SOLUTION/MATERIAU. Une tour d'habitation de grande hauteur - vestige des années 1960 - a profité d'un ravalement de façade pour effectuer un chantier global de rénovation énergétique. L'intervention, en site occupé, doit permettre d'améliorer l'isolation acoustique et les performances thermiques de l'ensemble. Visite guidée avec François Pelegrin, l'un des architectes.

Comment une opération de ravalement de façade sur un immeuble de grande hauteur d'habitation est-elle devenue un projet beaucoup plus vaste incorporant la performance énergétique et la valorisation immobilière ? Tout simplement lorsque le conseil syndical s'est penché sur la facture énergétique des copropriétaires : les charges avaient en effet fortement augmenté au cours des dernières années, en relation avec la hausse des prix de l'énergie. "Les réflexions ont démarré en 2008", précise Emmanuel Poussard, de l'Agence Paris Climat. "C'est un chantier emblématique, tant au point de vue architectural, avec un gros effort qui a été fait, mais également au niveau du portage du projet de rénovation énergétique", poursuit-il.

 

Située dans le sud du 15e arrondissement parisien, la tour Super-Montparnasse a été conçue par l'architecte Bernard Zehrfuss (également créateur du CNIT de la Défense et du stade Charléty) à la fin des années 1960. La tour, haute d'une centaine de mètres, était revêtue de pâte de verre qui commençait à s'effriter. François Pelegrin, l'architecte chargé de la rénovation, explique : "Il fallait respecter les modénatures voulues à l'origine pour ne pas trahir l'architecture et préserver l'élancement de la tour. On ne voulait pas donner une autre écriture architecturale".

 

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Des tours "radiateurs"

Super Montparnasse
Super Montparnasse © Grégoire Noble
Un audit énergétique, mené par le cabinet Paziaud Ingénierie (groupe Nepsen), préconise l'utilisation d'une isolation thermique par l'extérieur, accompagné d'un changement de menuiseries et l'installation d'une VMC. L'objectif : atteindre le niveau du label BBC Rénovation et passer d'une étiquette énergétique "D" (170 kWhep/m²/an) à une étiquette "C" (104 kWhep/m²/an). "Il a été estimé que 227.000 € pourraient être économisés chaque année sur la facture énergétique", annonce Emmanuel Poussard. De quoi amortir rapidement le coût de l'intervention - d'environ 5 M€ - surtout en tenant compte d'une hausse de 4 % par an des coûts de l'énergie. "L'architecture des années 1960-1970, c'est ce qu'on apprend aujourd'hui à ne plus faire : ce sont de véritable radiateurs à l'envers, des gouffres énergétiques avec de nombreux refends, certes agréables à l'œil", raconte François Pelegrin.

ITE pour IGH

Super Montparnasse
Super Montparnasse © Grégoire Noble
Afin de conserver les ombres et reliefs de la façade, la solution, digne de la haute couture, a consisté à coudre une robe de différents isolants directement sur l'édifice. C'est l'entreprise Lucas Reha qui a été choisie pour poser les presque 7.800 m² de revêtements, composés de plusieurs produits. "Nous avons de la laine de verre sur les façades et de la laine de roche dans les loggias, afin de casser les ponts thermiques et respecter la réglementation incendie", détaille Jean-Marie Jaouannet, le conducteur de travaux. "La laine de roche technique permet l'apposition d'un enduit, tandis que la laine de verre, plus légère, autorise une manipulation et une mise en œuvre facilitées". Le façadier annonce que les produits utilisés (Isofaçade 32 et 35) présentent une faible épaisseur pour leur niveau de performance thermique et que leur bonne tenue est liée à l'utilisation d'une toile renforcée. "Il faut moins de chevilles pour tenir l'isolant, entre 3 et 5 étoiles par m². D'où moins de palettisation, moins de camions et moins de déchets grâce à un produit plus compact", renchérit-il.

Chantier en cours

Super Montparnasse
Super Montparnasse © Grégoire Noble
Outre l'ajout d'isolants en façade, le projet a également porté sur le changement des fenêtres (par des menuiseries Tryba en aluminium) et le traitement des entrées d'air (loggias et coffres de volets roulants). L'ensemble de l'immeuble sera habillé d'un bardage en tôle d'aluminium de trois coloris différents, afin de respecter la colorimétrie d'origine : un blanc cassé, un gris et du noir. Il faut noter que le projet a été validé à la fois par les ayant-droits de Bernard Zehrfuss, par les Architectes des Bâtiments de France et l'architecte de la ville de Paris, l'association du Vieux Paris et celle du Patrimoine du XXe siècle.

Fiche technique

Super Montparnasse
Super Montparnasse © Pelegrin - LAir & Roynette
Bâtiment : Tour Super-Montparnasse (1968), Paris 15e
Opération : rénovation d'un IGH-A de 270 logements sur 30 étages
Maître d'ouvrage : Conseil syndical de copropriété
Maître d'œuvre : Architecture François Pelegrin et Lair & Roynette
Bureau d'études : Paziaud Ingénierie (groupe Nepsen)
Surface rénovée : 7.787 m² de façades
Façadier : Lucas Reha
Budget : 4,9 M€ (dont 2,75 M€ pour l'isolation ; 450 k€ d'installation d'échafaudages/chantier)
Subventions et aides : 400 k€ (Ademe/région) et 136 k€ (Anah)
Calendrier : 1 an de travaux

La tour dans son état originel

Super Montparnasse
Super Montparnasse © Isover
La tour dans sa livrée d'origine, revêtue de pate de verre claire.

Sur la nacelle

Super Montparnasse
Super Montparnasse © Isover
Les façadiers à l'œuvre inspectent les fixations de l'ITE.

Chantier en cours

Super Montparnasse
Super Montparnasse © Isover
La pose de la laine de verre est en cours grâce à des nacelles élévatrices.

Schéma technique

Super Montparnasse
Super Montparnasse
La coupe de l'ITE.

Impression soleil levant

Super Montparnasse
Super Montparnasse © Grégoire Noble
Le jeu de lumière sur les nouvelles façades revêtues d'aluminium.