Tandis que certains Conseils d'Architecture d'Urbanisme et de l'Environnement (CAUE) rencontrent de véritables difficultés allant jusqu'à menacer leur survie, un rapport met en avant l'importance de faire évoluer ces structures tant sur le plan du fonctionnement que du financement. Détails.

A la suite de plusieurs observations dont celles de la Cour des comptes en 2013 qui pointait du doigt l'obsolescence des statuts types des CAUE et les difficultés de leur financement, une réflexion a été engagée autour des changements à apporter à ces structures dont la mission principale repose sur le conseil, la diffusion de la qualité architecturale et la formation.

 

Si, dans l'ensemble, le réseau des CAUE remplit bien "en moyenne" ses objectifs, l'équilibre des missions est précaire et certaines (la diffusion, la formation) gagneraient à être réalisées dans un cadre territorial plus vaste. De même, la gouvernance de ces organismes est mal maîtrisée. Selon un rapport de l'Inspection générale des affaires culturelles (Igac) et du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), les CAUE "ne remplissent pas assez leurs obligations légales en termes d'assemblées générales et de réunions de CA". Autre dysfonctionnement : le financement. Un véritable point noir. Certains bénéficient seulement d'une taxe liée aux permis de construire, d'autres profitent de cette taxe mais également de subventions départementales. "L'enquête menée par la FNCAUE confirme la situation difficile de nombreux CAUE et le flou qui s'est créé entre taxe et subventions", souligne le rapport. Résultat : 25 % des CAUE sont financièrement en péril aujourd'hui.

Deux scénarios envisagés

Comment faire évoluer les CAUE ? A cette question, le rapport tente d'apporter des pistes de réforme. Deux scénarios sont jugés sérieux : le premier émet l'idée d'une amélioration du schéma existant, en veillant à la couverture exhaustive du territoire et à une tutelle améliorée, grâce à un fonctionnement en réseau renforcé ; et le deuxième s'appuie sur une évolution régionale, avec la création d'un CAUE régional destinataire de la taxe "remontée" au niveau régional, chargé d'élaborer une stratégie régionale. Dans ce cas, les CAUE départementaux resteraient compétents pour le conseil aux particuliers et aux collectivités.

 

Plus globalement, le rapport revient sur l'évolution des missions avec le développement du conseil en matière de transition énergétique et écologique. Il évoque aussi la mise en place de formations en direction des élus ou encore la hausse des actions de sensibilisation à l'architecture, l'urbanisme et l'environnement en milieu scolaire, avec l'appui d'outils mutualisés. Quant à l'épineuse question du financement, le rapport souhaite rendre obligatoire pour la collectivité territoriale, quelle qu'elle soit, le vote d'une délibération fixant la répartition de la taxe d'aménagement, entre ENS (Espace naturel sensible) et CAUE. A cela s'ajouterait la production d'un état annuel d'emploi de la taxe par la collectivité territoriale à qui elle est reversée. Le rapport propose aussi "d'imposer à la collectivité territoriale, quelle qu'elle soit, une information sur les montants et un délai maximum de reversement de la taxe d'aménagement au CAUE". Enfin, d'autres pistes sont lancées comme la mise en place d'un comité de suivi annuel des CAUE par les directeurs d'administration centrale des ministères concernés ou encore l'inscription dans les missions de la Cité de l'Architecture et du Patrimoine (CAPA), la présentation régulière, en liaison avec la FNCAUE, des résultats et des productions des CAUE.

 

Reste à savoir si ces préconisations seront suivies et quand. En attendant, certains CAUE sont plus que préoccupés par leur futur comme celui du 92 (voir encadré) qui a tiré la sonnette d'alarme en indiquant que des licenciements avaient été lancés. De même, le CAUE du Nord a annoncé en février avoir dû se séparer de 9 personnes sur 26. Les changements semblent donc inévitables… et surtout ils devront intervenir rapidement.

 

Le cas du CAUE 92
Le CAUE du 92 est inquiet. A découvert de 400.000 euros, il craint pour la suite de son activité. "On est en attente de 1,2 million d'euros", s'inquiète Philippe Laurent, président du Conseil d'Architecture, d'Urbanisme et d'Environnement des Hauts-de-Seine (CAUE 92). Et d'ajouter : "Notre enveloppe est bloquée depuis plus d'un an dans les circuits de l'Etat". Un bug qui selon lui serait lié à un changement de système informatique. Il indique avoir dû déclarer la structure en faillite ! Une situation qui pourrait conduite à la fermeture pure et simple de l'organisation d'ici à trois semaines. Le CAUE du 92 en appelle donc aux services du ministère des Finances. Pour l'instant, c'est le statu quo et des licenciements pourraient avoir lieu prochainement.

 


Les CAUE en chiffres…
- 92 CAUE sur le territoire national,
- 10 Unions Régionales (UR) de tailles très variables et d'une Fédération Nationale (FNCAUE).
- Près de 1300 professionnels (1000 permanents et 300 vacataires).
- En moyenne, les CAUE délivrent chaque année 85 000 conseils aux particuliers et 18 500 conseils aux collectivités. 10 832 communes sont adhérentes à titre individuel et 11 060 au travers de 788 intercommunalités, soit près de 70 % des communes françaises.

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