REGLEMENTATION. Loi Elan, jurisprudences, futur Code de la commande publique : de nouveaux textes parus en 2018 bouleversent une fois de plus les savoirs et pratiques en matière de marché public. Ces derniers ne concernent pas seulement les acheteurs publics, mais également les soumissionnaires et les experts susceptibles d'intervenir dans le cadre d'une assistance à maîtrise d'ouvrage

"Beaucoup de bruit, mais non pour rien", c'est ainsi qu'a été introduire une table-ronde consacrée aux marchés publics, autour de l'avocat Nicolas Charrel, spécialisé en droit public, d'Arnaud Latrèche, adjoint au directeur de la commande publique au département de la Côte d'Or et de Chantal Saichi, directrice de la commande publique à la mairie de Toulon. Elle avait lieu au salon des maires et des collectivités locales, qui s'est tenu le 22 novembre 2018 à Paris.

 

Avocat ou juriste au service de la commande publique d'une institution, tous accueillent avec un certain enthousiasme le futur code qui se verra restructuré, intégrant des lois autrefois intégrées à d'autres codes, à l'image de la loi Mop régissant la relation entre maîtrise d'ouvrage publique et maîtrise d'œuvre privée.

 

Effort de codification

 

"C'est un serpent de mer enfin sorti de l'eau", schématise Nicolas Charrel pour traduire l'impatience des professionnels à prendre en main ce nouvel outil législatif qui appuiera notamment la rédaction des futurs contrats d'achats publics.

 

 

En tant qu'acheteuse publique, Chantal Saichi "salue l'effort de codification" qui permettra d'abaisser la pile de codes à consulter avant rédaction et conclusion d'un contrat de commande publique.

 

La loi Mop, qui sera intégrée dans le futur Code de la commande publique, est aussi impactée par la loi Elan, dans la mesure où elle ne revêtira plus de caractère obligatoire. Mais pour Arnaud Latrèche, cette nouvelle loi logement "ne fait que consacrer des principes jurisprudentiels anciens".

 

Loi Mop et délais

 

La loi Elan a également permis une prorogation du recours à la conception-réalisation, qui devait prendre fin en décembre 2018. Le processus est assoupli pour les bailleurs sociaux - une demande formulée par l'USH -, permettant de déroger aux concours de maîtrise d'œuvre sans avoir à justifier d'une technicité particulière des logements à construire.

 

"Cette mesure n'était pas du goût de tout le monde", concède Nicolas Charrel, "les architectes considérant que l'on sacrifie la qualité du bâti sur l'autel de la production de logements". Il relève néanmoins les "enjeux de délais" que constituait la loi Mop, "qui avait tendance à séquencer les choses, du choix d'une maîtrise d'œuvre à celui des entreprises de travaux, et qui ralentissait les opérations de construction".

 

Revenant sur l'actualité jurisprudentielle, les participants à la table ronde ont notamment évoqué la question de l'impartialité de l'acheteur public, dès lors qu'un conflit d'intérêt venait à être prouvé, entre un des soumissionnaires et l'assistance à la maîtrise d'ouvrage.

 

Se déporter d'un marché

 

"La notion de conflit d'intérêt est de plus en plus prégnante, et en tant qu'entreprise ou AMO, la notion reste assez délicate car il reste une part de subjectivité", relève Nicolas Charrel.

 

Pour l'acheteur public, "qui ne peut être un enquêteur", il s'agit d'accumuler un maximum de preuves montrant que ce dernier a cherché à écarter toute potentialité de conflit d'intérêt entre AMO et candidats.

 

Dans un cas concret de conflit d'intérêt, le représentant d'un bureau d'études (qui, par exemple, aurait dirigé 18 mois plus tôt une entreprise d'assainissement de l'eau candidate à un marché public) se doit de "se déporter au moment des négociations, nommer quelqu'un d'autre ou faire appel à un consultant extérieur".

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