Embouteillages, nuisances sonores... la centaine de gros chantiers actuellement en cours dans la capitale espagnole suscite la grogne des Madrilènes. Portrait d’une ville en plein réaménagement.

Quand l'acteur américain Danny De Vito est venu à Madrid en 2001 pour promouvoir un film, il a demandé, à la vue des rues défigurées par les tranchées et des grues encombrant le ciel de la capitale espagnole, si les Madrilènes étaient à la recherche d'un trésor.

Quatre ans après, il pourrait toujours poser la question, avec encore plus de pertinence. L'Etat espagnol, la région de Madrid et la municipalité ont lancé l'an dernier quasi-simultanément d'énormes travaux qui suscitent une grogne croissante des habitants.
Bruit des marteaux-piqueurs, embouteillages, l'été dernier avait déjà été une période pénible pour les touristes et résidents qui les supportaient stoïquement en espérant que cela aiderait la ville à remporter la course pour l'organisation des Jeux olympiques 2012.
Le rêve écarté après le choix de Londres par le comité international olympique (CIO), les travaux qui se sont accélérés spectaculairement en août 2005 sont devenus un enfer pour les automobilistes, piétons, usagers des transports en commun et commerçants, et cela devrait empirer en période de rentrée.
La course moyenne des taxis s'est enchérie en proportion.
Actuellement, une centaine de gros chantiers sont en cours.
Le plus vaste est celui de l'aménagement du boulevard périphérique de Madrid, la M-30, promis par le maire conservateur de Madrid, Alberto Ruiz Gallardon, avant son élection en mai 2003. Le chantier, d'un coût initial de 3,9 milliards d'euros, doit augmenter la capacité des voies et en enterrer une partie sous le fleuve Manzanares.
«Il a été divisé en 22 sous-chantiers, ce qui permet à la mairie d'éviter de faire une déclaration d'impact environnemental selon les règles», a dénoncé Juan Garcia de l'association Ecologistas en Accion. « Lancer une telle étude peut être un processus long, or du point de vue de la mairie il faut faire vite, les travaux doivent être terminés en 2007 pour les prochaines élections municipales», estime-t-il.
Les écologistes reprochent la coupe massive d'arbres en raison des travaux de la M-30, 12.000 au total selon eux, 8.000 selon la mairie. «Même s'il y a beaucoup d'arbres, ce n'est pas une raison pour les maltraiter», selon l'écologiste qui rappelle que Madrid est la capitale qui abrite le plus d'arbres dans le monde après Tokyo.
L'arrachage de 150 acacias dans le quartier de Virgen del Puerto avait donné lieu le 20 juillet à des affrontements entre la police et des résidents.
Gallardon, qualifié de «pharaon» en raison de l'ampleur de ses grands
travaux par ses opposants, a promis le 16 août que Madrid deviendra une «ville écologique» et que pour chaque arbre coupé, «plus du double exigé par la loi sera planté», c'est-à-dire, 19 nouveaux exemplaires.
Mais cela n'arrête pas certains résidents de quartiers comme ceux de la
place Eliptica qui manifestent chaque semaine pour refuser l'abattage de 1.500 arbres.
Les travaux créent aussi des problèmes de sécurité. La M-30 est considérée comme «l'autoroute en travaux la plus dangereuse d'Europe» par des automobile-clubs européens dans une étude réalisée sur 50 autoroutes de 11 pays et validée par les clubs espagnols RACC et RACE.
Parmi les travaux titanesques figurent le creusement à charge du ministère espagnol de l'Equipement d'un tunnel reliant les deux gares madrilènes, Atocha au sud et Chamartin au nord, en passant par la Puerta del Sol.
L'éventration depuis décembre 2003 de l'emblématique place du centre de Madrid a motivé le détournement de plus de 40 lignes de bus.
Enfin, des travaux de modernisation du métro, à charge de la Communauté autonome de Madrid, ont amené la fermeture de juin à septembre d'une ligne entière, la 3, qui traverse Madrid du nord-ouest au sud.

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