ÉNERGIES RENOUVELABLES. Auditionnée par la commission des affaires économiques du Sénat, la ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne est revenue sur les différents aspects de la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Et a déploré au passage "le développement anarchique" des éoliennes, dont les parcs ont créé par endroits "une saturation visuelle".

Un changement de ton sur l'éolien au sein même du Gouvernement ? Ce 18 février 2020, la commission des affaires économiques du Sénat a auditionné la ministre de la Transition écologique, Elisabeth Borne, sur la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) dont le texte a été publié le 20 janvier dernier, en même temps que celui de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC). Les parlementaires ont fait part à la ministre de leur inquiétude sur le financement de la PPE tout en lui demandant d'appliquer scrupuleusement les objectifs de la loi Energie-climat, notamment pour les filières du biogaz, de l'hydrogène et de l'éolien en mer.

 

 

"Les objectifs adoptés dans le cadre de la loi Energie-climat ne doivent pas être amoindris par des dispositions réglementaires contraires à la volonté du Législateur", a estimé la présidente LR (Yvelines) de la commission, Sophie Primas. Autrement dit, les sénateurs souhaitent que le Gouvernement retire du texte de la PPE les contraintes réglementaires encadrant ces différentes sources d'énergies. Mais leurs requêtes portent aussi sur l'accroissement du soutien de l'Etat à la filière nucléaire, bien qu'ils regrettent que deux énergies alternatives, la cogénération et la géothermique électrique, aient été écartées. Pour le sénateur LR des Vosges Daniel Gremillet, "l'objectif de neutralité carbone que nous avons fixé ne peut être atteint que par un accompagnement de la sortie des énergies fossiles, le maintien d'un socle performant d'énergie nucléaire et un soutien à l'essor des énergies renouvelables".

 

"Changer les règles" avec "un guichet unique" et des "mécanismes" de répartition

 

Mais c'est bien sur ce dernier point qu'une rupture non-négligeable dans le discours officiel sur les éoliennes a été actée par Elisabeth Borne. Répondant à une question d'Anne-Catherine Loisier, sénatrice centriste de la Côte-d'Or, la ministre a affirmé : "Je partage ce que vous avez dit sur le développement anarchique de l'éolien. C'est vraiment un énorme sujet, je l'ai dit aux acteurs de la filière. Il y a à la fois des implantations de parcs éoliens en co-visibilité avec des monuments historiques - je ne comprends même pas comment on a pu arriver à ces situations - ; on a des territoires dans lesquels on a une dispersion de petits parcs, de tailles et de formes variables, qui donnent une saturation visuelle, voire un phénomène d'encerclement autour de certains bourgs, qui est absolument insupportable."

 

Elisabeth Borne a ajouté que son ministère travaillait actuellement sur ce sujet avec les élus locaux concernés, particulièrement avec la région Hauts-de-France, dont le potentiel d'implantation d'aérogénérateurs est important, "pour changer les règles, pour s'assurer qu'on arrive à définir des zones propices et d'autres qui ne le sont pas, qu'on ait un guichet unique par département, qu'on ait des mécanismes qui nous amènent à une répartition plus équilibrée sur le territoire". Et la ministre de citer l'exemple de l'ancienne région Aquitaine (regroupant la Dordogne, la Gironde, les Landes, le Lot-et-Garonne et les Pyrénées-Atlantiques), où les éoliennes sont absentes. L'idée étant également que les porteurs de projets n'aillent pas les concrétiser "systématiquement" dans des zones qui comptent déjà des parcs.

 

 

Développer le offshore et limiter le onshore

 

Durant cette audition, Elisabeth Borne a par ailleurs indiqué aux sénateurs que l'appel d'offres du projet de parc éolien au large de l'Occitanie "devrait être lancé en 2021 pour une attribution fin 2022". Concernant celui au large de l'île d'Oléron, les concertations seront relancées courant 2020 en vue d'une saisine de la Commission nationale du débat public en 2021, avec "un appel d'offres qui devrait être lancé en 2022 pour une attribution en 2023". Car pour la ministre, un rééquilibrage entre les parcs terrestres et maritimes semble incontournable pour mieux faire accepter cette source d'énergie : "On a des objectifs importants sur l'éolien, il faut qu'on fasse ce travail important sur l'acceptabilité sinon on aura du mal à les tenir. Je pense qu'on a quand même une marge de manœuvre sur laquelle on pourra peut-être jouer : c'est un peu plus d'éolien en mer et un peu moins d'éolien sur terre, étant entendu que la production d'une éolienne en mer est huit fois supérieure à celle d'une éolienne terrestre."

actionclactionfp