrick Liébus, président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), contacté par Batiactu. "Il est hors de question que les entreprises prennent à charge le coût du gasoil pour leurs salariés", tempête-t-il. "Nous avons suffisamment de charges comme cela. Et les pouvoirs publics récupèreront déjà l'argent de la suppression du taux réduit de TICPE pour nos entreprises. C'est trop, au moment même où la reprise amorcée dans notre secteur montre déjà des signes de faiblesse." L'organisation patronale a diffusé en fin d'après-midi un communiqué de presse, où l'on peut également lire : "La Capeb refuse absolument que les entreprises aient à supporter tout ou partie du coût du dispositif de primes pour les salariés, annoncé ce matin par le président de la République. Les entreprises n'ont, en effet, pas vocation à financer les propositions du gouvernement. Ce serait une double peine pour les entreprises : l'augmentation du prix des carburants qu'elles subissent elles-aussi de plein fouet et le défraiement de leurs salariés. Sans compter que ce dispositif créera inévitablement des tensions au sein des entreprises entre les salariés bénéficiant de la prime et les autres, tout comme le prélèvement à la source en janvier prochain. Les entreprises n'avaient pas besoin de cela !"

 

La Confédération des PME (CPME) a également réagi dans l'après-midi par communiqué de presse. "Il est à souligner que les aides évoquées [par le Président] ne peuvent en aucun cas reposer financièrement sur les entreprises, elles-mêmes lourdement impactées par la flambée des prix du carburant. Pire encore, certaines PME, notamment dans le secteur des travaux publics, du recyclage, des transports routiers, des matériaux et carrières, de l'assainissement subiront avec la fin du taux réduit de TICPE sur le gazole non routier, une double peine à partir de janvier 2019." L'organisation patronale "réitère donc sa demande d'un moratoire pour stopper l'application des surtaxes mises en place en 2018 et prévues en 2019".

 

Pas de recul sur la taxation du Diesel

 

 

Rebondissant sur la grogne d'une grande partie de la population, il a déclaré : "Je comprends leur colère, ils se sentent pris au piège et ils considèrent que c'est injuste". Toutefois, le président s'est dit méfiant vis-à-vis des motivations de ceux qui appellent à une grande mobilisation le 17 novembre prochain : "Parce que généralement, derrière, on retrouve un peu tout et n'importe quoi, des choses qui n'ont rien à voir avec ensemble et des gens qui n'ont pas beaucoup de projets pour le pays, si ce n'est de le mettre à l'arrêt". Le chef de l'Etat a défendu l'idée de hausse des taxes sur le Diesel, "pour réduire l'écart avec le sans plomb", écart qui ne se justifierait plus selon lui. Il a ensuite expliqué sa vision de la fiscalité des carburants : "On doit moins taxer le travail, ce qui est le cas : vous avez vu, vos cotisations ont baissé, et vous allez continuer à voir ce mouvement. Et on doit davantage taxer ce qui pollue".

 

Interrogé sur le départ de Nicolas Hulot du gouvernement, Emmanuel Macron a répondu : "J'ai d'abord eu de la tristesse à titre personnel. Nicolas Hulot est quelqu'un avec qui, d'ailleurs, j'ai toujours des échanges réguliers, mais avec qui j'entretenais un compagnonnage amical, intellectuel et d'engagement". Avant de conclure : "Etre ministre, s'engager dans la vie politique, c'est un choix qui engage sa personne propre et sa famille. Et je ne suis pas sûr qu'il ait été très heureux comme ministre".

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