Le premier ministre Dominique de Villepin a annoncé samedi la fusion totale entre le groupe public Gaz de France et son concurrent privé Suez. Une opération qui permet de fermer la porte à une OPA étrangère. L'annonce provoque de vives réactions !

Engagées depuis plusieurs mois, les discussions entre Suez et Gaz de France se sont précipitées face à l’OPA hostile que l’Italien Enel menaçait de lancer sur Suez ces jours derniers ! Pour marquer «toute l’importance stratégique de l’énergie» pour la France, Dominique de Villepin a donc annoncé samedi la fusion totale entre le groupe public et son concurrent privé. Une opération qui aboutirait à la privatisation de Gaz de France, deuxième opérateur gazier européen.

Cette opération donnera naissance à l’un des «tous premiers groupes mondiaux de l’énergie», a déclaré le premier Ministre. Et d’ajouter qu’elle offrira également à la France «un deuxième grand acteur énergétique à côté d’EDF et renforcera la vocation industrielle mondiale de notre pays». En effet, avec une capitalisation boursière de 72,4 milliards d’euros, le nouvel ensemble Suez-Gaz de France se placerait ainsi juste derrière EDF. Et compterait plus de 210.000 employés pour un chiffre d’affaires de l’ordre de 65 milliards d’euros.
Dès lundi, cette opération d’envergure –qui doit être finalisée au cours de second semestre 2006– a commencé à prendre forme! Le ministre des Finances Thierry Breton a ainsi annoncé que la fusion se ferait par «fusion absorption» du groupe d’énergie et d’environnement par Gaz de France. La part de l’Etat dans le nouvel ensemble sera quant à elle comprise entre «34 et 35%», soit la minorité de blocage nécessaire pour empêcher toute tentatived’OPA.

Réactions en chaîne

Cette annonce de rapprochement a provoqué la colère des autorités italiennes qui souhaitent saisir la Commission européenne pour freiner la constitution de ce nouveau champion national. «Nous nous trouvons face à une énorme violation du droit communautaire et du libre marché», a déclaré le ministre italien de l'Industrie, Claudio Scajola.
De son côté, Jacques Barrot, vice-président de la Commission européenne, a estimé que la fusion semblait respecter la législation sur la concurrence mais allait à l'encontre de la volonté de l'UE de former des champions européens.

Les syndicats cherchent la parade

Les syndicats ont également fait part de leur mécontentement ! Face à cette l'annonce surprise de fusion, ces derniers se sont concertés lundi pour tenter de trouver la parade, réclamant un débat sur une alternative à la privatisation. «Nous sommes hostiles au projet car il comporte des risques majeurs», a affirmé Jean-Christophe Le Duigou (CGT), jugeant que «des milliers d'emplois» sont menacés. Pour lui, cette fusion «aboutirait à une concurrence entre EDF et GDF, engendrerait une dilution de la maîtrise publique dans le secteur de l'énergie et n'est pas de nature à favoriser la construction d'une politique européenne de l'énergie». La CGT compte ainsi présenter «des alternatives» à la fusion, proposant «d'élargir le noyau de la présence publique dans Suez pour bloquer toute OPA», a expliqué Jean-Christophe Le Duigou.
Quant à la CFE-CGC-Energie qui avait parlé ce week-end d'une opération «intelligente», elle a changé de ton à l'issue de sa rencontre avec Thierry Breton et son secrétaire général, Jean-Claude Pelofy, déplorant que le ministre se soit contenté d'exprimer des «bonnes intentions».
Par ailleurs, plusieurs fédérations CFDT ont indiqué qu'elles attendaient des «réponses précises» concernant le projet de fusion, affirmant qu’«aucune perspective sur le volet industriel n'a été présentée», alors que le syndicat CFDT de Suez s'est dit «favorable» à la fusion. Enfin l'Unsa Energie «condamne avec la plus grande fermeté» la fusion, jugeant que «l'habillage qui consiste à faire croire que GDF absorberait Suez est une mauvaise plaisanterie».

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