Fibrociment mais également enduits, colles à carrelage, joints, revêtements… l'amiante est présent partout en façade. L'entreprise francilienne Socateb, spécialiste des ravalements, estime qu'un chantier sur cinq est concerné. Découverte des méthodes d'intervention très sécurisées avec Gérard N'Diaye, le responsable du département Amiante.

Le diagnostic amiante a évolué depuis le 1er octobre 2017. Une nouvelle version de la norme NF X46-020 a été publiée par l'Afnor, définissant les méthodes pour réaliser une localisation de ce matériau dans les immeubles bâtis, interdit dans l'Hexagone depuis 20 ans. Pourtant, les façadiers en rencontrent souvent, soulevant des questions de confinement et de risque sanitaire, pour les professionnels et pour les riverains.

 

 

Jean-Pierre Valente, président de l'entreprise Socateb qui recevait la presse ce 21 novembre 2017, raconte : "Notre entreprise est certifiée amiante. C'est un long processus, avec un lourd investissement en formation des personnels et en matériel. Il y a des contrôles aléatoires et quasi-permanents. Mais le but est de garantir la sécurité des intervenants et des occupants. La méthodologie est donc rigoureusement appliquée sur les chantiers". Celui qui dirige la société avec son frère jumeau depuis plus de 35 ans, ajoute : "Le diagnostic amiante est important pour les bailleurs sociaux et il faut faire attention aux diagnostics non pertinents - réalisés avec trop peu d'échantillons - car le principe de précaution fera arrêter tout chantier où l'on aura détecté une trace d'amiante. Il faut donc faire un effort de pédagogie autour de son obligation, car l'amiante entraîne forcément des surcoûts dans le traitement des façades". Des factures de plusieurs dizaines de milliers d'euros justifiées par les mesures de confinement drastiques à déployer autour du bâtiment contaminé.

 

L'amiante est partout : intérieur, canalisations, façades, toitures…

 

Gérard N'Diaye, qui dirige le département d'une vingtaine de personnes dédié à l'activité amiante, évoque les différents produits incriminés : "Le fibrociment en toiture et en canalisations évidemment, mais également les enduits qui, à l'époque, étaient passés après le débanchage pour lisser les façades. Le support se trouve ainsi contaminé, tout comme peut l'être un isolant à son contact. On rencontre également la colle à carrelage des pâtes de verre, les joints de dilatation et joints de calfeutrement des fenêtres, les revêtements d'étanchéité des terrasses…" La fibre minérale volatile est donc partout, ou presque. Socateb estime qu'elle en rencontre dans un chantier de façade sur cinq, ce qui est très significatif en termes de volume sur l'ensemble du parc à rénover.

 

"Le repérage avant travaux sera rendu obligatoire à partir d'octobre 2018 pour tous les immeubles qui datent d'avant juillet 1997", ajoute l'expert. Les maîtres d'ouvrages ou propriétaires devront fournir le document, qui diffère d'un diagnostic technique portant sur l'intérieur et les parties communes, à toutes les entreprises intervenantes sur l'envelopper extérieure, éventuellement via une maîtrise d'œuvre. "Le tout est de ne pas se lancer dans des travaux en méconnaissance", sermonne Gérard N'Diaye, pour des questions de responsabilité juridique : l'exposition de travailleurs à des fibres au-delà du seuil réglementaire est en effet lourdement punie.

 

Que se passe-t-il sous les bâches de confinement ?

 

Amiante
Amiante © Grégoire Noble

 

 

Mais, une fois repéré, comment se passe un chantier de désamiantage ? Des bâches thermosoudables sont d'abord déployées tout autour de la zone à traiter. Une fois étanchéifiée, cette enceinte est mise en dépression d'air, au moyen d'extracteurs filtrés qui fonctionnent 24 heures sur 24, avec tout un ensemble de sécurités. Ceci afin que rien ne puisse fuiter vers l'extérieur de la bulle de travail. Son efficacité est d'ailleurs testée au moyen de machines à fumée pour s'assurer que toute l'extraction est contrôlée. "Les opérateurs sont formés en sous-section 3, pour le retrait d'amiante. Ils interviennent par vacations de 2h environ, pour un maximum de 6 heures par jour", relate le spécialiste. Les travailleurs doivent franchir pas moins de cinq sas différents, afin d'éviter toute contamination, et portent de véritables scaphandres de protection, avec combinaison et masque respiratoire. La sortie des matériaux, soigneusement enduits de polyane liquide puis empaquetés, se fait par un autre sas dédié. Au moment du démontage, les équipements introduits à l'intérieur de l'enceinte étanche sont d'abord aspirés, afin d'éliminer un maximum de particules, puis aspergés de surfactant pour déposer les fibres. Il faut ajouter que les bâches et tenues de protection sont à leur tour considérées comme des déchets, qui sont confiés à des entreprises spécialisées dans leur enfouissement. Gérard N'Diaye note que l'inertage, pratiqué par une seule chaufferie d'EDF en France, reste cher à 2.000 euros la tonne. Le développement de nouvelles capacités de traitement pourrait être une solution, compte tenu de l'ampleur de la tâche à venir. Les dirigeants de Socateb estiment le marché français du désamiantage à 6 milliards d'euros !

 

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