CONCERTATION. Pour sa cinquième participation au grand débat national, le président de la République Emmanuel Macron s'est confronté ce lundi aux élus et associatifs franciliens dans la ville d'Evry-Courcouronnes. Au programme des doléances : soutien aux associations, équité territoriale mais aussi crise du logement, loi SRU ou statut du Grand Paris.

Un tel rendez-vous entre le Président et les élus franciliens ne s'était pas produit depuis le 22 mai dernier, date d'annonce par Emmanuel Macron d'un plan pour les quartiers qui avait laissé de nombreux élus sur leur faim. Malgré une certaine déception sur le peu d'usage fait du rapport Borloo par le président Macron, ce dernier a rapidement affirmé qu'il "ne peut pas laisser dire qu'il ne s'est rien passé depuis le 22 mai dernier", chiffrant les 4.3 milliards d'euros investis par l'ANRU en 2018.

 

Pour son premier débat en banlieue, Emmanuel Macron a été interpellé sur les questions de production de logements, d'accès au parc locatif social, au renouvellement urbain ou encore la redistribution des compétences dans le contexte du Grand Paris.

 

Les "effets de bord" de la loi Elan

 

Dans un premier tour de questions, le maire de Nanterre Patrick Jarry a dressé le portrait du logement en Ile-de-France, où "395.000 familles étaient inscrites au fichier des demandeurs de logements sociaux en 2010, contre 705.000 en 2018 alors qu'il se libère environ 80.000 par an". Déplorant le manque de fluidité et les difficultés de mobilité dans le parc locatif social, Patrick Jarry a alerté sur le risque "de mouvement de révolte dans l'espace métropolitain sur la question du logement, qui mine l'espace sur lequel nous sommes".

 

Face à un maire qui s'avoue sceptique sur l'effet des "lois et mesures récemment prises en matière de logement", Emmanuel Macron a concédé que "le climat actuel n'est pas favorable à une extension de la production" , et qu'il "reste encore des effets de bord à corriger" concernant la loi Elan.

 

"Il faut se dire les choses, la réforme a créé beaucoup d'incertitudes et a bloqué pendant un moment les choses parce que beaucoup de bailleurs ont estimé que tant qu'ils ne voyaient pas où ils allaient, ils ne construiraient pas", a jugé le président Macron, relevant les "incertitudes et angoisses" également alimentées par la suppression de la taxe d'habitation.

 

Dès les premières esquisses de la loi Elan, le Président et le gouvernement ont essuyé de nombreuses critiques sur les importantes économies demandées aux bailleurs sociaux, impactant nettement leur modèle économique. Emmanuel Macron s'est dit persuadé "que la politique du logement, ça marche mieux". Le président a dit préférer sa mantra du "produire plus" que "monter des aides pour permettre aux gens d'être subventionnés par la puissance publique, pour accompagner à l'inflation. Et à la fin, il y en a toujours qui se remplissent les poches, qui font de la spéculation foncière, ou qui construisent trop lentement pour être sûrs que ça coûtera suffisamment cher".

 

La loi SRU sanctifiée

 

Si le secteur du logement a connu un certain chamboulement au cours de l'année 2018, pas question pour Emmanuel Macron de toucher à la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU). Interrogé à plusieurs reprises par des maires sur le sujet - notamment la révision de certains critères de seuils et de sanctions - le président de la République a décliné toute mesure d'assouplissement qui "pousserait ceux qui font le plus d'effort à se sentir lâchés". Il a néanmoins admis sa volonté de "rendre le système plus intelligent" en laissant le pouvoir aux préfets "d'apprécier la loi avec une certaine latitude" et "une obligation de résultats".

 

Mais devant certaines zones grises de la loi SRU, Emmanuel Macron s'est dit prêt "à regarder les situations au cas par cas", en s'adressant au maire de Savigny-sur-Orge Eric Mehlhorn. En pleine opération de renouvellement urbain, la petite ville d'Essonne doit démolir pour reconstruire davantage de logements sociaux, mais se trouverait quand même sanctionnée entre ces deux opérations, pour être un temps descendue sous le seuil de la loi.

 

Un Grand Paris des projets, les départements préservés

 

Très attendu sur ce sujet, le chef de l'Etat s'était jusqu'ici peu exprimé sur le Grand Paris. En attente depuis plus d'un an et demi d'une mise au point institutionnelle, certains maires de petite comme de grande couronne n'ont pas manqué de questionner le président sur le statut définitif de la Métropole du Grand Paris et le transfert de compétences qu'elle pourrait impliquer.

 

Emmanuel Macron a admis avoir un temps pensé à une suppression des départements de la Seine-Saint-Denis, des Hauts-de-Seine et du Val-de-Marne: "même si ça (l'échelon) ne marche pas très bien, cela pourrait être pire. Et mieux vaut ne rien faire quand ça peut être pire", a-t-il philosophé.

 

"On ne peut pas tout gérer par la norme, je crois plus au Paris des grands projets qu'au Grand Paris des compétences et du mille-feuille, car on a quand même créé un beau mille-feuille", a-t-il ironisé. Un Grand Paris de projet plutôt qu'un nouveau degré de complexité à la gouvernance francilienne est donc la conviction d'Emmanuel Macron envers le Grand Paris, qui a par ailleurs cité le rapport "Paris en grand" de l'architecte Roland Castro présent lors du débat et complimenté pour son "approche créative" plutôt qu'institutionnelle.

 


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