Dans une lettre ouverte aux candidats à l'élection présidentielle envoyée ce 22 mars, 300 signataires, membres de l'Académie d'architecture présidée par Manuelle Gautrand, leur demandent clairement de "l'audace, une vision et une ambition pour le territoire et la cité." Des questions architecturales et urbaines qu'ils estiment oubliées des programmes.

Marc Barani, Paul Chemetov, Jean-Marie Duthilleul, Brigitte Métra, Nicolas Michelin, ou encore Valode & Pistre et Jean-Michel Wilmotte… Ils font partie des 300 architectes signataires, membres de l'Académie d'architecture qui ont interpellé, le 22 mars 2017, par la voix de sa nouvelle présidente, Manuelle Gautrand, les onze "prétendants à la charge future de Président de la République."

 

 

Dans la lettre, adressée aux candidats, les membres de l'Académie d'architecture, s'inquiètent de voir des thématiques fondamentales absentes du débat public : parmi elles, les stratégies permettant de réduire les inégalités et les fractures territoriales et sociales ; les politiques permettant un développement durable bien compris ; la question du logement, qui représente pourtant le premier poste de dépense des foyers et enfin, la protection du patrimoine d'hier et la production ambitieuse de notre patrimoine de demain.

 

"L'ambition de qualité urbaine et architecturale est défaillante"

 

Avant d'enfoncer le clou dans le même courrier : "Or à la différence de ce que nous observons dans beaucoup d'autres pays, et en en dépit des efforts et des directives qui encadrent les documents d'urbanisme, l'ambition de qualité urbaine et architecturale est défaillante." Ces architectes, membres de l'Académie d'architecture, estiment que "l'intérêt général est souvent bafoué" ou encore que "la notion de beauté n'est pas évoquée..." Sur les sujets majeurs, les signataires leur demandent de "l'audace, une vision et une ambition pour le territoire et la cité."

 

L'inquiétude d'observer des "villes fantômes"

 

L'Académie d'architecture alerte également les candidats à la présidentielle sur le fait suivant : "l'équivalent d'un département de terres agricoles est consommé tous les sept ans par l'extension ségrégative de l'emprise urbaine : parallèlement des petites villes et moyennes périssent jusqu'à devenir des villes fantômes : la laideur envahit nos paysages urbains."

 

Dans ce sens, les architectes, membres de l'Académie, attendent des candidats qu'ils soient "porteurs d'une vision et d'un programme d'action innovants, aptes à engager notre capacité à bien vivre ensemble, et à faire progresser la qualité de notre environnement urbain, rural et paysager."

 

"Le but de cette lettre n'est pas de faire des propositions aux candidats, mais, dans un premier temps, d'alerter, nous confie, ce jeudi, Manuelle Gautrand, présidente de l'Académie d'architecture. Aucun des candidats à l'élection présidentielle ne semble avoir de programmes précis sur l'aménagement, l'architecture et l'urbanisme de nos villes.Nous sommes tous conscients que, partout, la ville est en pleine mutation, que l'étalement urbain se démultiplie et enfin que certains centres-villes, des petites et moyennes communes, ont tendance à dépérir."

 

 

Rappelons déjà que, le 11 janvier dernier, sous les dorures des salons de l'Hôtel de Chaulnes, l'Académie d'architecture, sa présidente Manuelle Gautrand, avait martelé l'importance du rôle de l'architecte, à l'occasion des quarante ans de l'entrée en vigueur de la loi sur l'architecture mais aussi de l'adoption de la loi Liberté de création, architecture et patrimoine (LCAP) votée le 6 juillet dernier. "L'architecte façonne le paysage urbain, il est en même temps, artiste, chercheur, défricheur, poète, et même fou. C'est pour cela que l'on nous craint, que l'on nous jalouse. Par ailleurs, il n'y a pas assez d'amoureux de l'architecture et d'hommes politiques qui comprennent notre rôle", avait déclaré, l'architecte.

 

Pour la nouvelle présidente de l'Académie d'architecture, "il est primordial pour la profession d'aller au-delà, de réussir à s'extraire des contours législatifs pour regarder comment l'architecture se pratique aujourd'hui, et de faire comprendre ce qu'elle est capable d'apporter". Tout en reconnaissant ce jour-là qu'"elle avait du mal parfois à être entendue."

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