Face à une baisse sévère des marchés publics, l'Unicem vient de plaider pour une "commande publique plus responsable qui ne prenne pas seulement en compte le seul critère d'attribution au prix." Et demande notamment l'introduction de critères environnementaux. Explications.

Face à une activité des marchés publics détériorées dans le secteur du bâtiment, l'Unicem a participé, mardi 23 mars, aux 2èmes assises nationales des filières locales pour la construction durable, l'occasion de démontrer aux professionnels que le caractère local des activités des industries de carrières et matériaux représente un sérieux atout pour la filière des industries minérales.

 

Malgré, en effet, une baisse des volumes sans précédent, - 25% depuis 2008, les 3.500 entreprises du secteur ont plaidé pour "une commande publique qui ne prenne pas pour seul critère d'attribution le prix." "Les solutions importées, qui paraissent au premier abord moins chères que des solutions locales, ont en réalité un impact bien plus large sur l'économie si l'on intègre les externalités sociales, économiques, fiscales", ont expliqué les dirigeants de l'Unicem.

"L'importation de granit : un choix coûteux"

Ainsi, une étude récente, réalisée par Morgane Plantier, Faculté d'Economie et de Gestion de l'université Louis Lumière Lyon 2 portant sur "l'importation de granit : un choix coûteux", démontre que, "lorsqu'une ville privilégie l'importation de granit chinois pour la réalisation de ses travaux de voirie - en raison d'un coût apparemment moindre -, elle expose en réalité la collectivité à un déficit par rapport à une solution locale, si on prend en compte : les emplois perdus et leurs conséquences sociales ; les charges patronales et les impôts sur le revenu qui ne sont pas payés sur les salaires ; le manque à gagner sur la TVA car les salariés n'ont pas consommé en France ; la contribution économique territoriale et enfin les dépenses sociales vouées à compenser les emplois perdus."

 

Sans compter, les coûts pour l'environnement liés aux conditions d'exploitation et de transport. "Dans le cas des pierres naturelles importées de Chine, les émissions de CO2 sont multipliées par 8", argumente également l'étude. D'après, Jacques Benarrous, secrétaire général de l'Unicem Il-de-France et secrétaire général du Syndicat national de roches ornementales et de construction (SNROC), "les conséquences économiques et sociales sont par exemple importantes dans l'industrie du granit, notamment dans les Vosges. Pour rappel, 1 million d'euros de chiffres d'affaires dans une entrepris représente l'équivalent de cinq emplois préservés, sans compter qu'une absence de taxes redistribuées aux collectivités locales peut avoir des conséquences néfastes sur le secteur et le territoire."

Application des critères environnementaux

A partir de ce constat international, la Fédération des industries minérales propose au Gouvernement d'appliquer plus "systématiquement les critères environnementaux dans les marchés publics."

 

"Aujourd'hui, seuls 6 % des marchés publics intègrent des clauses environnementales et, lorsque c'est le cas, elles comptent pour moins de 10 % dans la note finale", pointe Jacques Benarrous, qui demande notamment aux pouvoirs publics de sensibiliser et former les acheteurs publics à une meilleure utilisation des possibilités offertes par le code des marchés publics, et de les inciter à introduire de telles clauses. Un chiffre ? "Pour le transport, la production de gaz à effet de serre est huit fois plus importante entre la Chine et la France ! Ces chiffres font réfléchir", reprend-il.

Vers une internationalisation des coûts cachés

La fédération suggère également l'idée "d'internationaliser des coûts cachés afin de permettre à l'acheteur public de déterminer avec certitude les conséquences des options qui s'offrent à lui, notamment pour le budget public, et de sécuriser sa décision au regard du code des marchés publics, qui lui enjoint de choisir l'offre économiquement la plus avantageuse."

 

Les dirigeants de l'Unicem considèrent également que l'économie circulaire constitue un vecteur de relocalisation et un atout pour le développement économique local. La prise en compte du critère "économie circulaire" dans les contrats publics, qu'ils soient ou non soumis au code des marchés publics reste une piste à approfondir, estiment-ils.

 

Afin d'encourager les boucles courtes, dans une logique d'économie circulaire et de mise en valeur des matériaux du terroir, l'Unicem, propose également que "l'article 53 I.1 du code des marchés publics accorde le même traitement aux matériaux minéraux de construction qu'aux produits agricoles, qui figurent tous deux parmi les plus transportés en France."

Le recours à l'allotissement privilégié

Dernière proposition pour relancer la commande publique : "Identifier un lot pour les matériaux de construction permettrait, selon l'Unicem d'y faire accéder secteur et d'introduire pour les prescripteurs des critères environnementaux, sociaux, qualitatifs et relatifs à la performance dans leur sélection." Pour rappel : le recours à l'allotissement vise particulièrement les entreprises du secteur des matériaux minéraux de construction, dont 97% sont des PME, et 70% d'entre-elles emploient moins de 10 salariés.

 

Une conjoncture dégradée en début d'année, des perspectives mitigées
D'après les dernières données provisoires de l'enquête de février 2015, les livraisons de granulats auraient légèrement rechuté par rapport au mois de janvier (-4,2 %) après deux mois consécutifs de redressement, pointe la note mensuelle conjoncturelle de l'Unicem. En dépit de ce repli au mois de février 2015, l'activité du dernier trimestre demeure toutefois en hausse de 1,7 % par rapport au trimestre précédent (septembre à novembre) confirmant ainsi la certaine inflexion de l'activité perçue ces derniers mois.

 

 

"Ce diagnostic vaut aussi pour le secteur du béton prêt à l'emploi (BPE) qui a connu un nouveau recul de ses productions en février (- 5,1 %) après deux mois un peu mieux orientés", indique l'Unicem. Néanmoins, le rythme d'activité du trimestre, c'est-à-dire de décembre à janvier, se redresse de + 2,3 % par rapport aux trois mois précédents, traduisant là aussi le franchissement d'un point bas.

 

Côté prévisions, pas de changement par rapport à novembre 2014.
"Il faudra sans doute attendre le second semestre pour connaître une stabilisation de l'activité à ses niveaux de 2014 mais l'année 2015 se solderait au final par un nouveau recul de la production, de l'ordre de - 5 %", déplore-t-elle.

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