ANALYSE. Le nouveau diagnostic de performance énergétique (DPE) entrera bien en vigueur ce jeudi 1er juillet 2021. Devenant opposable et environnemental, il est plus que jamais au cœur des débats avec les discussions menées au Parlement sur la loi Climat et résilience.

Le tant attendu "nouveau" DPE entre officiellement en vigueur ce 1er juillet 2021. Il apporte à cet outil un caractère opposable et environnemental, puisqu'il tiendra désormais compte des émissions de gaz à effet de serre d'un logement, en plus de sa simple performante énergétique. Cette réforme, considérée par tous les acteurs comme indispensable et plutôt équilibrée dans ses arbitrages, pose toutefois question auprès de certains acteurs, notamment en lien avec un texte paru récemment au Journal officiel. Un arrêté du 24 juin dernier a ainsi pu semer le doute sur la réelle applicabilité du dispositif ce 1er juillet ; mais le ministère du Logement, contacté par Batiactu, confirme que le nouveau DPE sera bien en vigueur à la date prévue, et que tout diagnostic de ce type fait à partir de jeudi devra l'être en application de la nouvelle méthode.

 

 

Un arrêté qui ne remet pas en cause la date du 1er juillet

 

L'arrêté paru récemment vient en fait permettre, sur la période juillet-décembre 2021, l'auto-évaluation des logiciels de réalisation du DPE par leur éditeur, sous contrôle des pouvoirs publics. "Le moteur de calcul a été mis à la disposition des éditeurs, et c'est l'État qui ensuite donne, ou non, son approbation sur leurs logiciels", nous explique le ministère. "C'est un processus assez commun, qui se fait en plusieurs étapes, comme cela a pu être le cas, par exemple, pour la réglementation thermique 2012." Au commencement de l'entrée en vigueur du nouveau DPE, un certain nombre d'auto-tests sont exigés auprès des éditeurs de logiciels, dont les résultats sont contrôlés par l'État. Puis viendra une deuxième phase, fixée à partir de septembre 2021, durant laquelle d'autres tests seront nécessaires. Enfin, en janvier 2022 (troisième phase), l'État contrôlera directement les logiciels et les étudiera de plus près. Ce qui a pu causer un certain trouble auprès des acteurs, c'est qu'il était initialement prévu que ce travail de validation soit achevé avant le 1er juillet 2021. Les parties prenantes ont finalement été prises par le temps, d'où cet ajustement de dernière minute, qui ne remet pas en cause l'entrée en vigueur de la nouvelle méthode de DPE. Ainsi, huit logiciels permettant de le mettre en œuvre, sur onze candidats, ont déjà été validés par les pouvoirs publics, assure auprès de Batiactu Thierry Marchand, président de la chambre des diagnostiqueurs de la Fnaim. La liste des logiciels agréés sera d'ailleurs publiée sur le site du ministère et régulièrement mise à jour (cliquer ici pour y accéder).

 

 

"Il faut toutefois prendre conscience du fait que la réalisation du nouveau DPE prendra 50 à 60% plus de temps que l'ancien", ajoute Thierry Marchand. "Nous, diagnostiqueurs, ne pourrons donc pas le facturer au même prix qu'avant. Il y a notamment un temps administratif supplémentaire à prendre en compte, avec énormément de données à récupérer auprès des gestionnaires d'immeubles."

 

Éradication des passoires thermiques : "La date de 2025 signifie qu'il nous faudrait lancer les travaux dès 2022"

 

Si la réforme du DPE agite autant le secteur de l'immobilier et du bâtiment, c'est aussi au regard des vifs débats qui animent le Parlement actuellement autour de la loi Climat et résilience. Celle-ci va en effet introduire un calendrier d'interdictions de louer les passoires thermiques. Le gouvernement souhaiterait le voir aboutir sous la forme qui suit : 2025 pour les étiquettes G, 2028 pour les F, 2034 pour les E (les sénateurs ayant récemment reculé cette date à 2040). L'Union sociale pour l'habitat (USH) a pu, lors d'une conférence de presse qui s'est tenue ce 30 juin 2021, donner son sentiment sur ce point. "La date de 2025 signifie qu'il nous faudrait lancer les travaux dès 2022", a tout d'abord rappelé Emmanuelle Cosse, présidente de l'organisation, pour indiquer le caractère imminent de la chose. "Il y aura dans certains cas des passages devant les architectes des bâtiments de France, voire l'impossibilité de pouvoir continuer à louer un logement qui n'aurait pas été rénové à temps." Par ailleurs, certains bailleurs sociaux n'ont pas encore pris conscience qu'ils avaient dans leur parc des logements classés G, du fait que certaines classes d'actifs (comme, assure l'USH, les logements-foyers) n'étaient pas encore soumises au DPE. Le mouvement HLM, qui se dit favorable à l'objectif d'éradication des passoires thermiques, assure par ailleurs avoir besoin de l'État pour l'atteindre, précisant que des aides publiques sur les années 2023, 2024 et 2025 pourraient être annoncées. Le coût des travaux pour sortir un logement d'une mauvaise classe énergétique pourrait aller jusqu'à 45.000 euros (classe E à B, 35.000 euros de E à C). L'USH estime à 75.000 le nombre de logements classés G dans son parc, 380.000 en F et 800.000 en E. Rénover les logements de cette dernière catégorie constituerait un réel défi, dans un temps limité.

 

 

La moitié du parc privé concerné ?

 

La réflexion est proche du côté de la Fnaim. Son président, Jean-Marc Torrollion, a ainsi noté lors d'une conférence de presse du 30 juin 2021 que "la moitié du parc privé locatif serait concerné par une interdiction de louer d'ici à 2034". Les professionnels de l'immobilier demandent aussi à ce que les aides soient fléchées vers le public concerné. "Les propriétaires bailleurs doivent être accompagnés pour supporter ces efforts." Pour l'organisation, il serait "malhonnête" de faire croire que "rénover la moitié du parc privé locatif en seulement 12 ans [serait] juridiquement, techniquement et financièrement possible". La Fnaim soutient ainsi le choix des sénateurs de repousser l'interdiction pour les étiquettes E à 2040 (au lieu de 2034). Mais le gouvernement a déjà fait savoir qu'il souhaitait rétablir la date initiale.

actionclactionfp