LEGISLATIF. La commission du développement durable de l'Assemblée nationale a consacré le principe de la création d'une filière REP (responsabilité élargie du producteur) dans le secteur du bâtiment, lors de l'examen du projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, qui s'est achevé ce vendredi 29 novembre.

Le secteur du bâtiment n'en voulait pas mais il risque pourtant de devoir composer avec elle. "Elle", c'est la filière REP (responsabilité élargie du producteur), dont la commission du développement durable de l'Assemblée nationale a consacré le principe lors de l'examen du projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, qui s'est achevé ce vendredi 29 novembre. "Nous mettons en place une filière REP car le secteur n'a pas proposé d'alternative vraiment convaincante", a expliqué aux députés Brune Poirson, secrétaire d'Etat à la Transition écologique.

 

 

Pour mémoire, la reprise gratuite des déchets de chantier triés à partir de 2022, inscrite dans le projet de loi sur l'économie circulaire, prévoit en contrepartie un prélèvement sur les ventes de matériaux de construction, sur le principe pollueur-payeur. Ce qui inquiète le Bâtiment. Pas plus tard que le 20 novembre, Franck Bernigaud, le président de la Fédération du négoce de bois et de matériaux de construction (FNBM), avait souligné que "la mise en place autocratique d'une filière REP aboutira à un renchérissement des prix des matériaux." La Fédération française du bâtiment (FFB) redoute de son côté un coût de l'ordre de deux milliards d'euros par an. Ces deux fédérations font partie d'un collectif de quatorze organisations professionnelles de la filière du bâtiment qui ont fait des contre-propositions au gouvernement afin de présenter un schéma inter-professionnel.

 

Recyclage : les deux demandes du groupe Saint-Gobain
Pierre-André de Chalendar, PDG de Saint-Gobain, a eu l'occasion de s'exprimer sur le projet de loi de Brune Poirson lors de l'inauguration d'une nouvelle chaîne de production de laine de verre soufflée, le 30 novembre 2019, à Chemillé-en-Anjou. "Pour recycler davantage de matériaux, il faut que l'alternative au recyclage soit dissuasive, et donc que l'on augmente les coûts de mise en décharge", a-t-il assuré auprès de Batiactu. D'après lui, ce coût est plus faible en France qu'il ne l'est aux Pays-Bas ou en Angleterre ; il accueille ainsi favorablement la mesure du projet de loi visant à augmenter la taxe générale sur les activités polluantes. Resterait aussi à lutter contre les décharges sauvages, un "problème de police".

 

"Ce qu'il me semble important, c'est que l'on ne doit pas venir casser ce qui existe déjà en instaurant un nouveau système", précise Pierre-André de Chalendar. "Prenons le temps qu'il faut, et surtout ne mettons pas d'idéologie dans ce sujet." Au sein de l'usine de Chémillé, 40% de calcin (des débris de verre) sont utilisés pour la confection de laine de verre à souffler. Saint-Gobain souhaite voir ce ratio augmenter, de manière notamment à diminuer ses émissions des gaz à effet de serre. "Plus largement, nous devons aujourd'hui réfléchir à des systèmes constructifs qui sont plus faciles à déconstruire demain", ajoute Pierre-André de Chalendar.

 

 

Le choix entre une REP et un système alternatif devait s'opérer après une étude de l'Ademe


"La filière avait tout latitude pour proposer un système alternatif, nous n'étions pas obsédés par une REP. Nous lui avons laissé du temps, ses acteurs ont eu tout loisir de discuter entre eux, d'échanger avec le ministère de la Transition écologique. Nous leur avions demandé de la transparence, de la "redevabilité", un système viable répondant aux mêmes exigences que la REP. Ils ont fait beaucoup d'efforts mais n'ont pu identifier aucun système alternatif viable, je suis la première à le regretter", a explicité Brune Poirson.

 

L'une des 14 fédérations professionnelles rappelle à Batiactu que, le 5 septembre, le ministère de la Transition écologique avait annoncé que le choix entre une REP et un schéma interprofessionnel équivalent serait effectué au terme d'une étude de préfiguration menée par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Pour cette fédération, force est de constater que l'éventualité d'un système équivalent est aujourd'hui supprimée alors que davantage de temps aurait été nécessaire pour en affiner les contours, notamment juridiques. "Nous n'avons pas de remarque particulière" à faire sur l'article 8 du projet de loi relatif à l'instauration d'une filière REP dans le Bâtiment, répond de son côté Sophie Cahen, conseillère du directeur général à la FNTP. A l'exception, précise-t-elle, "de la sortie des déchets inertes du futur champ de la REP, qui était une demande de la FNTP dans la mesure où les objectifs de 70% de valorisation fixés par la Loi ECV de 2015 sont déjà largement remplis pour cette catégorie de déchets, qui représentent l'essentiel de ceux générés dans les TP."

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