LEDOUX AVOCATS. L'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a rendu public un travail sur les cancers professionnels à l'occasion du 35ème congrès de médecine et de santé au travail. Décryptage avec Farouk Benouniche, avocat à la Cour SCP Michel Ledoux & associés.

Selon une étude de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) présentée le 6 juin 2018 à l'occasion du 35ème Congrès de médecine et de santé au travail, les métiers du bâtiment sont parmi les plus touchés par les cancers d'origine professionnelle et l'amiante est incriminé dans 42% des cas.

 

En effet, dans un peu plus de 16% des cas, ces cancers professionnels touchent les travaux de construction spécialisés et concernent en particulier les personnes exerçant des métiers qualifiés de la métallurgie, de la construction mécanique et assimilés (22,9%) ainsi que ceux œuvrant dans le secteur du bâtiment et assimilés (22,1%).

 

Ces données permettent de cibler les secteurs d'activité et les situations les plus à risque afin d'améliorer la prévention. Et risque, il y a.

 

Une fourchette d'indemnisation entre 100.000€ et 130.000€

 

Les domaines d'activité ci-dessus visés sont en effet particulièrement impactés par les maladies asbestosiques. Rappelons à toutes fins utiles que l'inhalation de cette fibre est à l'origine d'affections de type fibroses pulmonaires au rang desquelles on retrouve les asbestoses ou encore les plaques pleurales. Mais plus grave encore et l'étude de l'Anses en révèle l'ampleur, l'amiante inhalée peut causer des cancers particulièrement invalidants tels que les adénocarcinomes broncho-pulmonaires ou, pire, les mésothéliomes qui touchent la plèvre et le péritoine (parois de l'abdomen, des viscères et du poumon), au pronostic vital souvent réduit à peau de chagrin et impliquant généralement des traitements chimiothérapiques lourds qui, dans la plupart des cas, ne sont pas curatifs.
Les risques juridiques induits pour les entreprises de ces secteurs ne sont dès lors pas négligeables puisque, tout d'abord, le caractère professionnel de l'ensemble de ces maladies peut être reconnu par les caisses de sécurité sociale au titre des tableaux de maladies professionnelles 25, 30 et 30 bis ce qui grève sensiblement les taux de tarification AT-MP assumés par les employeurs.

 

 

Par ailleurs, la charge financière du développement de ces maladies pour les entreprises est souvent bien plus significative lorsque le salarié victime de l'une de ces maladies professionnelles ou ses ayants-droit envisage(nt) de faire reconnaître par le tribunal des affaires de sécurité sociale la faute inexcusable de son employeur. On peut ainsi chiffrer la fourchette actuelle d'indemnisation pour une victime décédée d'un cancer reconnu d'origine professionnelle entre 100.000€ et 130.000€.


Des poursuites pénales envisageables contre l'entreprise

 

Enfin, dernière suite judiciaire que l'employeur ne doit pas négliger en cas de recrudescence en son sein de maladies asbestosiques d'origine professionnelle, cette situation peut également aboutir à l'engagement de poursuites pénales des chefs de blessures ou homicides involontaires si les mesures de protection et de prévention prises pour endiguer le risque amiante et préserver la santé de son personnel sont jugées comme inefficientes.

 

Outre le caractère stigmatisant de la sanction pénale, ces infractions encourent, pour les employeurs personnes physiques, des peines d'emprisonnement allant jusqu'à 3 ans et des amendes pouvant atteindre 45.000€, l'amende encourue étant portée au quintuple s'agissant de la personne morale pour laquelle seule une faute simple (non caractérisée ni délibérée) est à rapporter par le ministère public pour asseoir une condamnation.

 

"Un réel risque pénal est encouru par les employeurs qui se gardent de protéger leurs salariés contre le risque amiante"

 

Il convient de noter, pour conclure sur ce point, que ces dernières années, sans aller jusqu'au développement de maladies liées à l'amiante et donc jusqu'à des poursuites des employeurs pour blessures et homicides involontaires, on dénombre toute une série de poursuites initiées par le parquet et de condamnations d'entreprises par les juridictions correctionnelles pour avoir « seulement » mis en danger la vie de leurs salariés du fait du risque d'inhalation de poussières d'amiante en leur sein.

 

Ceci témoigne, si cela était encore nécessaire, du réel risque pénal qu'encourent les employeurs qui se gardent de protéger leurs salariés contre le risque amiante. A bon entendeur…

 

L'activité du cabinet Michel LEDOUX & Associés est uniquement dédiée à la santé au travail et sur les problématiques d'accident du travail et de maladie professionnelle sous toutes leurs facettes (prévention, réduction des coûts de cotisations AT/MP, responsabilité civile, responsabilité pénale).
www.michel-ledoux.fr

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