Selon la presse marocaine, la deuxième plus grande mosquée au monde serait menacée d'effondrement. Une information démentie par les autorités locales qui reconnaissent toutefois un phénomène d'usure. D'ailleurs, le groupe Bouygues, qui a livré l'édifice il y a plus de 10 ans, est aux prises avec les assureurs marocains.

"Avec son minaret de 200 m de hauteur, dont le dôme couronné par un jamour de 16 m est équipé d'un rayon de 40 km de portée, la Grande Mosquée Hassan II est, à ce jour, l'édifice religieux le plus haut du monde" peut-on lire sur le site du groupe Bouygues.

Il faut reconnaître que le groupe de construction avait de quoi être fier. Le chantier de la deuxième plus grande mosquée du monde, après celle de La Mecque en Arabie Saoudite, avait débuté en 1986. Qualifié à l'époque par la presse marocaine comme le "chantier de tous les records", il avait mobilisé quelque 20.000 ouvriers et artisans marocains sous la conduite de l'architecte français Michel Pinseau. Pour la réalisation du fameux minaret, une grue d'une hauteur de 210 mètres a même été construite. La salle de prières de 200 mètres et 100 mètres de large peut contenir 25.000 personnes. Elle est surmontée par une toiture mobile de 3.400 m2 qui peut se déplacer en 5 minutes grâce à un système de roulement à chaîne.

Au niveau des infrastructures, pas moins de 26.000 mètres cubes de "béton haute performance" et 60.000 mètres cubes de roches ont été utilisés pour lutter contre les effets de la houle, cette gigantesque mosquée surplombant l'océan Atlantique.

Or, il semble que se soit précisément l'emplacement de l'édifice qui pose problème car il est érigé sur un site de neuf hectares dont les deux tiers ont été gagnés sur l'océan. Soumise à de très fortes contraintes climatiques (houle, humidité, embruns), la mosquée Hassan II a accusé des signes de vieillissement précoce dès 1998 (fissures, chute de panneaux de coffrage). Et cela, malgré un entretien constant.

"La mosquée Hassan II en danger d'effondrement", écrit même en Une l'hebdomadaire Maroc Hebdo qui s'appuie sur les conclusions d'un rapport d'experts récemment transmis à la Communauté urbaine de Casablanca et au Palais Royal. "Des piliers qui menacent de s'effondrer, du béton fissuré, de l'acier éclaté" nécessitent, selon Maroc Hebdo, "une prise en charge urgente" chiffrée à 400 millions de dirhams (40 millions d'euros).

Des informations sans doute exagérées tant l'attachement du pays à cet édifice symbole est grand. Les autorités de Casablanca ont d'ailleurs démenti ces informations "alarmistes", assurant que l'usure observée sur les infrastructures de la mosquée "ne concernent qu'une partie de l'esplanade surplombant la mer".

Au siège du groupe Bouygues Construction, on confirme l'existence de problèmes, mais selon une porte parole, "l'usure ne concerne qu'une partie de l'esplanade qui surplombe l'océan". "Il s'agit d'un problème de décollement du béton que nous avons identifié et que nous suivons depuis un an" explique-t-on en précisant bien que l'édifice proprement dit n'est en aucun cas concerné.

La préfecture de Casablanca a assuré pour sa part que ces signes d'usure sont "typiques de toutes les constructions soumises aux agressions physico-chimiques du milieu marin".
Elle a indiqué que des travaux ont été entrepris et qu'une "auscultation" serait demandée à un bureau d'études "hautement spécialisé". La préfecture avait ajouté que les "responsabilités respectives" du constructeur et des autres parties "seront approfondies par de nouvelles consultations".

C'est là que débute une autre polémique. Quelles que soient les réparations, elles seront certainement très coûteuses. Maroc Hebdo rapporte qu'une querelle judiciaire est en cours, opposant le constructeur français aux assureurs marocains pour déterminer à qui incombent les frais de restauration. Expertise et contre-expertise ont été demandées successivement par les assureurs marocains et par Bouygues pour établir l'ampleur et surtout les causes des dégradations, indique le journal.

L'hebdomadaire rappelle également que le bâtiment, réceptionné en 1992, a perdu sa garantie décennale cette année, mais, et l'affirmation a de quoi surprendre, qu'il "n'existe pas de document officiel attestant de la réception".

Toujours est-il que cette affaire est loin l'arranger celles de Bouygues. Très présent au Maroc, le groupe français est notamment candidat à un important appel d'offres d'un milliard de dollars pour la construction du nouveau port de Tanger.

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