ARCHITECTES. De quelle économie est faite la filière ? C'est la question à laquelle devra répondre l'Observatoire de l'économie de l'architecture, lancé le 16 novembre. Il aura notamment pour mission d'éclairer les zones d'ombre de la profession, en particulier concernant les architectes qui ne sont pas inscrits à l'Ordre mais qui exercent l'architecture ou des métiers "connexes".

Les pouvoirs publics et la profession veulent en savoir plus sur le métier d'architecte et l'économie de la filière "pour mieux la soutenir et la valoriser". C'est le sens de la création de l'Observatoire de l'économie de l'architecture, lancé officiellement le 16 novembre à la Cité de l'architecture et du patrimoine, à Paris. Agences, administrations, entreprises de la construction, professions libérales, salariés, étudiants, inscrits à l'Ordre et non-inscrits, professions connexes… L'idée est de mieux connaitre la profession dans sa diversité, des activités aux modes de travail.

 

 

La présidente du Conseil national de l'Ordre, Christine Leconte, a rappelé en effet que sur 100.000 étudiants qui sortent des écoles, 30.000 s'inscrivent à l'ordre. Les 70.000 autres s'inscrivent dans des professions connexes "qu'il serait bon de reconnaitre". Et de mieux connaitre : le cabinet Boston Consulting Group, qui a réalisé l'étude de préfiguration de l'Observatoire, a présenté un état des lieux de la profession, et pointé "les zones d'ombres auxquelles l'observatoire devra s'attaquer".

 

La variété des parcours gagnerait à être mieux prise en compte

 

Pour le cabinet de conseil, au-delà des 30.000 inscrits à l'Ordre, les architectes exerçant mais non-inscrits sont 15.000 à 30.000. Un ordre de grandeur très imprécis qui démontre la difficulté à connaître la profession dans sa diversité. Ces architectes formés mais pas habilités travaillent en agences en tant que salariés, ou dans d'autres structures. Cette variété des parcours au-delà des inscrits "devra faire l'objet d'un travail de l'observatoire", suggère l'étude.

 

 

En termes de chaine de valeurs, les architectes exercent une grande diversité d'activités, dont une partie en concurrence avec d'autres professions, explique le cabinet. A part l'activité de conception, très majoritaire, celles d'étude préalable et de programmation, en amont, et de réalisation puis d'exploitation, en aval, mobilisent la profession. Or, si l'on dispose, encore un fois, d'une "vision fine sur leur cœur d'activité", la vision est "parcellaire" sur les autres segments.

 

Moindre accès à une commande publique pourtant en augmentation

 

Malgré une diversité des marchés, les agences peinent à pénétrer certains marchés porteurs, révèle l'étude. Le "moindre accès à la commande publique", du fait du développement des Mapa et autres marchés négociés, a incité la profession à se reporter sur la commande privée et en particulier sur le segment du logement collectif. Régis Bertrand, de la Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques, a rappelé quelques chiffres issus de l'Observatoire de la commande publique : celle-ci représente, sur le segment du bâtiment, 18 milliards d'euros par an.

 

 

A comparer avec les 15% du PIB que pèse l'immobilier, ce qui "laisse une bonne idée des marges de manœuvre et des gisements de marchés pour les architectes", glisse le haut fonctionnaire. Pour autant, la commande publique en général se porte bien, après la chute catastrophique de la crise de 2008, dont elle est désormais remise. Régis Bertrand attend d'ailleurs, malgré la crise sanitaire, une augmentation des montants, alors même que 2020 est une année plus haute que la moyenne.

 

Evolution des métiers et manque de reconnaissance

 

Comment s'organisent les architectes dans leur travail ? Même si "hors agences, ils sont mal répertoriés", l'étude livre quelques éléments : ils exercent de moins en moins en libéral, de plus en plus en société, avec un développement du salariat important. Les agences développent "de nouvelles compétences, de nouvelles coopérations", et "certaines fonctionnent de plus en plus comme des entreprises classiques" : diversification des activités, justification de la tarification par les coûts, etc.

 

Si l'observatoire doit travailler sur les données manquantes et les zones d'ombre, il aura aussi, a insisté Christine Leconte, le rôle de travailler à une meilleure reconnaissance d'une profession "qui participe à l'intérêt général mais a du mal à boucler ses fins de mois". Elle attend de cette observatoire "une impulsion pour mettre l'architecture à sa juste place". Et pour "aider l'Etat à ouvrir une réflexion plus large sur la profession". "C'est le bon moment pour se poser la question : de quelle économie est faite la filière ?"

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